Agrégateur de flux

Derrière la porte

Mammouth - mer, 28/05/2025 - 10:01
Quand la détresse animale devient le miroir de la souffrance humaine

Crédits photos : Louise Joenen

En 2024, 1.698 animaux sont entrés à la SPA de Charleroi. Ce chiffre, à lui seul, reflète une réalité accablante : celle d’un refuge saturé, où la détresse animale devient le miroir de la souffrance humaine.

Virginie est bénévole à la Société Protectrice des Animaux de Charleroi depuis sept ans. Ancienne aide-ménagère, elle jongle aujourd’hui entre ses quatre enfants et ses journées d’inspections. Jérôme, son binôme du mardi, est un ancien para-commando. Il a quitté l’armée après un accident de parachute. Aujourd’hui, c’est dans la défense animale qu’il a trouvé sa reconversion. Tous les mardis, ils embarquent ensemble dans la même camionnette blanche au logo bien visible de la SPA pour des journées rythmées par les visites chez les maîtres soupçonnés de maltraitance.

Première Adresse

La maison se trouve dans un petit quartier calme. Une voisine indique la bonne porte. Derrière celle-ci, un homme d’une soixantaine d’années, l’air méfiant. Ses cheveux sont en bataille, son regard inquiet. À ses pieds, un chien massif vient saluer les deux inspecteurs. « Le petit n’arrêtait pas de le provoquer. Il aboyait, tournait autour. Sam s’est défendu. Il l’a attrapé dans sa gueule, mais il n’a pas mordu. Pas de sang, pas de blessure. Il s’est contenté de le repousser. C’est un croisé husky-labrador, 65 kilos, une vraie brute. J’ai juste séparé les deux. » L’autre chien n’est pas identifié. Une lacune fréquente lors des inspections. L’identification se fait généralement lors de la première visite chez le vétérinaire : une puce sous-cutanée, mentionnée sur le carnet de santé. Deux chats bondissent entre la table et les escaliers, attrapant quelques croquettes laissées là. Poppy, le deuxième chien, traîne la patte. Il respire difficilement, souffle fort comme un vieil accordéon troué. « C’est mon pépère, il a 21 ans », dit l’homme avec tendresse. « Il n’a plus de poils sur le dos, il n’entend plus rien, mais il est là. »
Sur les murs, des cadres. Beaucoup de cadres. Des photos de chiens. L’un d’eux attire l’attention : un chien noir dans un cœur rouge. Un compagnon parti trop tôt, sans doute. Tout ici transpire l’attachement. L’appartement est propre, les animaux sont nourris, l’ambiance est calme. Pas de signe évident de négligence. L’homme raccompagne les inspecteurs à la porte en parlant encore de Sam et Poppy. « Sam protège toujours le vieux. Ils sont inséparables », glisse-t-il en souriant.

Première adresse, une visite inattendue. Sam et Poppy, l’heure des besoins dans le jardin. Deuxième adresse

Une maison dont l’appui de fenêtre croule sous les bouteilles vides de Jupiler. Un homme d’une cinquantaine d’années entrouvre la porte. « C’est pour quoi ? » Il referme aussitôt. Sur son bras, des marques : griffures, morsures, cicatrices sèches. À l’intérieur, des cris. Une voix de femme. De longues minutes passent. Quand la porte se rouvre, il tient un staff américain noir et blanc en laisse courte. Kenzo. Le salon est une chambre. Un lit aux draps colorés occupe le centre. Une femme en poncho Stitch y est allongée. Autour, deux vitrines pleines de peluches à l’effigie du même personnage. À côté du lit, deux bacs de Jupiler comme tables de chevet. Au mur, des souvenirs : Elvis, New York, une photo de mariés, où l’on n’arrive même plus à percevoir les visages, effacés par le temps. Et puis, au-dessus, une petite maison dans une prairie, qui adoucit le tout. L’homme pointe une grande porte brune du doigt. « Le deuxième chien est dans la cave… Faites gaffe, je ne sais pas comment il va réagir. »

La descente est raide, il fait sombre. Une ampoule nue pend du plafond. En bas des marches, Beethoven, le deuxième chien. Il ne grogne pas. Il nous regarde, avec de grands yeux brillants. Il s’approche, redescend, tourne en rond et urine sur une pile d’objets. Une cave sans lumière naturelle. Sept mètres carrés, à tout casser. C’est rempli de vieilles affaires, on peut à peine se déplacer. Les ouvertures sont barricadées. Une porte au fond semble condamnée depuis longtemps. « Il ne s’entend pas avec l’autre chien, il est agressif, alors on n’a pas le choix. Il a de l’eau et à manger. » Explique l’homme. Jérôme hausse le ton. Il veut saisir le chien. La femme se lève. Son pantalon est décoré de têtes de Stitch, lui aussi. Elle crie : « Mon chien a toujours très bien vécu comme ça et il continuera ainsi. Pas question qu’on le donne. »

Le cadre légal est clair : les inspecteurs ne peuvent pas saisir un animal sans le consentement du propriétaire. Seuls la police ou le BEA (Bien-Être Animal) peuvent intervenir. Mais leur venue signifie amendes. Et ça, les maîtres ont tout intérêt à l’éviter.

Trois jours plus tard, la BEA reviendra pour un contrôle d’identification. Beethoven est toujours dans la cave. La femme, toujours en pyjama Stitch, raconte : « Il n’a pas le droit de monter. À chaque fois qu’il me voit, il montre les dents. Et puis il n’aime pas les gestes brusques, j’ai peur pour ma petite, elle n’a que huit ans. Mais mon mari le sort, de temps en temps. » La fille ainée ajoute : « Kenzo m’a déjà mordu les fesses, j’ai même dû prendre des antibiotiques. »

Beethoven les terrorise. Kenzo les mord. La femme se plaint : « Beethoven c’est surtout le chien de mon mari. Il ne veut pas le donner. On nous l’a déjà pris il y a quelques années, et on avait dû payer 400 euros pour le récupérer. »

Kenzo, l’aboyeur féroce, retenu par son maître. Beethoven, dans sa cave. Mur de cadres, dans la maison de Beethoven et Kenzo. Troisième adresse

Un immeuble. Devant la porte, beaucoup de sonnettes. Trop de sonnettes. Un voisin sort sa tête de sa fenêtre. Il vient nous ouvrir. S’ensuit alors une micro-enquête personnelle par tous les voisins. Ils se rejettent la faute les uns sur les autres, cherchant qui peut bien être le maître ayant reçu une doléance. Ils finissent par se mettre d’accord, c’est la porte du rez-de-chaussée.
« Toc-toc-toc »
Une petite voix se fait entendre derrière la porte. De longues secondes passent. Puis l’homme ouvre. Une chaleur sort de la pièce, comme si les fenêtres n’avaient pas été ouvertes depuis plusieurs semaines. À l’intérieur, deux petits chiens, Cheyenne et Mimie, courent dans tous les sens. La première, à poils ras, est si maigre qu’on voit ses côtes saillir sous sa peau tendue.
L’homme bégaye : « Elle, elle mange tous les jours. Mais elle ne grossit pas… Je, je ne comprends pas. » Ses griffes sont longues, recourbées. Elle n’est pas identifiée. « C’est la voisine du dessus qui me l’a donnée il y a un an… » Cheyenne est emmenée à la SPA. L’homme pourra la récupérer, à conditions de payer les frais de ses soins. Il baisse les yeux : « Je n’ai pas beaucoup d’argent, je ne pourrai pas payer tout de suite… » Le deuxième chien, à poils longs, semble en meilleure forme. Il devra cependant être emmené chez le vétérinaire afin que ses griffes soient coupées. Si rien ne bouge, il sera lui aussi saisi. Dehors, les voisins attendent. Ils ont envie de savoir ce qui s’est passé à l’intérieur. Ils en profitent pour papoter sur le dos de leur voisin. « Il était plus gros quand ma femme lui a donné. »

Dernière adresse

Une porte abîmée. La sonnette ne fonctionne plus. Jérôme lance quelques cailloux sur la vitre de droite, au premier étage. Un vieil homme vient ouvrir. L’odeur prend un peu plus aux narines à chaque marche. Comme un mélange de moisissure et d’excréments. C’est la quatrième fois que Virginie et Jérôme lui rendent visite. Cela fait plusieurs semaines que le maître vivait dans les crottes de son ancien chien, décédé suite à des problèmes de santé. Cette fois, rien à vue d’œil. Mais la puanteur est toujours là, incrustée dans les murs. Un seau d’eau sale traîne au milieu de la pièce, signe qu’un nettoyage récent a eu lieu.

Un nettoyage longuement attendu. La cuisine, chez Zora.

C’est alors qu’un petit chiot arrive dans les pieds des deux inspecteurs. Il n’y avait pourtant que des chats, la dernière fois qu’ils sont passés. Le vieux explique que c’est l’autre locataire qui lui a ramené. Il avait vu que la mort de l’ancien chien l’avait plongé dans la peine. « Il est arrivé en me disant : c’est le chien d’une amie, elle le laisse pour 200 euros. Moi j’ai répondu que c’était trop, alors on a coupé la poire en deux, je l’ai pris pour 100. » Il l’a appelé Zora. Une petite femelle. Il montre fièrement le carnet de santé. Vaccins faits, tout est en règle. Les murs sont tapissés de décorations étranges, les coins de pièces débordent d’objets, ou de déchets, selon l’angle. Les murs sont rouges et oranges, ce qui donne une ambiance plutôt originale. Dans la pièce, un vieux western hurle à plein volume. Un bruit de fond permanent, comme pour occuper le silence. Dans la cuisine, l’évier déborde de vaisselle. Au plafond, des bandes collantes à mouches, noircies par des centaines d’insectes. Et au milieu de tout ça, une touche de tendresse : un dessin naïf, accroché sur le frigo, aux lettres colorées. Il est écrit « Titi » en rose et jaune. Un mot d’enfant dans un décor d’abandon. Un peu plus loin, les gamelles, pleines. Une litière aussi, bien utilisée. Dans les yeux du vieil homme, quelque chose avait changé. Un peu de fierté, un peu de douceur, et peut-être l’envie de recommencer.

En 2024, la SPA de Charleroi a enregistré 1.698 entrées. Cela représente en moyenne cinq animaux par jour, comprenant recueils, abandons et saisies, le tout pour à peine une adoption quotidienne. Une cadence soutenue, dans un refuge saturé qui ne cesse de tourner, sans jamais vraiment se vider. Les inspections ne visent pas seulement les « mauvais maîtres », mais des personnes seules, submergées par la vie. Pour qui un animal est parfois le seul repère, ou au contraire une responsabilité devenue trop lourde. Alors chaque mardi, Virginie et Jérôme reprennent la route.

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Ensuite, on verra bien

Mammouth - mar, 27/05/2025 - 13:22
Au centre de réinsertion Avanti, on apprend à se relever malgré le risque de chute

Élise Houben

À Marchienne-au-Pont, Avanti accueille les cabossés de la vie. Ils ont connu l’addiction, la rue, l’échec, la prison. Ici, on apprend à se relever grâce aux 4 ateliers proposés: menuiserie, métal, cuisine et maraîchage. Des mains occupées, des tapes dans le dos, des sourires partagés, des regards rêveurs. Mais derrière chaque tentative, une réalité tenace s’impose : la chute reste possible

A côté du canal de Marchienne-au-pont, dans une rue plutôt grise et banale, se dresse un bâtiment de briques rouges recouvert de graffitis. Passée la porte en fer forgé, une odeur de métal chaud et de sciure de bois. Un sac de frappe et de nombreuses sculptures en acier habitent la cour. Dans les différents locaux du centre, des mains s’activent, des regards se concentrent. Regards tantôt rieurs, rêveurs ou penseurs. On forge, on scie, on épluche, on sème.

En entrant dans la forge, on discerne les bruits sourds du métal. Giovanni esquisse le croquis d’un poisson en fer forgé. Il parle avec un léger ton de nostalgie de ses études aux Beaux-Arts, jamais terminées, tout en montrant les dessins qu’il a réalisés là-bas.

Avanti lui permet de suivre une formation socio-professionnelle. L’objectif est d’exploiter ses compétences au travers d’un programme de 35 heures par semaine pour une période maximale de 18 mois. Ce programme fait l’objet d’un contrat de formation professionnelle via le FOREM.

La matinée s’achève, il est 10h30. La machine à café crache ses premières gouttes, une clope se roule à la hâte, une enceinte diffuse de la musique pop. Giovanni, sans enlever son tablier ni ses gants de forge, prend sa pause dans le local maraîchage. Adossé au radiateur, il discute avec Dorothée, l’une des quatre formatrices travaillant à temps plein au centre de formation.

Ici, on parle beaucoup, parfois de son passé, des galères de la vie. On se plaint aussi du manque de liberté. Il est interdit de sortir de l’enceinte du centre pendant les pauses, pour éviter les dérives. « T’en as qui revenaient complètement bourrés ou défoncés, d’autres ne revenaient simplement pas », lance Gaétan, assis sur la table du local. La restriction en agace plus d’un.

Parcours cabossés, des gestes en reconstruction

Au premier étage de la menuiserie, lors de l’atelier artistique du jeudi, Ayoub est concentré sur ses bouts de verre colorés. Il les assemble pour former un vitrail, en tentant de reproduire le logo de Naruto. Babou, comme l’appellent les stagiaires, forme l’atelier créatif. Elle encourage Ayoub et lui explique comment poursuivre son œuvre. Elle qui préfère l’art abstrait s’est habituée à la pop culture, celle des stagiaires.

Dans la cuisine, Samuel se lance dans la préparation du dessert, une mousse au chocolat, accompagnée d’un coulis à la mangue et de baie d’argousier. Il coupe les fruits avec attention, mais souvent le chef le reprend et lui montre comment s’y prendre.

Les repas du centre sont payants. Les stagiaires ont le choix entre le moins cher, un sandwich, ou un repas chaud, tous deux préparés chaque jour par l’équipe de cuisine. Ceux qui peuvent se le permettre profiteront du dessert de Samuel. Dans la salle à manger, les tables sont disposées pour que chacun puisse discuter dans un cadre convivial. Tout le monde mange son repas ensemble. Enfin, presque.

Certains s’éclipsent, préférant la compagnie d’e la fumée d’une cigarette. D’autres, comme Giovanni, proposent des concours de bras de fer, ou une partie d’échecs dans les vestiaires. L’ambiance, détendue, rappelle celle d’une cour de récréation.

Et parfois, la rechute

Ces moments forgent au sein du centre des liens de solidarité qui se prolongent parfois au-delà des frontières de la cour. « C’est un premier pas vers la réinsertion », explique Isabelle Heine, créatrice d’Avanti. Ce premier pas ne garantit pas toujours une marche sans rechute.

Après les études aux Beaux-arts avortées et une formation d’électricité pas terminée, Giovanni s’est retrouvé coincé dans la spirale des médicaments et de l’alcool. Tombé en dépression, il a été réorienté ici. Aujourd’hui, il va beaucoup mieux, il a trouvé de l’aide et se relève. Si le parcours de Giovanni est encourageant, il arrive que certains franchissent la porte l’haleine encore alcoolisée, les yeux fatigués d’une nuit sans sommeil. Ils enchaînent des retards à répétition ou ne viennent pas du tout. L’alcool, les médicaments, la solitude habitent encore leur quotidien.

Comment se reconstruire quand les dettes s’accumulent, qu’il faut choisir entre se nourrir ou se soigner ? Comment parler de formation, de réinsertion quand il faut d’abord tenter de survivre ? Est-ce que le mot réinsertion est le bon quand on a jamais eu de place dans le système?

Ayoub a passé huit ans en cellule, incarcéré depuis ses 18 ans pour vol avec violence. Maintenant sous bracelet électronique, il est obligé de passer par Avanti s’il veut éviter la prison. Les ex-détenus sous bracelet touchent un montant de 600 euros par mois s’ils vivent seuls. À Avanti, ils sont payés 2 euros brut l’heure. Une fois la nourriture et le loyer déduits, il ne leur reste presque rien.

« Toute la thune que tu gagnes part dans la bouffe, moi je vais arrêter de manger », lâche un ancien détenu. Certains passent, disparaissent, reviennent. D’autres finissent à nouveau en prison, à la rue. En Belgique, le taux de récidive est de 60%, selon l’Institut National de Criminalistique et de Criminologie (INCC).

Isabelle ne s’en cache pas: « Un CDI, c’est possible. Mais il faut un déclic. Il faut que la personne ait envie de s’en sortir ». C’est loin d’être toujours le cas. « On ne peut rien faire à la place des gens, on fait le maximum et puis il ne faut rien attendre d’eux, ce n’est peut-être pas le bon moment. Ils savent que la porte est toujours ouverte et que ce n’est pas parce qu’ils ont rechuté qu’ils ne peuvent pas revenir. »

En plus de ces obstacles s’ajoutent les préjugés, la stigmatisation, l’étiquette qui colle à la peau. Isabelle estime que 70% des stagiaires ont connu des échecs scolaires répétés qui ont toujours des conséquences aujourd’hui. La peur de ne pas être à la hauteur et le manque de confiance en soi font partie du bagage que les stagiaires continuent de porter.

C’est le début du travail pour eux, reprendre confiance, se réjouir de ce qu’ils créent au sein des ateliers. La formation étant exigeante, la fierté sur le visage des uns et des autres est d’autant plus marquée.

Dehors, Giovanni pose, avec fierté à côté d’une table enfin terminée. Prête à être emballée, elle sera mise en vente pour permettre au centre de racheter du matériel et de financer la formation.

Pour Ayoub, le premier mois est compliqué, marqué par beaucoup d’absences. Au fil du temps, il prend goût à la menuiserie. Ce qu’il préfère ce sont les ateliers artistiques. Il s’autorise à rêver peut être un jour, d’en faire son métier.

Samuel termine son parcours. Il savoure le dessert qu’il a soigneusement préparé, c’était son dernier. Demain, il quitte Avanti. Il a décroché un stage dans le domaine de la cuisine.

Aux premiers abords on pourrait croire qu’Avanti sert à remettre des personnes au travail. Qu’il suffit d’apprendre un métier, de tenir un horaire, de signer un contrat. Mais ils sont plus de 70% à sortir de la formation sans emploi stable. Et parfois, même le CDI ne suffit pas.

Parmi les œuvres qui ornent la cour d’Avanti, on retrouve celle de Joël, un ancien stagiaire. Ex-détenu, ancien toxicomane, il est décrit par Isabelle comme quelqu’un d’intelligent et d’ouvert. Talentueux, il avait décroché un contrat, trouvé un logement. Sur le papier tout semblait aller mais quelques mois plus tard, il est revenu. « J’ai un CDI, un appart, mais je suis seul à 17h. Je vois pas le sens », avait-il dit. Joël avait un cancer, il a fait sa chimio à la rue en continuant de venir à Avanti chaque après-midi. Aujourd’hui, il est décédé.

C’est à travers le décès de Joël que Isabelle a compris que la quête de sens est primordiale pour les stagiaires. « Il y a les exigences gouvernementales et puis il y a le bien-être et le sens pour la personne aussi ».

Les centres de réinsertions comme Avanti offrent un nouveau souffle. Ici, on ne promet rien, on se bat d’abord pour trouver un sens à la vie, créer du lien.

Ensuite, on verra bien.

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Les Storm Ultras, illuminés dans la pénombre du Pays Noir

Mammouth - mar, 27/05/2025 - 11:42

Crédit photo : Saâd Farahy

Après 85 jours de suspension, les Storm Ultras ont retrouvé leur place en Tribune 4. Non pas grâce à une énième réconciliation, mais au terme d’un combat juridique contre leur propre club, le Sporting Charleroi. Supporters emblématiques du kop carolo, ils aspirent à un supportérisme bruyant et assumé. Face à une direction qu’ils jugent répressive, ils défendent, fumigènes en main, une certaine idée du football : populaire, libre et vivant.

Tout commence au Royal Nord, cet emblématique café carolo situé à quelques pas du stade. Le rideau métallique se lève un peu plus tôt que d’habitude. Tom, le propriétaire de ce repaire des Storm Ultras 2001 — le principal groupe de supporters du Sporting Charleroi — s’impatiente de voir déferler la première vague de fidèles vêtus de noir et de blanc. Situé au croisement de la Rue Isaac et de l’Avenue de Waterloo, ce café de quartier s’est imposé, au fil des années, comme le point de ralliement incontournable des supporters avant chaque match. Un lieu de passage où s’échauffent les voix bien avant le coup d’envoi.

Dans le brouhaha constant des discussions, un client en maillot noir et blanc tente de lancer Tom sur la rencontre à venir. Il n’aura droit qu’à un haussement de sourcil : la tireuse ne s’arrête pas. À ses côtés, Laurent, son bras droit, sert une pils d’une main, replace un dessous de verre de l’autre. Un peu plus loin, un habitué enchaîne les pintes, la voix déjà trop forte pour l’heure. Sur les sièges en skaï usé, des écharpes élimées restent fixes malgré le rythme de la porte d’entrée qui claque. Ici, chaque objet parle du Sporting : un cadre à l’effigie d’un zèbre, une affiche qui clame la liberté des ultras, une lampe au logo des Storm Ultras. Ce n’est pas un décor. C’est un lieu saint.

Si les uns paient, tour à tour, de nouvelles tournées pour les collègues, d’autres se marrent à l’idée de se retrouver, ensemble. Pour le meilleur. Et pour le pire. Mais surtout pour le meilleur. Ça discute, ça répète les gestes d’un rituel bien rodé. Les discussions tournent autour de la compo probable, des dernières sorties du président, des rumeurs de transferts. Pourtant, une tension flotte dans l’air. Discrète mais palpable, presque sacrée. Ce n’est pas un dimanche de match comme les autres. C’est un retour. Et pas n’importe lequel.

Ce dimanche 6 avril, le soleil était de la partie pour éclairer la pelouse du Mambourg et sa tribune fétiche. (Photo : Saâd Farahy)


Ils l’attendent depuis trois mois et demi. 85 jours d’interdiction, de frustration, de silence imposé. 85 jours pendant lesquels la Tribune 4, fief des plus fervents supporters des Zèbres, s’était tue. Le 11 janvier dernier, lors d’une rencontre face à l’Union Saint-Gilloise, une série de débordements pyrotechniques avait perturbé le déroulé du match. Dans la foulée, la direction du Sporting Charleroi avait suspendu l’accès au stade à 63 supporters, dont 29 membres des Storm Ultras 2001, jusqu’au 30 juin. Une mesure prise sans attendre la décision du SPF Intérieur — seule autorité compétente en matière d’interdiction administrative de stade. Les concernés avaient saisi la justice, estimant cette sanction disproportionnée.

Le tribunal de première instance de Charleroi a rendu son jugement le 25 mars dernier: les interdictions imposées par le club ont été levées. La décision est une victoire par les Storm, qui y ont vu la fin d’une bataille contre une direction qu’ils jugent de plus en plus répressive. Claude, l’un des capos emblématiques des Storm Ultras, évoque ces évènements avec un sentiment d’injustice profond. « Sur base d’une liste de personnes qui se déplacent pour voir le Sporting, le club a identifié les réguliers. Ils ont pioché par trentaine pour nous exclure. C’était aléatoire, et c’est injuste. » Derrière la sanction, c’est le respect du règlement qui est pointé du doigt. « Le règlement d’ordre intérieur n’a pas été respecté dans cette situation. Nous avons contesté cette légalité devant la justice. »


Autour du café, des tables sont disposées pour vendre des écharpes, des t-shirts et d’autres produits à l’effigie du groupe. Chacun s’affaire : certains saluent les nouveaux venus d’une tape dans le dos ou d’une bise, d’autres préparent les derniers détails du cortège. L’ambiance monte doucement, rythmée par les retrouvailles et les rituels. Le retour se prépare, en communion.

Au-delà d’un groupe, une communauté


Les Storm Ultras ne se contentent pas de soutenir leur équipe. Depuis leur création en 2001, ils ont forgé une identité plus large que le simple soutien sportif. À leurs débuts, leur jeunesse et leur nouveauté ont suscité de la méfiance. Aujourd’hui, leur présence est incontournable. Et leur ambition dépasse les frontières du stade : ils aspirent à jouer un rôle actif dans la vie de la ville. À quelques heures du coup d’envoi du derby wallon face au Standard de Liège, Claude est en plein dans les préparatifs. Chaque détail compte. Il veille à ce que tout soit en place pour ce retour très attendu

Venir ici les jours de match et se mettre dans son habit de supporter, c’est enfiler un costume pour devenir quelqu’un

Quand il parle des Storm, son regard s’éclaire. Il partage la vision qui guide son groupe. « On est pro-Carolos. Notre objectif, ce n’est pas seulement de soutenir le club, mais aussi de faire quelque chose de plus, au-delà des tribunes. On utilise notre visibilité pour contribuer au développement de la communauté carolo et participer au renouveau de la ville. ». À travers les fumigènes colorés, les chants et les drapeaux, les Storm Ultras s’engagent. Collectes de fonds, événements pour les jeunes, soutien à des causes locales : leur influence déborde largement la T4.


Ce dimanche 6 avril, tout est noir et blanc. Les écharpes autour du cou, les t-shirts, les drapeaux qui flottent au vent, même les fumigènes. Aux abords des cafés, sur les trottoirs, dans les avenues menant au stade, une seule chose semble compter : les couleurs du Sporting. « Pour beaucoup, le Sporting Charleroi est une façon de s’évader de la routine quotidienne. Venir ici les jours de match et se mettre dans son habit de supporter, c’est enfiler un costume pour devenir quelqu’un », glisse Ned, un membre influent des Storm.

Dans ce décor urbain où les stickers zébrés recouvrent les panneaux à l’approche du stade, le sentiment d’appartenance dépasse les individus. Le noir et blanc gomme les frontières. Un membre des Storm, planqué derrière ses godasses à trois bandes et ses lunettes Aviator, le résume bien. « Ces deux mots, c’est nous : la conscience, celle de supporter notre club, et la mentalité, qu’on a pour vivre cette passion. Le supporter du Sporting sait qu’il fait partie d’une culture qui n’a rien à voir avec celles des autres ».


Alors, pour ce retour, ils ont voulu frapper fort. Et ensemble. Charleroi United. Storm Ultras, Block 22, BAC09 et d’autres entités discrètes mais fidèles au poste ont défilé coude à coude. Une foule compacte, noire et blanche, en mouvement. Claude, maître de cérémonie, rappelle à chacun l’enjeu : aujourd’hui, on joue plus grand que le terrain. Il appelle à l’unité, à la discipline, à la fierté. Du Royal Nord jusqu’au Stade du Pays de Charleroi, les supporters avancent.

La marée noire et blanche de supporters carolos se saisit du moment avant d’arriver à la Tribune 4, lançant le ton d’un derby chaud et, surtout, d’un retour tant attendu. (Photo : Saâd Farahy)

Au Boulevard Paul Janson, lieu de croisement entre tous les supporters de la T4, la tension monte d’un cran. Les chants, d’abord timides, gagnent en intensité. Ils scandent l’amour du Sporting, et la haine du Standard. Peu à peu, les bras se lèvent, tous en même temps, dans un mouvement mécanique. Un geste simple, mais chargé de sens, comme si chaque supporter s’ancrait dans un même corps collectif. Ils sont un peu plus de deux cents, en t-shirts noirs, jeans bleus, lunettes teintées. Peu de femmes dans la foule. Tous cherchent à rester méconnaissables, fondus dans la masse.


Et puis la folie éclate. Tout part d’un chant de supporters. Le pogo commence. Les groupes se mêlent, les corps s’entrechoquent, les voix hurlent. Un tourbillon noir et blanc, violent et vibrant. Dans ce chaos carolo, il y a une unité, brute. Ce n’est plus juste un cortège, c’est une vague noire et blanche, un tsunami de fierté.

Un mariage enflammé avec la direction du club


La dernière décision du club d’écarter plusieurs supporters, pour beaucoup, a été la goutte de trop. Rupture. Pour certains supporters, ces sanctions ne sont pas juste une question de règles, mais un affront. Ned est ferme sur le sujet. « Au niveau des tribunes, nous représentons le syndicat. Lorsqu’elles ne vont pas dans notre sens, nous contestons les décisions du club. On fait valoir nos droits en tant que supporters. Cette suspension était un prétexte tout trouvé pour nous jeter la pierre ». Un prétexte qui a, un peu plus, érodé la relation entre la direction et les supporters.


Au micro de Sudinfo, Mehdi Bayat, l’administrateur-délégué du Sporting, insistait sur le fait que, même si les sanctions étaient sévères, elles étaient nécessaires pour éviter des situations dangereuses. Les dirigeants réfléchissent, désormais, à une nouvelle approche, plus ciblée, qui permettrait de mieux distinguer les comportements individuels des actions collectives. Avec l’idée de garder un équilibre entre de bonnes relations avec les ultras et une bonne application des règles de sécurité.

Pour le retour des ultras, les autorités locales avaient annoncé un dispositif peu renforcé malgré la tension. Mais un hélicoptère de police, survolant le stade peu avant le début du match, annonçait autre chose. Le retour des supporters avait tout d’un symbole. Cependant, il n’a pas fallu longtemps pour que les esprits s’échauffent à nouveau. Avant le coup d’envoi, des fans liégeois, situés à l’opposé, dans la Tribune 2, ont retrouvé leurs sièges détachés, auxquels étaient accrochés des fumigènes. Si les Storm Ultras ont, après la rencontre, nié toute implication, les soupçons se sont aussitôt tournés vers les revenants du Mambourg.


Accusations automatiques, amalgames. Peu importe les faits, peu importe les preuves : pour beaucoup, “ultras” rime encore avec “violence”. Claude, lui, voit les choses autrement : « Il y a toujours eu un amalgame entre les ultras et les hooligans. Hooligans, c’est la bagarre, ça vient des Anglais qui ont popularisé ce mouvement il y a des décennies. Ultras, ça ne fait pas dans la violence, parce que ce n’est pas notre but. On voit au-delà de ça. »

Ces amalgames s’expliquent également par la diversité des groupes présents autour du Sporting. Parmi les quatorze groupes, la plupart, dont les Storm Ultras, suivent une ligne claire et structurée. D’autres, comme le Block 22 par exemple, sont perçus comme plus dissidents car très discrets sur leur communication et dans leur actualité. Ce groupe, jeune de seulement deux ans, fait régulièrement parler de lui, notamment à travers des actions en dehors du terrain. De quoi semer le trouble. Son nom revient souvent dans les colonnes des faits divers de la presse locale.


Et puis, il y a la question qui fâche : la pyro. Sujet brûlant, au cœur de toutes les tensions. Jamais vraiment tranché. Là aussi, les règles semblent floues, mal expliquées, selon certains. Claude soupire. « Les craquages ? On peut comparer ça à la limitation de vitesse sur autoroute. T’as plein de réglementations floues qui ne clarifient pas vraiment comment la pyrotechnie doit être encadrée. C’est complexe à comprendre ». Dans ce flou, les amalgames, encore eux, reviennent. Un fumigène craqué, et c’est tout un groupe qui trinque.

Le mouvement ultra, dernière culture souterraine ?


Malgré les tempêtes, les exclusions et les tensions avec la direction, l’unité tient bon. Dans la T4, personne ne se cache, même sous les cagoules. Être ultra, ici, c’est chanter, même quand l’équipe perd. C’est se lever pour peindre une banderole, organiser un déplacement, vendre des t-shirts pour financer le groupe. Dans cette agora carolo, les fumigènes colorent l’air, les tambours couvrent les chants, et chaque match devient collectif. Une manière d’exister ensemble, bruyamment, librement. Quitte à déranger.


« Toute personne qui dit des vérités qu’on ne veut pas entendre dérange. C’est le cas en politique, et aussi dans le foot », explique Claude. Mais leurs banderoles, leurs chants et leurs actions leur collent parfois une étiquette. Celle d’un groupe incontrôlable. Réducteur, sans doute. Parce que la réalité, c’est qu’au-delà de la provocation, il y a une cause : défendre une tribune, une ville, une culture.

Pour le responsable des Storm, ce mode de supportérisme a encore de beaux jours devant lui. « Tant qu’il y aura des gens comme nous pour se battre dans ce genre de mouvements, nous existerons toujours. Parce que la répression ne tuera pas la passion ». Une phrase, presque une devise.
Dans un football qui se transforme en produit, où tout est surveillé et encadré, certains choisissent de rester à l’écart, de défendre leurs propres règles. Ils refusent de se soumettre aux attentes du spectacle.

Pour eux, être un ultra, c’est défendre une culture. Une culture qui se nourrit de ses codes et de son indépendance. Tant qu’il y aura des gens pour soutenir ce mouvement, tant qu’il y aura cette volonté de se retrouver, cette culture existera. Parce qu’elle pousse par le bas. Encore et toujours. Comme le dit Ned : « Nous sommes les défenseurs d’une culture. La dernière culture underground ».

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Debout, toujours

Mammouth - mar, 27/05/2025 - 11:19

Photos : Élodie Clement

Pour les aides-ménagères, travailler et rester pauvre, c’est plus qu’un paradoxe. C’est une réalité. Tous les jours, elles s’usent le corps, pour des miettes. Jennifer ouvre les yeux chaque matin et entame cette routine qui grignote ses forces, peu à peu. Une inquiétude de plus. Quand elle regarde le site MyPension, ce nombre, en grand caractère « 2048 ». Comme une ligne d’arrivée qui se dérobe sans cesse. Comment va-t-elle tenir encore 23 ans ? Au fond de ses entrailles, la réponse : la résistance.

Dans le zoning de Jumet, les ronds-points se succèdent, les piquets de grève aussi. Une dizaine de femmes discutent. Elles sont fortes, animées, fatiguées. Un peu tout à la fois. Elles sont aides-ménagères, et aujourd’hui, elles font grève.

Une enceinte crache la chanson Hakuna Matata « Tu vivras ta vie, sans aucun souci, philosophie… ». La mélodie nargue Emmy, qui raconte que sa fille a un an, et que ça fait un an qu’elle ne dort plus. Catherine distribue des baguettes aux filles. L’une d’entre elles ironise : « De la baguette, c’est tout ce qu’on peut acheter avec notre salaire ». C’est Jennifer. 1m54, c’est la plus petite du groupe. C’est aussi celle qui a la plus grosse voix. Elle a un regard éclatant, comme le rouge de ses cheveux, courts. Calfeutrée dans sa veste rouge. Et dix ongles roses qui dépassent, dissonants. Des tatouages encadrent son visage, ses oreilles, ses avant-bras. Sur sa pommette, un triangle rouge, au marqueur.

Jennifer, elle avait commencé des études pour être éducatrice. Puis elle a rencontré un homme. Des projets ensemble, s’installer, un enfant. Il a fallu trouver un emploi pour payer ça. Ses deux parents étaient ouvriers, donc travailler, c’est dans l’ordre des choses. Elle a décroché un poste de caissière au Lidl. Elle y a fait dix ans de carrière, elle a évolué, cadre, cheffe caissière comme on disait à l’époque.

Un jour, dix ans plus tard, problème de santé, quelques semaines d’arrêt. Le médecin lui dit qu’elle peut se remettre au travail, à un niveau adapté. Ils ont plus voulu d’elle chez Lidl. « Tu es diminuée, tu sers plus à rien. » Elle a cherché dans tous les magasins. Personne ne voulait la reprendre. Alors, elle a essayé aide-ménagère, dans le titre-service. Elle s’est dit, c’est juste un dépannage. Ça fait seize ans qu’elle y est aujourd’hui. Et debout, toujours.

La vie, cette course

Les années qui l’ont le plus usée ont commencé quand sa fille avait 7 ans. Elle s’est retrouvée maman solo au quotidien répétitif. Se lever, déposer sa fille à la garderie à 7h15. Première maison, deuxième maison. La rechercher à 17h, payer la garderie. Devoirs, manger, douche, dodo. Préparer pour le lendemain. Le cartable, la collation. Robotique. Du moment où elle ouvre les yeux à celui où elle les ferme le soir. Se réveiller et se demander comment elle va finir la journée. Penser tout le temps. Faire tout le temps aussi. Certains jours, la gastro qui prend au corps. Trop peur de ne pas aller travailler. Et si le client demande une autre aide-ménagère ? Avaler 3 ou 4 cachets d’Imodium. Et une journée commence. Debout, toujours.

Puis sa fille a eu 18 ans. Elle allait entrer à la haute école, faire des études d’infirmière. Pour Jennifer, l’excitation, la fierté. La peur aussi, comment les payer ? Alors le 4 janvier 2020, elle avait demandé un temps plein à son entreprise de titres-services. La réponse : « Vous donner un temps-plein, c’est compliqué, parce que quand vous êtes malade, vous êtes chiante à remplacer. » Vu la pénibilité du métier, les employeurs rechignent à accorder des temps-pleins aux travailleuses. Selon un rapport d’évaluation commandé par le Parlement wallon, en 2019, la moyenne hebdomadaire de travail dans le titre-service est de 18 heures par semaine, et le salaire brut mensuel de 850 euros.

Revivre

Un jour, en 2020, elle a un petit pépin. Pas reçu un complément chômage auquel elle avait droit à l’époque. Dans l’entreprise de titres-services qui l’emploie, SOS Ménage, il y a des aides-ménagères qui sont aussi déléguées syndicales. Alors, Jennifer demande de l’aide à l’une d’elles. Cette collègue lui explique un tas de choses. Jennifer comprend qu’il y a des règles, et qu’elles ne sont pas faites pour être contournées. Elle l’admire de savoir tout ça. L’envie, aussi. Tout de suite, elle dit « J’aimerais en savoir autant que toi. » Alors elle se lance, déléguée syndicale. Elle comprend que c’est ça, son sens. Les formations, apprendre les lois, informer les travailleuses. Ça la rend forte, ça lui donne de l’assurance. « Quand tu ne sais pas à quoi tu as droit, tu as peur de t’exprimer. Et tu restes enfermée dans un carcan psychologique de mal-être. » Elle repense à cette travailleuse qui se faisait harceler moralement par une cliente. Toutes les semaines, la boule au ventre. Elle lui avait dit « Tu dois arrêter. On va te changer d’utilisateur, jusqu’à ce que tu te sentes bien. » Elle l’avait fait renaitre, sûrement. Jennifer renaissait aussi.

SOS Ménage

À Montigny-le-Tilleul, le ciel est éclatant. Pas un nuage. À quelques kilomètres du brouhaha visuel de Charleroi, le vert a le luxe de s’étendre. Ça sent la richesse. La classe moyenne supérieure. Même les oiseaux chantent plus juste. Là, une façade anonyme, le bureau de SOS ménage. Au fond, une salle de réunion un peu écrasante, sans fenêtre, au plafond bas.

Comme un gout de révolution dans ce paysage harmonieux : Jennifer, Laurence et Laetitia, les trois déléguées syndicales de l’entreprise, attendent les filles pour commencer l’accueil syndical. Une réunion destinée à expliquer leurs droits aux nouvelles aides-ménagères de l’entreprise. Des trois travailleuses attendues, seulement une vient, Emmy. L’employeur leur a dit « Si vous souhaitez, il y a l’accueil syndical mercredi à 9 heures ». Ça énerve Jennifer. C’est censé être obligatoire. Encore un problème de communication.

Ceux qui profitent

SOS Ménage, c’est 167 aides-ménagères : 166 femmes et 1 homme. L’actionnaire principal est un homme aussi. La société fait partie des 20 entreprises de titres-services les plus rentables de Belgique. Dans ces entreprises, jusqu’à 76% des bénéfices vont aux actionnaires, selon une analyse de la CSC et de la FGTB. Le secteur du titre-service est subventionné à 70% par les pouvoirs publics.

En janvier 2024, le prix d’achat du titre-service est passé de 9 à 10 euros. Et en janvier 2025, à 10,20 euros. Pourtant, le salaire des aides-ménagères n’a pas été augmenté au-delà de l’indexation automatique. De 2023 à 2024, elles sont passées de 13,10 à 13,36 euros brut par heure. L’augmentation d’un euro payé par les utilisateurs bénéficie surtout aux employeurs et aux actionnaires.

Cette augmentation avait fait mal. Un client de Jennifer, celui du lundi, une des plus grosses villas de Montigny, avait décidé de passer de 6 heures à 4 heures. Elle n’aura qu’à aller plus vite Jennifer, ou faire moins bien, pour nettoyer les treize pièces, sept en haut, six en bas.

Le manque de reconnaissance dans le métier, ça la rend triste, Jennifer. C’est elle qui travaille. Et elle ne gagne pas assez. « Je ne sais plus m’acheter une voiture. La mienne avait 18 ans quand elle a lâché l’année passée. J’ai été chez le garagiste pour racheter une occasion pas chère… Mais bas salaire, maman solo… Quand on a envoyé les papiers, ça a été négatif. Bon ici y a Stéphane, mon compagnon qui en a une. Mais ça me fait chier parce que je n’ai plus ma voiture à moi ».

De toute façon une voiture, c’est des frais. Jennifer se souvient de cette fois-là, en revenant de chez un utilisateur, où elle roulait sur l’autoroute derrière un camion. Un petit caillou sur son pare-brise, un éclat. Elle avait appelé sa société de titres-services « Non. Vous n’aurez rien. C’est que les accidents corporels qu’on rembourse. » Il avait fallu refaire son pare-brise à ses frais. 600 euros.

Fin de la réunion dans le petit bureau de Montigny. Chacune s’en va, commencer sa journée de nettoyage. Au volant de sa voiture, Stéphane attend Jennifer. C’est lui qui la conduit chez son utilisatrice du jour, Mademoiselle Pauline. Jennifer commence la chorégraphie habituelle : repassage, vaisselle, balayage. Mademoiselle arrive dans la cuisine. Jennifer lave. Pauline mange.

– Mademoiselle Pauline : Ça vous dérange si je mets un fond de musique ?
– Jennifer : Non pas du tout.
– Mademoiselle Pauline : Parce que là, c’est sinistre.
– Jennifer : Ho moi je suis habituée tu sais.
– Mademoiselle Pauline : Haa oui mais moi pas. Moi, je vis dans l’ambiance. Faut savoir mettre du peps dans sa vie. Joie et bonne humeur.

L’isolement, ça fait partie du métier. Seule avec ses pensées, Jennifer. Le silence. Quand elle était passée du magasin à aide-ménagère, elle avait eu du mal. Elle voyait des centaines de personnes par jour. Elle s’était retrouvée seule. Parfois, les utilisateurs sont là. Parfois même, ils se confient à elle. Parfois, c’est joyeux. Parfois pas.

L’avenir, ça fout la trouille

Parfois, c’est lourd. Des personnes âgées, enlisées dans leur tristesse, la greffent à Jennifer. « Mes enfants viennent plus me voir », « Ma santé ça ne va pas », « Je suis toute seule. Heureusement que j’ai le CPAS qui m’apporte des repas ». A la fin de la prestation, Jennifer flippe. La peur a changé de corps. Elle est collée à sa peau. Jennifer pense qu’un jour, elle aussi, aura besoin qu’on s’occupe d’elle. Elle pense à son futur. Elle se souvient qu’il lui reste 20 ans à tenir. Elle se dit qu’avec sa pension, elle ne pourra pas payer une maison de repos. Alors, elle continue de se lever tous les matins. Elle a regardé sur le site web My Pension : elle pourra partir en 2048. Il y a quelques semaines encore, c’était entre 2042 et 2046. Maintenant, écrit en grand « 67 ans ». « On y pense toutes à la pension », dit Jennifer. Elle y pense souvent. Ça fait 26 ans qu’elle travaille, qu’elle s’abime. Elle se demande dans quel état elle sera dans 10 ans, quand il lui restera encore 10 ans à tenir. Alors, elle prend au jour le jour, pas le choix. C’est plus facile de se demander comment tu vas finir ta journée que comment tu vas continuer encore 23 ans, pour rien à la fin… Des cacahuètes. Et toujours debout.

La douleur

Le corps usé fait partie du métier. Jennifer sait qu’elle est tributaire de son corps. Elles le sont toutes. Les gestes répétitifs, tout le temps, à en devenir folle. On t’apprend à l’ignorer cette douleur. Pourtant, le métier rend malade. Catherine Mathy est secrétaire permanente du secteur titre-service et nettoyage pour la centrale générale FGTB de Charleroi. Elle se bat pour faire reconnaitre les TMS – troubles musculo-squelettiques – comme maladie professionnelle dans le secteur. Les TMS, ce sont des lésions et douleurs aux muscles et aux tendons. Les parties du corps les plus touchées : le dos, les poignets, les épaules, les coudes. Selon une étude de l’ULB, les aides-ménagères sont 35 fois plus susceptibles d’en développer que la moyenne. Comme ce n’est pas reconnu comme maladie professionnelle, rien n’est remboursé. Alors la plupart, quand elles ont ces douleurs, elles ne se soignent pas vraiment. Catherine explique : « Tu prends quinze jours, parce que pendant quinze jours, tu as encore droit à ton salaire. Après ça, tu n’as plus que 60 % de ton salaire. Donc qu’est-ce que tu fais ? Tu retournes travailler, parce que t’as besoin d’argent. Et tu souffres en silence. » Debout, toujours.

Jennifer se disait que la douleur était normale. Un jour, grosse intervention chirurgicale. Pour son endométriose de stade quatre. Quatre semaines d’arrêt. La douleur, elle ne faisait qu’augmenter. Pour la première fois, elle était à l’arrêt. Et elle sentait que quelque chose n’allait pas à l’intérieur. Des années d’errance médicale, jusqu’à ce qu’on lui diagnostique la fibromyalgie. Maladie invisible. Ça lui prend soudainement, le mal de tête à plus ne savoir rien faire à part dormir. La douche, l’eau qui ruisselle sur la peau… Elle crève de mal. Elle souffrait depuis 2016, mais elle n’avait jamais écouté. Toutes les femmes autour d’elles avaient mal. La douleur, c’est dans l’ADN. Dans tous les corps des femmes. Alors parfois, c’est à coup d’anti-inflammatoires et de Dafalgan qu’elle tient, pour travailler. S’arrêter, c’est pas question.

Si elle se lève tous les matins, c’est pour mener son combat syndical. C’est ce qui lui a sauvé la vie. C’est ce feu en elle. Elle a ça dans le sang, la lutte, le collectif, vouloir mieux. Debout dans la douleur, dehors dans le froid. Parce que la vie gagne toujours. Le collectif sur la solitude. La vie sur la maladie. La force sur la fragilité. Se battre, pour toutes. Comme elle dit toujours « Le jour où j’arrête le syndicalisme, ça sera ma mort. » En attendant, elle est debout, toujours.

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Sarah Durant, une magistrate au service de l’intérêt public

Mammouth - ven, 23/05/2025 - 14:05

La quatrième semaine de mars était consacrée à la semaine de la magistrature en Belgique. Son objectif: attirer des étudiants dans la profession et anticiper le départ à la retraite de nombreux magistrats. Pendant deux jours, nous avons suivi Sarah Durant, substitut du procureur du Roi au parquet de Bruxelles. Elle nous raconte le chemin parcouru pour en arriver là.

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Le futur c’était mieux avant

Mammouth - jeu, 22/05/2025 - 11:40
Au cœur de la cité Parc à Marcinelle

Crédits photos : Lilou Vanderheyden

À Charleroi, deuxième commune wallonne la plus touchée par la crise du logement social, plus de 4.800 candidatures attendent. Alors, parmi Corinne, Andrée ou Eric, qui sont les chanceux ? Ceux qui vivent dans un logement rénové ? Dans une tour où la propreté laisse parfois à désirer ? Ceux qui vivent dans une petite maison défraîchie ? Ceux qui vivent trop nombreux dans des logements trop petits ? Même à la cité Parc, les logements classent, ou déclassent, ceux qui y vivent.

Eric 

Dès l’arrivée, impossible de les manquer : six blocs massifs de dix étages se dressent fièrement, tels des géants de béton. Tous identiques dans leur structure, ils se distinguent uniquement par leurs couleurs vives — bleu, vert, mauve, orange. De loin, ils paraissent presque joyeux… Ensemble, ils dominent le paysage, comme s’ils avaient été déposés là, au hasard, au milieu d’un grand tapis d’herbe.

Des chemins de promenade ont été créés récemment, ainsi qu’une plaine de jeux et un terrain de football. De nombreuses personnes s’y baladent avec leur chien, arpentant les petits sentiers pour dégourdir les pattes de leur fidèle compagnon. Éric et son chien, Samy, font partie de ces habitués. Ancien militaire parisien, il est arrivé à Charleroi il y a trois ans, car des proches y vivaient. Cela fait maintenant deux ans qu’il a obtenu un logement social : une petite maison de plain-pied, avec un petit jardin fleuri et une clôture en bois. Très modeste mais convenable. Il ne s’en plaint pas.

Il vit désormais de sa pension militaire. Quand on lui demande jusqu’à quand il compte rester dans sa maison, il rit et s’esclaffe : « Je vais mourir ici ! ». En désignant les tours du menton, il ajoute : « Heureusement qu’on ne m’a pas mis dans ces HLM. Là-bas, c’est le bordel. »

Dès l’entrée de sa maison, une odeur de cigarette saisit les narines. Trois canettes de boisson énergisante ouverte traînent sur la table, à côté d’un chevalet. Éric peint et aime jardiner à ses heures perdues. Au mur trônent des objets qui lui rappellent des moments de vie. Il s’allume une cigarette, ouvre une énième canette énergisée et boit à grandes gorgées. Sur ses bras, des tatouages “faits maison”, qu’il me montre en souriant. « On faisait ça à l’armée, avec les copains, quand on s’emmerdait. »

Il y a ceux qui cultivent un potager, et ceux qui n’ont même pas de balcon pour s’aérer.

Une micro-ville

La Cité Parc fonctionne comme une véritable micro-ville. Au centre, on trouve un commissariat, une école et une crèche. Un hall sportif jouxte également un terrain de dressage pour chiens. À quinze minutes à pied, supermarché, boulangerie, magasin de bricolage, de vêtements, friterie et pizzeria couvrent presque tous les besoins du quotidien.

La cité est sale. Des déchets et des objets insolites jonchent le sol. Les sacs noirs, pourtant interdits, sont entassés à proximité des bancs et des cages à ordures. Certains habitants jettent leurs déchets du haut du 10e étage. Les moins respectueux s’en moquent : ils savent qu’ils seront ramassés par la Sambrienne, et que la facture est envoyée à toute la collectivité. Une amende publique qui agace ceux qui, eux, respectent les règles.

Il y a ceux qui trient leurs déchets, et ceux qui les déposent n’importe où.

Éric, ancien militaire Il habite avec Samy, son chien, dans une petite maison de plain-pied. Corinne

Le matin, la cité est calme et vide. Elle dort encore. On est mercredi, et le soleil brille. Vers midi, la cité s’éveille doucement. Des femmes seules sortent des hautes tours, certaines avec des poussettes vides, d’autres encore en pyjama, se dirigent vers l’école de la cité. Dix minutes plus tard, elles réapparaissent, cette fois accompagnées d’un, deux, trois, parfois cinq enfants. Ensemble, ils regagnent leur bloc respectif.

En bas de la tour bleue, la numéro six, Corinne retient ses chiens qui s’approchent d’une petite fille dans une poussette. Elle se dirige vers l’ascenseur et appuie sur le bouton pour accéder au huitième étage. Son appartement compte trois chambres : elle y vivait avec ses deux filles. Depuis, l’une d’elles est partie vivre avec son copain.

Quand Corinne a fait sa demande de logement, elle espérait obtenir une maison. Elle n’avait même pas mis la cité Parc parmi ses choix. « Les gens me disaient : ne mets pas la cité Parc, c’est la pire. Mais je n’ai pas eu le choix, j’ai dû accepter », confie-t-elle. Elle s’estime quand même chanceuse d’être dans le bloc bleu, qu’elle juge « correct » comparé à d’autres, comme le huit ou le deux. Elle aimerait pouvoir déménager, mais elle n’en a ni le courage, ni les moyens.

Quand elle a emménagé, elle est arrivée dans ce petit trois chambres avec toutes les affaires d’une maison. Deux ans plus tard, son appartement déborde : des cartons, des objets entassés un peu partout. Dans la chambre de sa fille encore présente, une énorme cage à cochon d’Inde prend plus de place que le lit. La cuisine, presque plus petite que la salle de bains, est remplie d’ustensiles en tout genre.

Corinne aimerait se sentir mieux chez elle, mais elle n’ose pas investir de l’argent dans un lieu qu’elle pourrait devoir quitter quand sa dernière fille ne vivra plus avec elle.

Il y a ceux qui s’y plaisent, et ceux qui n’y restent que faute de mieux.

Corinne et ses chiens, Snoopy et Buck Elle habite le bloc bleu. Elle vit au 8e étage dans un appartement de trois chambres avec sa fille et ses deux chiens. La chambre de la fille de Corinne avec son cochon d’Inde

Des familles à l’étroit

À Charleroi, c’est La Sambrienne qui gère le parc de logements publics. Elle en possède près de 10.000. Dans la cité Parc, on compte 13 logements de 4 chambres et seulement 3 logements de 5 chambres. Les familles nombreuses peuvent demander une mutation ou candidater à nouveau pour un logement plus grand. Étant donné la rareté de ce type de logements, David Conte, porte-parole de La Sambrienne, reconnaît que l’attente peut être très longue, car les mutations sont traitées dans l’ordre de la liste d’attente. 

Faute de place, certains appartements à une ou deux chambres sont occupés par des familles nombreuses. La loi stipule que des enfants de sexes différents et âgés de plus de cinq ans doivent avoir des chambres séparées. Mais pour beaucoup de familles, ce n’est tout simplement pas possible.

Il y a ceux qui ont leur chambre à eux, et ceux qui dorment dans le salon avec leurs trois frères et sœurs.

Le parcours du combattant

Obtenir un logement social à Charleroi, c’est un vrai parcours du combattant. Le processus est long, les délais souvent décourageants.

Pour y prétendre, il faut répondre à plusieurs conditions. D’abord, ne pas dépasser un certain plafond de revenus. Ensuite, accumuler suffisamment de points pour espérer obtenir un toit. Cinq points sont accordés si vous êtes sans-abri, cinq autres si vous êtes victime de violences intrafamiliales, trois si un membre de votre ménage est porteur d’un handicap reconnu, ou encore deux si vous êtes un ancien ouvrier mineur.

Autrement dit, plus votre situation est difficile, plus vous avez de chances de décrocher le précieux sésame : un logement social dont le loyer est adapté à vos revenus. Il faut cependant faire preuve de patience. Et même lorsqu’un logement vous est attribué, vous n’avez pas le choix ni du lieu, ni du logement. C’est donc une véritable course aux points pour des centaines de familles qui attendent, chacune espérant que son parcours de vie compliqué lui vaudra une place en haut de la liste.

La Sambrienne reconnaît que le système d’attribution de points créé par la Wallonie commence à dater. Son porte-parole explique que l’on accorde encore des points de priorité à d’anciens ouvriers mineurs ou à d’anciens prisonniers de guerre. Par contre, il n’y a pas encore de points de priorité pour des parents célibataires.

De plus, La Sambrienne détient le triste record des habitations…non habités ! 13 % de la totalité des logements sont inoccupés. Cela représente 492 logements théoriquement louables, mais vides, et 771 logements considérés comme non-louables. 

La Sambrienne assure que tous les logements vacants sont suivis. Elle reconnaît néanmoins que l’inoccupation reste un véritable problème, et dit vouloir mettre en place un plan stratégique pour y remédier. Mais les délais s’allongent, les travaux s’accumulent, et certains logements sont en stand-by administratif. Pendant ce temps, certains logements vides sont pris d’assaut par des squatteurs malins, qui ne s’embarrassent pas d’attendre leur tour sur la liste… et profitent d’un toit sans payer le moindre loyer.

Il y a ceux qui règlent chaque mois un loyer, et ceux qui occupent gratuitement la maison d’à côté.

Tours de 10 étages de la cité Parc

Andrée

Dehors, il fait bon. Tandis que les habitants des petites maisons profitent de leur jardin, ceux des blocs ouvrent grand leurs fenêtres pour laisser entrer l’air. Devant une porte d’entrée, une femme âgée est assise sur une chaise, son chien en laisse à ses pieds.

Andrée a 84 ans. Cela fait 48 ans qu’elle vit dans cette maison familiale de la cité. Elle souffre d’un glaucome et ne voit presque plus. Souvent, elle garde les yeux fermés. Mais lorsqu’elle parle, son débit est rapide, presque ininterrompu. Elle confie qu’elle se sent seule et qu’elle n’échange plus beaucoup avec ses voisins.

À l’époque, elle vivait avec son mari mineur dans les anciens bâtiments de la C.E.C.A (Communauté européenne du charbon et de l’acier) qui font maintenant partie de la cité Parc. Andrée est toujours restée dans la cité, changeant plusieurs fois de logement avant de s’installer, il y a 48 ans, dans cette maison.

Aujourd’hui, elle vit seule et parle souvent à son assistant vocal pour combler la solitude. « Je dis : OK Google. Ça me tient compagnie. Je lui demande l’heure, mais parfois, il ne comprend pas ce que je dis et il arrête de me répondre », raconte-t-elle en riant doucement. À ses côtés, Youyou, son chien, aboie vivement à chaque voiture qui passe. « Heureusement que je l’ai. Sinon, je ne tiendrais pas », souffle-t-elle. « On me dit d’aller en maison de repos, mais j’ai peur, parce que je ne vois plus. Alors je reste ici… »

De nombreuses maisons familiales sont aujourd’hui occupées par des personnes âgées vivant seules, tandis que d’autres familles s’entassent dans de petits appartements. La première priorité de La Sambrienne, avant même les mutations des logements trop petits pour les familles, est justement de libérer les logements trop grands.

Cependant, la réglementation actuelle ne permet pas d’imposer une mutation. Un système de surloyer existe dans certains cas pour les chambres excédentaires, mais cela ne suffit pas toujours à encourager le déménagement.

Il y a ceux qui s’entassent à cinq dans trois pièces, et ceux qui arpentent seuls des maisons vides.

Andrée, 84 ans Elle habite une maison familiale, où elle vit depuis 48 ans. Une cité contrastée

Dans cette cité aux façades uniformes, derrière les murs identiques et les blocs alignés, se cachent des mondes intimes. Des histoires discrètes ou bruyantes, des vies qui s’emmêlent dans un quotidien pas toujours facile. Des familles nombreuses à l’étroit, des personnes âgées isolées. Certains s’attachent à leur logement comme à une chance, d’autres n’attendent qu’une chose : en partir. Mais tous cohabitent, chacun à sa manière, dans cette micro-ville : la cité Parc de Marcinelle.

Sur un mur du bloc six, une phrase taguée attire l’attention : « Le futur, c’était mieux avant.» 

Contraste entre les rangées de maisons identiques et les immeubles de 10 étages

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Mur après mur

Mammouth - jeu, 22/05/2025 - 11:17

Madame,

Votre courriel adressé à Sa Majesté le Roi est bien arrivé au Palais Royal et j’ai été chargée de vous répondre.

J’ai reçu pour mission de transmettre votre requête à Monsieur Y. COPPIETERS, Ministre wallon de la Santé, de l’Environnement, de l’Economie sociale, de l’Action sociale, du Handicap, de la Lutte contre la pauvreté, des Familles, de la Santé, l’Egalité des chances et du Droit des femmes, à Madame F. LANNOY, Administratrice générale de l’AVIQ, et à Monsieur S. LAQDIM, Délégué général de la Communauté française aux Droits de l’Enfant.

Il vous est également loisible de faire appel à un avocat qui est la personne la mieux placée pour vous assister dans cette affaire.

Jour MOINS 4224

Il y a quelque chose qu’elle ne dit pas. Qu’elle n’ose pas formuler. Élodie a vingt-trois ans. Sa fille, Charline, a dix-huit mois. Et depuis des semaines, des mois peut-être, elle sent un truc. Pas encore un mot. Juste ce nœud au creux du ventre. Charline ne parle pas. Ne montre pas. Ne répond pas. Ne cherche pas l’autre du regard. Toujours les mêmes gestes. Elle mange le même pot à la carotte, la même marque. Sinon elle ne mange pas. Autour d’elle, les gens disent que c’est rien. Que c’est peut- être son caractère, qu’elle est dans sa bulle. Qu’elle s’éveillera plus tard. Elle l’entend cent fois. Mille. Mais rien ne colle. Elle regarde les autres enfants dans les parcs. Elle voit bien. Mais elle ne pense pas au mot. Pas à celui-là. Handicap. Trop dur. Trop grand. Trop définitif. Alors elle se tait. Elle se dit qu’elle exagère.

Charline intègre une petite école du quartier. Classique. Sourires. Bonne volonté. Jusqu’à ce que Charline commence à crier. À mordre. À fuir. Les autres enfants ont peur. Les adultes ne comprennent pas. On appelle Élodie. Tous les jours. On lui dit qu’il faut « adapter », mais l’établissement n’a pas les moyens, pas le personnel, pas les outils. Et pas le temps. S’ouvre alors un tunnel. Long. Sans panneaux. Elle appelle. Elle cherche. Elle insiste. Les centres spécialisés, les écoles adaptées. Elle apprend le langage du refus. « Liste d’attente », « pas adapté », « dossier incomplet », « pas de notre ressort ». Et collectionne les brochures.

Le diagnostic tarde. Des années. Charline grandit. Les colères deviennent des tempêtes. Les nuits sont toujours blanches. Quand enfin on pose les mots — trouble du spectre de l’autisme — Élodie ne pleure pas. Elle pense à ce garçon autiste dans sa classe, autrefois. Celui qu’on évitait. Elle se demande ce qu’il est devenu. Et pour la première fois, elle se demande qui étaient ses parents. S’il en avait deux. S’ils dormaient, eux aussi, par tranches de vingt minutes. S’ils avaient crié dans leur voiture, un jour, fenêtres fermées. Puis elle pense à elle. À Charline. Et elle s’en veut. Elle culpabilise. Beaucoup. Tout le temps.

J-2557

Élodie a tenté de trouver un établissement scolaire pour Charline. Encore. Encore. Jusqu’à l’épuisement. « On a essayé plusieurs écoles. On est même allé jusqu’à Liège pour présenter Charline à une école inclusive. » Charline avait déjà été scolarisée en maternelle, « et ça s’était très mal passé ». Son diagnostic n’est tombé qu’à 4 ans. Le délai d’attente pour une prise en charge : deux ans. Résultat, « elle n’a jamais eu de vraie scolarité ». Élodie a expliqué tout ça. À chaque école. Elle a reçu des refus. Partout. « À Liège, on m’a dit oui. Ils connaissaient bien l’autisme, m’ont-ils dit. Mais quand Charline est arrivée, ils m’ont rappelée : « Elle ne reste pas assise ? Ah non, ça ne va pas être possible, madame.” Ils n’avaient aucune idée de ce que ça voulait dire, l’autisme. » À l’école suivante, Élodie a pris les devants. « Je suis entrée dans le bureau et j’ai dit : vous devez savoir une chose. Mes enfants ne sont pas propres. Mes enfants poussent. Mes enfants crient. Mordent. » Elle marque une pause. « La directrice m’a regardée, calmement, et m’a dit : “Vos enfants sont autistes, Madame.” J’ai crié : ENFIN. J’étais à bout. J’avais fait des dizaines d’écoles. » Beaucoup d’enfants autistes peinent à trouver leur place à l’école. Certains sont exclus dès les premières difficultés, d’autres sont isolés, mal compris des autres élèves, parfois harcelés. « Ma fille est non-verbale et aime rester seule. À l’école, elle se fait harceler à cause de ça », souffle une maman.

Aujourd’hui, 1 personne sur 100 est concernée par un trouble du spectre de l’autisme. Un chiffre qui a explosé en trente ans. Selon Cap48, en Belgique, 1 enfant sur 66 naît avec un TSA. Les rendez-vous sont rares. Les listes d’attente s’allongent, autant pour le diagnostic que pour obtenir une place dans un centre. Parfois plusieurs années. En Wallonie, il est impossible de savoir combien de places sont réellement disponibles pour les enfants atteints de TSA. Les services agréés le sont pour des « catégories de handicap” mixtes, et ne sont donc pas exclusivement réservées à des enfants autistes.

En mars 2013, le Comité européen des droits sociaux (CEDS), organe du Conseil de l’Europe, a condamné l’État belge pour manquements graves dans l’accueil des personnes handicapées de grande dépendance, parmi lesquelles les personnes autistes.

Trouver une place dans un centre ne suffit pas. Il faut trouver la bonne. Celle qui correspond aux besoins de l’enfant. Il y a ceux qui parlent. Ceux qui ne parlent pas. Ceux qui s’automutilent. Ceux qui ne mangent pas. Ceux qui sont violents. Ceux qui s’enferment dans le silence ou dans des gestes stéréotypés… Et les places pour les profils les plus complexes, comme Charline, sont les plus rares. « En Wallonie, on est dans une logique éducative et de projet de vie. Chaque institution a un projet propre adapté à des besoins spécifiques. Il y a des analyses en concertation avec les parents pour évaluer les besoins de l’enfant, des rencontres avec les responsables, les pédopsychiatres… un travail de grande ampleur pour assurer la prise en charge la plus pertinente. Il arrive que des centres ne soient pas adaptés à certains profils, et donc que les familles doivent en chercher un autre », explique Lara Kotlar, porte parole de l’Agence pour une Vie de Qualité (AViQ)

Mais ces principes peinent à se traduire sur le terrain. Une étude menée en 2019 par le GAMP, un groupe de pression citoyen qui défend les droits des personnes autistes et de leurs familles, auprès de dizaines de centres de réadaptation fonctionnelle, de services d’accompagnement et de structures psycho-socio-thérapeutiques, révélait que le personnel est encore insuffisamment formé à ces bonnes pratiques. Que ce soit dans le cadre des études supérieures ou de la formation continue, ces approches fondées sur les données probantes restent trop peu enseignées. Et du côté des familles, rares sont les parents bénéficiant d’une guidance qui leur permettrait d’appliquer, à la maison, les mêmes méthodes éducatives. Résultat : une chaîne d’accompagnement trop souvent rompue dès le départ. Et des enfants à qui l’on refuse, faute de moyens et de formation, la possibilité d’apprendre autrement.

Depuis 2016, les écoles ordinaires peuvent ouvrir des classes inclusives destinées à accueillir des élèves avec autisme. Ces classes, soutenues par des écoles spécialisées, visent à offrir un accompagnement adapté tout en permettant aux enfants handicapés de côtoyer leurs pairs. Maïté, mère de Victor, a longtemps essayé. « Il ne fallait généralement qu’une demi-journée pour qu’on me rappelle en me disant que l’établissement n’était pas capable de prendre en charge mon fils. »

J-2124

Le bureau est grand. Des tableaux au mur, des meubles en bois massif, une chaise en cuir de l’autre coté, une pour elle, moins confortable. Tout brille. Elle s’installe face au directeur. Le Corto, un centre psycho-socio thérapeutique de jour pour enfants et adolescents atteints du trouble de spectre autistique avec ou sans handicap associé, à Charleroi. L’assistante sociale est déjà là. Elle explique l’essentiel. Charline. Nolan. Deux enfants autistes à la maison. Pas de prise en charge. Plus d’école. Plus rien.

Et puis, dans cette pièce qui sent le bois ciré et le silence, la phrase tombe : « on n’a qu’une place. » Une. Pas deux. Elle doit choisir lequel de ses enfants elle veut sauver. Ce sont ses mots. Ce sont ses larmes. Elle inscrit Charline. Parce qu’elle est la plus grande. Parce que ses troubles sont plus lourds. Parce qu’elle hurle plus fort. Qu’elle fait plus de trous dans les murs. Nolan attendra.

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Nolan est accepté au Corto.

Entre J-4224 et pour le reste de la vie d’Elodie

Derrière les grilles, il y a les trajets, les suivis, les réunions, les dossiers à remplir, les crises à contenir, les nuits à veiller. Et presque toujours, ce sont les mères qui tiennent. Qui absorbent. Qui encaissent.

L’Institut de recherche en sciences psychologiques (IPSY) de l’UCLouvain a mené une étude, en 2019, auprès de 53 mères d’enfants autistes. Il en ressort que le stress chronique, la dépression, l’anxiété généralisée y sont monnaie courante. Entre 50 et 80 % de ces mères présentent des niveaux de stress et de dépression élevés. Pas surprenant. Pas pour Élodie. Elle dit simplement : « On n’a pas le droit d’être fatiguées. Si on tombe, tout tombe. »

La même étude explique que ce sont souvent les mères qui subissent le plus. Parce qu’elles sont en première ligne. Parce qu’elles portent tout. Les soins. Les démarches. Le lien social. Elles mobilisent ce que la psychologie appelle un coping individuel : un ensemble de ressources mentales, émotionnelles, physiques pour tenir le coup. Tenir malgré tout. Mais ce n’est pas toujours suffisant. L’étude montre que les mères déprimées ruminent plus, se sentent plus coupables, et expriment davantage leurs émotions… faute d’avoir des solutions concrètes à mettre en place. « Même si ces stratégies de coping individuel ne s’avèrent pas suffisantes, elles démontrent néanmoins leur importance en ce sens qu’elles servent à exprimer un besoin de soutien », indique l’étude. Elles agissent seules. Sans relais. Et souvent, sans conjoint. Le soutien du partenaire joue pourtant un rôle décisif. Mais quand la mère reste seule à gérer l’enfant, quand l’autre travaille plus ou s’éloigne, la pression monte. Certaines mères perçoivent alors le comportement de leur enfant comme plus exigeant, plus violent, plus « trop”. Et elles n’ont plus l’impression d’être de bonnes mères. Juste des gardiennes. Des infirmières. Des barrières humaines.

J-187

Un courrier arrive au Centre. Un recommandé de l’AViQ. La convention qui lie l’agence au Corto est rompue. Trois mois de préavis. Sans justification particulière. Juste un article du contrat qui permet la rupture unilatérale. L’Agence précise tout de même : « difficultés liées au fonctionnement thérapeutique et à la gouvernance ».

J-162

Le Corto saisit le Tribunal du Travail. Trois mois de préavis, pour des enfants autistes, c’est trop court, trop brutal, argumente-t-il. La juge suspend la décision de l’AViQ en attendant un jugement sur le fond.

J-90

Élodie n’a pas dormi. Enfin si, une heure. Peut-être deux. Pas d’affilée. Charline s’est réveillée à 3h, malgré les cinq cachets qu’elle prend pour s’endormir, en hurlant. Nolan tapait contre le mur à 4h. Isaline a mouillé le lit. Encore.

Élodie parle peu, ce matin. Elle pense à la tenue des enfants, prie pour qu’ils acceptent de les enfiler. Les brioches, pour le trajet. Indispensables. Sinon c’est les coups, les morsures. La bagarre avec sa fille, plus grande, plus forte qu’elle. Elle pense au tribunal. Aujourd’hui, le Corto, celui qui accueille deux de ses trois enfants autistes, est devant le juge. Une histoire de subsides, de problème de gouvernance.

Elle baisse les yeux vers ses baskets. Deux pointes de lacet traînent dans une flaque de lait, tombé plus tôt, quelque part entre le petit-dej et une crise. Dans le salon, tout est en plastique. Par sécurité. Rien qui casse. Plus de télé. Charline l’a lancée contre le mur il y a quelques mois. Les canapés viennent d’être livrés. Des modèles d’occasion rachetés via une annonce. Ça ne résiste jamais bien longtemps aux assauts de la grande qui s’y laisse tomber. Trois mois, au mieux. Les structures finissent par céder, les mousses éventrées. Depuis peu, les fauteuils ont été remplacés par des palettes en bois. Moins beau, mais plus solide.

Sur le mur, un lambeau de papier peint se soulève. On voit la trace des anciens motifs, et les bouts déchirés autour. C’était joli, au début. Puis Charline a gratté. Nolan a suivi. Isaline a crié. Quatre fois, ils ont tout refait. À la cinquième, ils ont arrêté. Depuis, le mur reste comme ça, à nu par en- droits. Ça tient, c’est tout ce qui compte.

Ce qui rend tout ça encore plus difficile, c’est ce qu’on ne voit pas. La solitude. Le dehors qui se ferme. Élodie ne dit pas « Nous sommes isolés ». Elle dit : « Je ne peux pas emmener Charline chez des amis qui ont des enfants. Ni au parc. Ni au magasin. Parce que ça finit mal. » Elle détaille comme si elle énonçait une recette : « Déjà, je verrais le regard des gens. Les parents. Ceux qui ne savent pas. Qui pensent que c’est mal élevé. Que je laisse faire. Qui ne comprennent pas que c’est un handicap, pas un caprice. En plus, je dois la surveiller tout le temps. Je ne peux pas détourner les yeux. Et si je sors avec elle, je dois emmener Nolan et Isaline aussi. Et puis il y a le risque. Charline ne crie pas pour dire qu’elle a peur. Elle frappe. Elle mord. Elle pousse. Elle ne prévient pas. Et s’il arrive quelque chose, c’est ma faute. C’est ma responsabilité. Alors je n’y vais plus. » Comme elle, beaucoup de mères d’enfants autistes s’effacent du monde social. Les invitations se raréfient. Les anniversaires se font sans elles.

Le tribunal l’attend. Là-bas, d’autres parleront. Ils liront des dossiers, rappelleront que l’ASBL Corto accueille aujourd’hui 18 gamins. Qu’il est reconnu comme Centre de Revalidation Fonctionnelle (CRF), et qu’il est subsidié par l’Agence pour une Vie de Qualité (AViQ) via une convention qui encadre notamment le suivi thérapeutique, la présence de personnel qualifié, la qualité des soins…

Les CRF sont des institutions dont l’objectif est « d’accompagner chaque patient, au cas par cas, dans la construction d’une solution personnelle à ce qui fait lui problème, solution exportable en dehors de l’institution, qui lui permette de restaurer ou maintenir un lien social apaisé et de prendre ou reprendre une place dans la société tout en préservant sa santé »

Un CRF doit respecter une série de conditions. Lorsqu’ils s’adressent à un public porteur de troubles du spectre de l’autisme (TSA), les CRF proposent une approche pluridisciplinaire, individualisée et intensive, centrée sur la rééducation fonctionnelle et l’amélioration de l’autonomie au quotidien.

Concrètement, un CRF pour enfants autistes rassemble sous un même toit des professionnels issus de différents horizons : pédiatres, neuropsychologues, logopèdes, ergothérapeutes, éducateurs spécialisés, assistants sociaux, etc. Ensemble, ils établissent un bilan fonctionnel complet, destiné à cerner les besoins, les compétences et les difficultés spécifiques de chaque enfant. Sur cette base, un programme d’accompagnement personnalisé est mis en place et la progression de l’enfant est évaluée.

Aujourd’hui, on juge la fin de cette convention.

Un audit révèle que le cadre médical n’était rempli qu’à 15 %. Sur quarante heures de prestations attendues, seules six étaient assurées. Le cadre thérapeutique n’était pas non plus rempli comme il le devait. Pour ces missions, entre autres, le Corto percevait 289 euros par enfant et par jour. « Lors de plusieurs inspections et sur base de témoignages d’anciens membres du personnel, de plaintes formulées par un ancien pédopsychiatre du centre… il est apparu que ce qui s’y faisait relevait davantage de la garderie que de la revalidation fonctionnelle. Et 289 euros par enfant, par jour, pour ça, c’est inacceptable, tranche Lara Kotlar, porte-parole de l’AViQ, Dans ces institutions, il doit y avoir un pédopsychiatre référent. Il n’y en avait même plus. »

Sur ce dernier point, Pierre Hannard, le directeur du Corto, plaide la « pénurie totale » de pédopsychiatres. Cinzia Agoni, présidente d’Inforautisme et porte-parole du GAMP, dénonce quant à elle des pratiques thérapeutiques « d’un autre temps, marquées par la psychanalyse et en décalage avec les recommandations nationales et internationales », au Corto. « Je ne peux plus cautionner cela, mais je suis prête à soutenir les parents auprès de l’AViQ s’ils acceptent de chercher une autre solution que le Corto. »

L’AViQ, après avoir annoncé la rupture, avait proposé une alternative : Oxalis, un nouveau centre, intégré au Grand Hôpital de Charleroi. Une partie des familles et du personnel avait accepté d’y être transférée. D’autres, dont Élodie, avaient refusé. Ils sont restés, défendent le Corto corps et âme, parlent de « nous » en évoquant le centre, malgré les critiques, malgré les doutes. Ils disent avoir vu des évolutions chez leurs enfants. « Au Corto, on respecte vraiment le rythme de nos enfants. Ailleurs, dans les autres centres de revalidation, on les évalue tout le temps, ils doivent suivre toutes les thérapies prévues, peu importe leur état émotionnel ou leur fatigue… Ils sont forcés d’entrer dans un moule », confie une mère d’un enfant accueilli au Corto.

Puis il tranchera. Le 25 mars 2025, le Tribunal du Travail estime que le recours du Corto est infondé sur tous les points. Il déboute l’ASBL de toutes ses demandes, et souligne qu’il est regrettable qu’aucune mesure n’ait été prise pour assurer une transition pérenne aux enfants.

Plus de subsides, plus de titre. Le Corto annonce l’arrêt des soins. Dix membres du personnel indépendant sont licenciés. L’accueil, lui, se poursuivra sur la trésorerie du centre. Pendant trois mois. 90 jours. Élodie, qui avait mis tous ses espoirs dans ce combat, qui pensait que le Corto allait gagner, qui avait refusé Oxalis, pense à l’après. Aux brioches, aux crises. Aux enfants, surtout. Toujours les enfants.

J-ZÉRO

Le centre est fermé. Elle n’a pas peur. Elle le disait en posant une assiette en plastique sur la table. « Je n’ai pas peur de m’occuper de mes enfants. Je ne suis juste pas compétente pour le faire. » Elle pensera peut-être au confinement d’il y a quelques années. Quand Nolan, enfermé trop longtemps, tournait en rond sans s’arrêter. Quand il hurlait, se cognait aux murs. Quand elle l’avait retrouvé, un matin, sur le rebord de la fenêtre. Puis un autre jour, chez le voisin d’en face. Quand les voisins ont déménagé, fatigués des cris, des meubles renversés, des objets lancés par-dessus les haies. Elle, ne peut pas partir. Elle se souviendra peut-être de ce moment précis. Celui où elle n’a plus tenu. Et où, pour la première fois, elle l’a médicamenté. Juste un peu. Pour qu’il s’assoie.

Élodie se souviendra, sûrement, de ce courrier du Palais Royal. Celui qu’elle avait reçu quand elle croyait encore que le combat pour le Corto pouvait aboutir. Elle pouvait, si elle le souhaitait, faire appel à un avocat. Le papier peint aura cédé. Charline l’aura gratté, Nolan l’aura suivi, Isaline aura crié.

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Le Roi : symbole ou acteur clé de l’influence nationale ? 

Mammouth - mer, 21/05/2025 - 18:02

Photo via WordPress

Le 5 avril dernier, la princesse Claire enfilait des gants de boxe dans une salle de sport bruxelloise. La scène est inhabituelle et révélatrice de l’évolution de la monarchie belge qui, depuis plusieurs années, multiplie les apparitions sur le terrain, mêlant soutiens symboliques, engagements sociaux et représentations protocolaires. Ces activités traduisent une volonté de maintenir un lien avec la population et d’affirmer une influence qui dépasse les fonctions purement cérémonielles. Nous avons analysé l’ensemble de ses activités officielles pour mieux comprendre son rôle, parfois discret.

Gants de boxe enfilés et tenue de sport sur le dos, la princesse Claire s’est initiée aux sports de combat et au basket le 5 avril dernier. Une discipline qu’elle appréhendait selon Soirmag, mais qu’elle a pu découvrir dans le cadre d’une visite à l’association bruxelloise Sport2Be, qui utilise le sport comme levier d’inclusion sociale et professionnelle pour les jeunes issus de milieux défavorisés. 

Pas de traitement de faveur, ni de protocole particulier pour la Princesse, d’après Arthur Parmentier, chargé de marketing et de communication au sein de l’association. La sécurité a encadré le déplacement, mais une fois sur place, la Princesse a pris part aux activités sportives dans des conditions similaires aux autres participants. Pour l’association, soutenue par la Fondation Reine Paola, cette visite royale a constitué une opportunité de valoriser son action et de sensibiliser davantage le public à sa cause.

Ce rapport royal au public a mis du temps à se construire. Le mouvement s’est amorcé avec le roi Albert Ier en 1909, qui a gagné en popularité dès son mariage avec la reine Élisabeth, à une époque où les reines étaient encore tenues à l’écart de la scène publique. « Avant lui, on ne voyait quasiment jamais la famille royale en dehors des portraits officiels« , explique l’historien retraité de l‘Université de Liège et spécialiste en affaires royales, Francis Balace. Les premiers clichés du couple royal se vendaient alors comme des petits pains. « Peu à peu, l’image de la monarchie s’est transformée en véritable marque. Vous aviez leurs têtes sur les packagings de chocolats, sur les canevas de couture, et même sur des boîtes de cornichons. La famille royale apparaissait sur toute sorte de produits. » Une manière habile de créer du lien et de nourrir l’attachement populaire.

Depuis, le rôle de la famille royale a évolué. Ce changement se remarque notamment à travers le nombre d’évènements officiels qui semble être en constante évolution. En 2024, 291 sorties et activités royales ont été dénombrées.

Une forte influence sur la diplomatie économique

Le roi Philipe, avec un agenda ponctué de visites, d’audiences et de réceptions, s’impose sans surprise comme le membre le plus actif de la famille royale. La reine Mathilde suit le souverain de près, fidèle à ses engagements sociaux et éducatifs. Ensemble, ils forment un binôme solide, mais c’est chacun de leur côté qu’ils cumulent le plus d’activités. Le couple royal ferme ainsi la marche du podium.

Aujourd’hui, la monarchie belge conserve une certaine influence, notamment à l’international. « Le Roi et sa famille ont un rôle à jouer sur notre politique extérieure, en particulier sur la diplomatie économique« , précise Raoul Delcorde, ancien ambassadeur belge en Suède, Pologne et au Canada. « Contrairement à la monarchie britannique ou aux royautés scandinaves, la dynastie belge facilite les rencontres, tisse des liens dans les milieux d’affaires, et insuffle un certain soft power qui renforce l’attractivité du pays et apporte une touche de glamour aux partenaires étrangers.« 

Philippe, Roi de Bruxelles ou Roi des Belges ?

Le Roi et la Reine ne participent pas aux négociations en elles-mêmes, mais leur simple présence apporte souvent une forme de crédibilité sur la scène internationale comme nationale. Dans un paysage politique belge, parfois instable, marqué par de célèbres crises et impasses, leur présence rassure. Souvent sans quitter le pays, voire leurs fiefs. Sur les 291 sorties officielles de la famille royale en 2024, seules 18 visites ont été effectuées à l’étranger et les déplacements hors du Palais ou de la résidence principale se font rares.

Le Palais Royal (112) et le Château de Laeken (25), concentrent à eux seuls une part significative des activités. Ce nombre élevé se justifie par la place centrale qu’occupent ces lieux dans le rôle de la monarchie. C’est au Palais que se tiennent les audiences, certaines réceptions et une grande partie des cérémonies protocolaires. Le Château de Laeken sert de résidence privée pour la famille royale, mais il sert aussi de lieu pour accueillir certaines réunions de travail et surtout des réceptions, dans un cadre plus confidentiel ou familial.

Avec 207 audiences, réceptions et visites officielles sur 291, Bruxelles domine largement les lieux d’accueil des événements royaux. Un chiffre qui peut sembler disproportionné par rapport aux autres communes et villes, mais qui s’explique par le fait que la capitale accueille non seulement le Palais et le domicile royal, mais qu’elle est également le siège de nombreuses institutions européennes et belges, ainsi que de nombreuses administrations centrales. 

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La politique belge ressort comme l’activité principale de l’agenda de la famille royale en 2024. Dans le contexte d’une année électorale, les nombreuses audiences dédiées aux négociations en vue de former les gouvernements ont particulièrement mobilisé le roi Philippe. Les activités à caractère social arrivent en deuxième position, soutenues par la reine Mathilde pour qui ce domaine reste prioritaire, principalement à travers ses visites de terrain et son soutien aux causes sociétales.

Aujourd’hui encore, la fonction royale reste fidèle à l’esprit de la Constitution de 1831, qui pose une règle fondamentale : le Roi ne peut poser aucun acte sans le contreseing d’un ministre (deuxième signature destinée à authentifier la signature principale). Il demeure officiellement chef de l’État « mais son pouvoir reste avant tout symbolique et représentatif« , rappelle Raoul Delcorde. Il incarne l’unité du pays, nomme les ministres, signe les lois, mais toujours sous l’œil attentif d’un membre du gouvernement. Il n’est pas Roi de Belgique, mais bien Roi des Belges, une subtilité sémantique qui révèle toute la portée de son rôle. 

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Comment les étudiants se débrouillent face à la précarité

Mammouth - mer, 14/05/2025 - 09:32
Jobs, internat, aides et débrouille… les trucs et astuces des étudiants pour boucler les fins de mois difficiles

Photo: Pexels

De plus en plus d’étudiants se trouvent en situation de précarité financière. Selon les estimations, entre 70 et 80.000 étudiants (soit plus de 35% de la population étudiante) auraient du mal à boucler les fins de mois. Face aux difficultés, la débrouille règne. Au quotidien, ils et elles cherchent des manières de subvenir à leur besoins tout en poursuivant leurs études. Nous avons suivi Noé, Pivi, Manon et Lola dans leur débrouille.

Les reportages ont été réalisés à l’IHECS dans le cadre d’un atelier vidéo sous la conduite d’Eric Willem.

Noé, étudiant en journalisme à l’IHECS, n’a pas choisi de se loger comme tout le monde. Il y a 4 ans, il a comparé toutes les options de logement à Bruxelles avec ses parents et l’internat est sorti du lot. Une chambre partagée, des repas compris, une salle de sport, tout y est pour mener à bien ses études à un prix raisonnable. Face à la hausse des loyers, l’internat permet à des jeunes comme lui de se loger à un prix plus abordable.

Pivi est obligé de travailler pour financer ses études. Pour lui, il était nécessaire de relever le plafond de 450 heures par an de travail autorisé pour le travail étudiant, même si cette hausse risque de se faire au détriment du temps d’étude.

Manon a la chance de ne pas devoir travailler, mais le budget alloué par ses parents ne lui permet néanmoins pas de faire des folies. Pour réduire ses coûts, elle utilise l’application Happy Hours Market, qui commercialise des invendus alimentaires. L’un des 18 points de retraits bruxellois se situe juste à côté de chez elle.

Face à l’augmentation du coût de la vie et à des aides souvent insuffisantes, de plus en plus d’étudiants basculent dans la précarité. Logement, alimentation, santé mentale : leur quotidien est marqué par des choix et des sacrifices. Lola doit même fréquemment manquer des cours.

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Vendée Globe: les coulisses de la préparation de Denis Van Weynbergh

Mammouth - lun, 12/05/2025 - 16:30

À 55 ans, le skipper belge Denis Van Weynbergh a bouclé le Vendée Globe, l’une des courses à la voile les plus exigeantes au monde. Un exploit rendu possible grâce à une préparation intense, forgée par des années de travail, de doutes et de passion.

Denis Van Weynbergh est entré dans l’histoire en devenant le premier skipper belge à boucler le Vendée Globe, la plus grande course à la voile autour du monde, en solitaire, sans escale et sans assistance. Après avoir passé 117 jours en mer, il a franchi la ligne d’arrivée le 8 mars 2025 aux Sables-d’Olonne mais n’a malheureusement pas pu être classé, la ligne d’arrivée ayant fermée le 7 mars à 8h. Il s’agit néanmoins d’un exploit, qu’il n’aurait pas pu accomplir sans une préparation rigoureuse, aussi bien sur le plan financier que physique et mental. 

Se forger un physique à la hauteur du défi

« Le Vendée globe c’est très dur. Parfois quand je manœuvrais, je dégueulais parce que j’étais épuisé ». Pour Traverser les océans en manœuvrant des voiles pouvant peser jusqu’à 85 kilos n’a rien de simple, et Denis Van Weynbergh a dû se préparer physiquement avant le départ du Vendée Globe. 

Lors d’une interview, il nous explique que cette préparation physique s’est construite sur le long terme. Ce programme exigeant a débuté quatre ans avant le départ, avec deux transatlantiques par an, c’est-à-dire deux traversées de l’océan Atlantique à la voile, représentant entre 80 et 90 jours passés sur l’eau chaque année. 

En plus de ses entrainements en mer, Denis Van Weynbergh a entretenu sa condition physique en pratiquant certains sports comme le vélo et la natation. Il s’est aussi rendu à la salle de sport plusieurs fois par semaine, accompagné d’un kinésithérapeute et d’un coach sportif. 

Préparer son esprit à la solitude et aux doutes 

Avant de se lancer dans la traversée du Vendée globe, Denis Van Weynbergh a aussi dû apprendre à gérer la solitude et les moments de doutes. Pour s’y préparer, il a travaillé avec un coach mental en amont du départ. Trois mois avant la course, ils se retrouvaient par visioconférence ou par appel tous les 15 jours pour se préparer à affronter cette traversée éprouvante. 

« Sur le Vendée Globe, c’est plus facile d’avoir des pensées négatives que positives ». Pour chasser les premières durant la traversée, Denis Van Weynbergh consignait chaque jour dans un cahier tous les moments positifs vécus au cours de la journée. 

Une course aux sponsors avant celle autour du monde

« Quand tu n’as pas de sponsors, tu n’as pas de salaire et donc tu ne peux pas faire de course ». En 2020, Denis Van Weynbergh avait dû renoncer au départ du Vendée Globe faute de budget suffisant. C’est alors qu’il s’est lancé à la recherche de sponsors où il a dû vendre son projet au point de presque en devenir un représentant commercial. « Ton premier boulot comme skipper c’est représentant commercial. C’est être directeur commercial et vendeur et ça me prenait 80% du temps ». 

Dans sa préparation pour le Vendée Globe, Denis et son entourage avaient défini plusieurs étapes cruciales. La première était celle d’oser se lancer dans l’aventure. La deuxième, trouver un partenaire majeur. La troisième était de se qualifier et d’être au départ au Vendée Globe. Et la dernière, franchir la ligne d’arrivée et terminer la course. Mission accomplie, malgré les difficultés rencontrées pour trouver un partenaire majeur, qui s’est finalement concrétisé avec le soutien de D’Ieteren Group, un sponsor 100% belge.

En plus du soutien financier de ses différents sponsors, Denis Van Weynbergh a lancé une campagne de crowdfunding, loué son bateau pour des téléfilms et organisé des sorties en mer avec des particuliers pour financer son projet. Il a même dû dormir sur son bateau l’année précédant le départ, faute de moyens pour se loger dans un hôtel. 

Lorsqu’on demande à Denis Van Weynbergh quel a été le domaine de préparation le plus difficile, il répond sans hésitation, que c’est l’aspect financier qui a été le plus compliqué.

Éviter le mal de mer : l’importance d’une alimentation adaptée

Avant chaque départ en mer, il est essentiel de suivre une alimentation adaptée. Denis Van Weynbergh s’est rendu compte, par exemple, qu’éviter certains aliments comme le pain et les boissons sucrées, une semaine avant une sortie en mer, lui permettait de ne pas tomber malade sur le bateau. Cette stratégie alimentaire lui a permis de moins souffrir du mal de mer, un phénomène pourtant rare chez les skippers. 

Le soutien familial, un pilier dans cette aventure  

Le soutien familial s’est révélé être l’un des éléments les plus importants. Pouvoir compter sur ses proches permet de surmonter les doutes et de pouvoir gérer les moments de stress grâce à leurs encouragements. Papa de deux garçons, Denis Van Weynbergh a pu compter sur eux pour l’accompagner dans sa préparation et dans sa traversée.  Il raconte que la séparation avec sa famille s’est faite naturellement, avant le départ du Vendée Globe. Déjà installé aux Sables d’Olonne pour les préparatifs, Denis ne voyait déjà plus beaucoup sa famille. Ses enfants étant déjà grands, la séparation s’est faite plus facilement, et Denis a pu compter sur leurs encouragements et leurs soutiens pour accomplir son rêve : terminer le Vendée Globe.

Cette préparation intense ne résume pas à une simple effort sportif. Derrière la dimension physique se cache un autre enjeu de taille, le financement. En Belgique, un pays dominé par le football, le cyclisme ou le hockey et où la voile ne fait partie intégrante de la culture comme en France, la recherche constante de sponsors et les nombreuses difficultés économiques est un vrai défi. Denis Van Weynbergh a dû se battre avec acharnement pour pouvoir le relever. C’est là aussi, sur terre, que se situe sa réussite. 

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Pro League : zone de transit du football européen

Mammouth - lun, 12/05/2025 - 15:25
La Belgique, pépinière de talents au service des grands championnats.

Crédit photo: Hugo Barthélemy

Alors qu’historiquement les clubs belges recrutaient pour améliorer leurs effectifs, ils misent depuis une dizaine d’années sur la revente de talents pour engendrer des bénéfices. Une tendance qui se confirme avec près de 300 départs vers les cinq grands championnats européens depuis la saison 2000/2001. Mammouth a analysé le marché des transferts de ces 25 dernières années.

Après sa défaite en coupe de Belgique et étant déjà mathématiquement hors course pour le titre en championnat, une nouvelle saison blanche s’annonce pour le club d’Anderlecht. Néanmoins, les futurs mercatos pourraient redonner le sourire aux dirigeants mauve et blanc. A défaut de performer sur le plan sportif, ils pourraient engranger des résultats financiers.

Le club le plus titré du championnat belge compte parmi les plus gros vendeurs de talents de Belgique. Depuis l’an 2000, 46 joueurs ont quitté le Sporting d’Anderlecht pour rejoindre la Ligue 1 (France), la Liga (Espagne), La Serie A (Italie), la Premier League (Angleterre) ou la Bundesliga (Allemagne). Cette tendance se retrouve dans toutes les grandes écuries belges. Elle leur permet aujourd’hui de suivre les exigences financières infernales imposées par les géants du football européen, pour pouvoir rivaliser dans les différentes compétitions européennes.

La Ligue 1 en tête de proue

Le championnat belge devient de plus en plus attractif : actuellement huitième au classement UEFA, la Belgique a doublé son coefficient UEFA par saison par rapport à 2022. Cette hausse du niveau de jeu en Pro League s’observe sur les terrains mais elle se voit également dans les transferts : sur les 299 transferts opérés vers les cinq grands championnats au 21e siècle, 100 ont été effectués ces cinq dernières années.

La Ligue 1 demeure le championnat qui s’intéresse le plus aux joueurs de Pro League. Lille, le Stade de Reims et le FC Nantes ont particulièrement les yeux rivés sur les pelouses belges. Ce trio est suivi de près par cinq autres clubs français qui comptent cinq joueurs ou plus issus du championnat belge sur les 25 dernières années. Les proximités géographique et linguistique facilitent les rapports entre les joueurs et clubs des deux pays, au même titre que leur place sur l’échiquier européen du football. La Ligue 1, elle-même considérée comme tremplin vers les plus grands clubs européens, fait souvent office d’intermédiaire entre la Belgique et les quatre autres compétitions majeures du Vieux Continent.

La raffinerie du football européen

La première division belge constitue une voie d’accès idéale vers les championnats plus prestigieux, notamment en raison de la qualité de la formation au plat pays. “La Pro League est un championnat d’un bon niveau qui reste accessible aux jeunes talents et aux profils non-aguerris, notamment grâce au savoir-faire des centres de formations belges”, commente Raffaele Poli, directeur et responsable football du Centre International d’Étude du Sport (CIES). L’explosion des ventes à l’international s’explique surtout par un changement du modèle économique des clubs belges qui ont opté pour un modèle de « plus-value« . Avant les années 2010, lorsqu’un club belge achetait un joueur, il pensait surtout à son rendement en championnat et non à son potentiel de revente. Bruges illustre précisément ce changement de mentalité : le club flandrien a triplé son nombre de ventes vers les cinq grands championnats en dix ans.

Les nouvelles technologies qui façonnent le recrutement moderne contribuent à la mise en lumière des joueurs du championnat belge mais aussi à l’émergence de championnats plus confidentiels. “Avant, un agent de joueurs envoyait des compilations d’actions de matchs de ses joueurs aux grands clubs. Aujourd’hui, avec des plateformes comme Transfermarkt ou Wyscout, toutes les statistiques et vidéos sont disponibles en ligne. Les clubs des cinq grands championnats peuvent plus facilement recruter dans des championnats moins connus”, explique Bart Tamsyn, responsable de la zone Belgique et Pays-Bas pour le site Transfermarkt.

Les clubs belges investissent désormais dans des infrastructures et du personnel afin de capitaliser rapidement sur la (re)vente de talents. Une source au sein d’un grand club belge, qui a préféré conservé l’anonymat, confirme cette stratégie qui consiste à acheter de jeunes joueurs à faibles prix dans l’espoir d’une plus-value économique future.

Baser son modèle économique sur la réalisation de plus-value relève d’une stratégie à double tranchant.

Raffaelle Poli, directeur et responsable football du CIES

Même si les performances sont bonnes, “baser son modèle économique sur la réalisation de plus-value relève d’une stratégie à double tranchant, prévient Raffaele Poli . Les ventes systématiques de joueurs entraînent des changements d’effectifs réguliers, ce qui complexifie la création d’une stabilité”.

Malgré les risques encourus, les écuries belges semblent privilégier cette stratégie pour briller sur la scène européenne, qui est rythmée par des dépenses d’argent toujours plus importantes au fil des saisons. Pour l’instant, les calculs s’avèrent payants : la compétitivité de la Pro League s’améliore au même titre que les finances des clubs. Reste à voir si ce modèle résistera à l’épreuve du temps.

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Le gouvernement bruxellois respecte-t-il son obligation de parité ?

Mammouth - ven, 02/05/2025 - 08:27
Mammouth a passé à la loupe les mandats des exécutifs bruxellois des vingt dernières années

Crédit photo : Mammouth Média

L’article 11bis de la Constitution belge impose depuis 2002 à ses pouvoirs exécutifs d’inclure des personnes de sexe opposé. “Un gouvernement sans femme devient un gouvernement illégal”, tranche Caroline Sägesser, politologue au Centre de recherche et d’information socio-politiques (CRISP). Mammouth a décortiqué cette obligation et a analysé vingt années de mandats de la Région de Bruxelles-Capitale.

En juillet 2024, les négociations pour le nouvel exécutif wallon et de la Fédération Wallonie-Bruxelles semblaient présager un gouvernement majoritairement féminin avec Valérie Glatigny et Jacqueline Galant pour le MR, Elisabeth Degryse et Valérie Lescrenier pour Les Engagés. Mais ce casting ne respectait pas l’article 11bis de la Constitution belge, qui impose une représentation minimale d’un tiers pour le sexe le moins représenté. Par conséquent, la composition proposée par le MR et Les Engagés, entièrement féminine, est tombée à l’eau. Elle aurait néanmoins constitué un véritable renversement de la dynamique genrée des mandats au sein de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

Bruxelles : une parité en apparence ?

Les gouvernements bruxellois n’ont pas toujours compté de femmes dans leurs rangs. Au cours des vingt dernières années, seuls 16 postes (22 %) ont été occupés par des femmes, pour 56 pour des hommes. « C’est en 2002 que la Constitution belge oblige tous les gouvernements à être mixtes », rappelle Caroline Sägesser. En 2003, une loi fédérale vient renforcer cette exigence à Bruxelles, imposant la présence de personnes de « sexe différent » dans l’exécutif de la capitale. 

Avant ces dispositions légales, seule une femme, Annemie Neyts-Uyttebroeck, a siégé à la région bruxelloise de 1999 à 2003 lors du gouvernement emmené par le libéral Jacques Simonet (Simonet I). Après cette législature, Bruxelles a même connu trois coalitions composées intégralement d’hommes, en l’espace de deux ans. 

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Alors que de nombreux démêlés fiscaux et judiciaires ont ensuite écourté les mandats de plusieurs législatures, la présence de femmes à la région a augmenté dans les cabinets dès l’exécutif Picqué III (2004- 2009). Si le nombre de femmes au régional bruxellois a progressé au lendemain de l’instauration des nouvelles dispositions constitutionnelles qui ont imposé la mixité dans les organes représentatifs, derrière cette apparente évolution, les postes clés sont largement restés masculins.

Des responsabilités inégalement réparties

Selon la loi spéciale de janvier 1989 qui a créé la Région bruxelloise, il faut quatre ministres (deux francophones, deux néerlandophones) hors ministre-président et trois secrétaires d’Etat (un néerlandophone minimum) pour former l’exécutif. Et depuis 1999, les postes ministériels – plus prestigieux – semblent être une affaire d’hommes. Cinq hommes ministres dans les gouvernements Donnea, Ducarme et Simonet II. Quatre dans les exécutifs Simonet I, Picqué III, Vervoort II et Vervoort III.

Pour la législature Vervoort II, toutes les femmes étaient même cantonnées au poste de secrétaire d’État, un mandat moins bien payé et placé sous l’autorité d’un ministre. “En 1999, j’ai failli rentrer dans le gouvernement mais on m’a proposé un secrétariat d’Etat et ça m’a semblé vraiment dérisoire avec les chiffres qu’Ecolo avait fait”, se souvient Evelyne Huytebroeck, ex-ministre de l’Environnement et de l’Energie de 2004 à 2014. 

En vingt ans, un seul gouvernement a affiché une majorité féminine ministérielle : le gouvernement Picqué IV (2009-2014), avec trois femmes ministres pour deux hommes. Toutefois, jamais une femme n’a accédé à la fonction de Ministre-Présidente, tous gouvernements bruxellois confondus.

Un pouvoir concentré dans peu de mains

Au-delà d’une inégale répartition des postes depuis vingt ans, l’accumulation de mandats semble être réservée majoritairement à la gent masculine. Sur les 55 postes ministériels observés, 46 ont été occupés par seulement 14 hommes. Proportionnellement, 84% des hommes ont cumulé des mandats, contre 44% des femmes. Comprenez qu’à Bruxelles, un homme a deux fois plus de chance d’être reconduit qu’une femme. Guy Vanhengel, champion en matière d’accumulation de mandats, a siégé à six reprises. À titre de comparaison, Évelyne Huytebroeck, la femme avec la plus longue carrière politique au régional, compte trois mandats.

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Les têtes de listes l’emportent

Les candidats favoris des partis apparaissent souvent en tête de liste aux élections régionales. “À Bruxelles, une seule circonscription existe, donc forcément la tête de liste devient celle qui est appelée à devenir ministre”, affirme Caroline Sägesser.

Si les têtes de listes des partis de la coalition gouvernementale ne deviennent pas parlementaires, elles deviennent souvent ministres ou secrétaires d’Etat. En moyenne, les femmes à la capitale figurent deuxième sur la liste électorale pour le Parlement à la même période, tandis que les hommes sont souvent premiers.

Les femmes de plus en plus jeunes

Une autre tendance s’observe au fil des législatures : un rajeunissement des femmes qui les composent. L’âge moyen des ministres et secrétaires d’Etat féminines a en effet chuté de 55 à 36 ans. « Elles deviennent plus ambitieuses et on leur fait plus confiance qu’avant », souligne Caroline Sägesser. « J’avais 30 ans quand j’ai commencé ma carrière politique. Je n’aurais jamais fait tout ce que j’ai fait si je n’étais pas bien entourée. Mon mari était là. J’avais une structure familiale forte », partage Evelyne Huytebroeck.

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Malgré des lois prometteuses, la réalité reste contrastée pour la région. La représentation féminine progresse sur le papier, mais les femmes assument moins de mandats et ne tiennent pas autant de postes ministériels que les hommes. Les lois de « parité » n’imposent que la présence de personnes de « sexe différent », ne garantissant finalement qu’une mixité. 

Neuf mois après les élections régionales, Bruxelles se trouve toujours dans l’attente d’un nouveau gouvernement. Les dernières négociations ont montré que la priorité des formateurs consistera à justifier un exécutif sans la NV-A ou de convaincre le PS de négocier avec cette dernière. Rien à l’horizon sur le sexe des ministres et des secrétaires d’État. Les préoccupations, à tort ou à raison, semblent se trouver ailleurs.  

Et la prochaine ministre sera …


A l’heure où les négociations bruxelloises emmenées par le Mouvement réformateur (MR) patinent, toute prédiction est à considérer avec précaution. « J’ose espérer que la composition du gouvernement fédéral ne soit pas un mauvais présage pour Bruxelles », lance Évelyne Huytebroeck.

Cependant, les éléments recueillis lors de l’analyse de ces neuf gouvernements permettent de dresser le profil type d’une femme « ministrable » pour le gouvernement de 2025.

Âge : 35-40 ans

Couleur politique : Centre ou gauche

Place sur la liste : Deuxième de liste aux élections législatives

Nombre de mandats au gouvernement bruxellois : Aucun

Portefeuilles pressentis : Mobilité, logement, transition économique ou développement urbain

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L’internat, une alternative pour les jeunes

Mammouth - mar, 29/04/2025 - 08:33
Face à la hausse des loyers, l’internat permet à des jeunes de se loger à un prix abordable

Noé, étudiant en journalisme à l’IHECS, n’a pas choisi de se loger comme tout le monde. Il y a 4 ans, il a comparé toutes les options de logement à Bruxelles avec ses parents et l’internat est sorti du lot. Une chambre partagée, des repas compris, une salle de sport, tout y est pour mener à bien ses études à un prix raisonnable.

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Avenir incertain pour LaVallée

Mammouth - lun, 28/04/2025 - 09:56
Le centre artistique bruxellois menacé de fermeture, restera finalement ouvert

Après plusieurs mois d’incertitude, un accord a été trouvé pour maintenir ses activités. Le site, qui accueille plus de 150 artistes, devra cependant s’adapter pour assurer sa pérennité.

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Petites maternités en danger

Mammouth - sam, 26/04/2025 - 10:00
La fin d’un service de proximité à Verviers ?

Photo : Charlotte Simon

Depuis plusieurs années, des bruits de couloir agitent la maternité du CHC Heusy à Verviers. Une fusion avec le CHR voisin est-elle envisagée ? Ou une fermeture pure et simple de la maternité est-elle à prévoir ? Si oui, à quel prix ?

Dans ce documentaire, les sage-femmes et la direction des soins infirmiers du CHC d’Heusy et la responsable communication du CHR de Verviers racontent les coulisses d’un quotidien hospitalier incertain. Proximité géographique, logique de réseaux hospitaliers, contraintes budgétaires… Et surtout : les conséquences de ces réorganisations sur le personnel soignant. 

« Une maternité n’est pas un service obligatoire »

Leurs voix résonnent tout particulièrement au moment où 2 maternités viennent de fermer : celle de Chimay, fermée le 10 juin 2024 et celle d’Auvelais dans la province de Namur, annoncée le 9 avril 2025. La direction de cet hôpital avait pourtant démenti cette fermeture le 14 mars. Les activités gynécologiques y seront maintenues, mais l’accouchement ne sera plus possible sur place. 

Dans un contexte où la rationalisation des soins de santé devient la norme, le personnel du CHC d’Heusy rappelle que derrière chaque décision politiques, il y a des soignantes. Celles et ceux qui vivent cette incertitude au quotidien posent une question essentielle : les maternités de proximité sont-elles encore considérées comme essentielles ?

La liste des maternités en danger est disponible via ce lien : https://www.lespecialiste.be/fr/actualites/socio-professionnel/fermeture-de-maternites-la-liste-des-hopitaux-que-les-calculs-de-la-kce-designent.html

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Étudiant : quel vélo choisir ?

Mammouth - sam, 26/04/2025 - 09:58
Entre petits trajets, ballades et pratique sportive, comment bien choisir son vélo quand on est étudiant ?

Que ce soit pour aller en cours, pour faire du sport ou encore se balader en foret, le vélo s’impose comme un allié précieux de nombreux étudiants. Mais encore faut-il choisir le bon modèle. Nous avons donc décidé de mener l’enquête pour vous !

Grâce aux conseils d’experts, nous avons pu identifier quels vélos étaient les plus adaptés aux différents besoins des étudiants. Et pour mieux se projeter, nous avons créé trois profils types de students qui représentent ces différents besoins.

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Wavre, nouvelle capitale belge du hockey

Mammouth - mer, 23/04/2025 - 10:02

Photo: Noé Mattagne

La ville wallonne, qui accueillera la Coupe du Monde de hockey en août 2026, se prend de passion pour cette discipline sportive longtemps délaissée du grand public. La rénovation du stade de foot en stade de hockey est en cours, pour le plus grand bonheur des nouveaux fans.

Le soleil printanier caresse les terrains synthétiques du Lara Hockey Club à Wavre en cette belle après-midi du mercredi 19 mars. Les vestes sont tombées, les manches sont remontées, et l’odeur du printemps flotte dans l’air. Sur la terrasse de la buvette du club, les parents sirotent un café ou une boisson fraîche, échangeant des discussions animées. Sur le terrain, l’excitation est palpable : c’est jour d’entraînement, et au Lara, le mercredi, tous les jeunes sont sur les chapeaux de roues.

Un peu plus loin, un adolescent qui a commencé le hockey cette année s’entraîne avec détermination. Il s’applique à chaque passe, chaque dribble, les yeux rivés sur la balle. « J’avais des amis qui jouaient déjà ici, et avec la Coupe du Monde qui arrive à Wavre, je me suis dit que c’était le bon moment pour essayer« , confie-t-il après l’entraînement.

Une ville sous les projecteurs

En août 2026, la ville accueillera en effet une partie des matchs de la Coupe du Monde de hockey masculin et féminin, organisée conjointement par la Belgique (Wavre) et les Pays-Bas (Amsterdam). Un événement d’ampleur qui devrait attirer des milliers de spectateurs et placer la ville au centre du hockey international. Pendant deux semaines, Wavre deviendra l’épicentre du hockey mondial, une opportunité unique de mettre en lumière le sport et d’inspirer une nouvelle génération de joueurs.

Un garçon, avec son maillot de l’équipe nationale masculine de hockey sur le dos, celui des Red Lions, s’agite sur la ligne de touche. Tous le décrivent comme le petit clown du groupe, mais cela ne l’empêche pas de connaître l’équipe nationale sur le bout des doigts. Peu importe où il est, il ne manque aucun match. « Même quand je suis chez des amis de mes parents, je leur demande pour mettre le match à la télévision« , explique-t-il avec un grand sourire, avant de courir rejoindre ses coéquipiers.

Les plus âgés s’entraînent avec intensité sous la houlette de Bertrand Lodewyckx, l’un des coachs du club. Il a vu l’explosion des inscriptions au Lara depuis dix ans, même si, selon lui, l’augmentation s’est stabilisée ces deux ou trois dernières années. « Mais avec la Coupe du Monde qui approche, cela va peut-être changer« , ajoute-t-il. D’autant plus que le club met en place le programme Hockey to School, un projet en collaboration avec les écoles primaires de la région et la fédération de hockey, qui se ponctue avec un tournoi interscolaire au Lara pour promouvoir le hockey auprès des plus jeunes.

Un nouveau stade au cœur du projet

Juste à côté, les travaux du futur stade attirent les regards. La terre est retournée, les engins de chantier s’affairent à creuser et poser les dernières structures. Tous les ouvriers s’activent pour finir le chantier à temps. « Un jour, je jouerai dans ce stade« , lance l’un des enfants avec assurance.

Ce stade, qui pourra accueillir 4.000 spectateurs en temps normal et jusqu’à 10.000 pendant la Coupe du Monde grâce à des tribunes temporaires, a une histoire particulière. À l’origine, il s’agissait d’un stade de football, utilisé pendant plusieurs décennies avant d’être déserté. Sa reconversion en une toute nouvelle enceinte dédiée au hockey  marque un tournant pour Wavre, qui ambitionne de devenir une place forte de ce sport en Belgique.

Stéphane Crusnière, directeur général de la Régie communale autonome des sports de Wavre, explique : « Ce stade représente bien plus qu’une simple infrastructure sportive. Il s’inscrit dans un véritable projet de développement pour la ville. Non seulement, il va renforcer notre position dans le paysage sportif belge, mais il offrira aussi un lieu permanent pour accueillir des compétitions et matchs internationaux, ce qui est crucial pour l’attractivité de notre ville.« 

Selon le politicien issu du MR, l’impact de ce projet dépasse le cadre du sport. « Il va enrichir l’offre culturelle et touristique de Wavre, attirant non seulement des passionnés de hockey mais aussi des visiteurs venus de toute la Belgique et d’ailleurs. » Il poursuit : « L’un des grands avantages de cette infrastructure est qu’elle va permettre une régularité dans l’organisation de matchs de haut niveau. À Anvers, par exemple, pour chaque grand match, il faut monter des tribunes temporaires. C’est coûteux et cela prend du temps. À Wavre, avec une tribune fixe, l’organisation sera bien plus fluide et le Lara en bénéficiera aussi directement« . La fédération de hockey s’est déjà fixé un objectif clair : accueillir les premiers matchs dans cette nouvelle enceinte dès décembre 2025, afin que tout soit prêt pour la Coupe du Monde 2026.

Une évolution qui se lit aussi sur le terrain

Barbara Demaire, coach des plus jeunes au LARA Hockey Club, perçoit aussi une autre évolution notable : une plus grande inclusion. « Il y a plus de diversité, plus de filles aussi ». Une évolution qui aurait été difficile à imaginer il y a encore quelques années pour Élodie Picard, gardienne des Red Panthers, l’équipe nationale féminine de hockey. Elle est née ici, et elle a évolué au Lara jusqu’à ses 18 ans. « Quand j’ai commencé, il n’y avait même pas assez de filles pour faire une équipe complète », se souvient-elle. « On jouait en équipes mixtes par défaut, faute de joueuses. Aujourd’hui, voir autant de jeunes filles s’investir dans le hockey, c’est une vraie avancée.« 

Elle évolue maintenant aux Pays-Bas mais Élodie revient chaque semaine pour entraîner les jeunes portiers. Pour Bertrand, sa présence est un véritable plus : « C’est un modèle pour les gardiens, mais aussi pour tous les jeunes sélectionnés en équipe nationale junior. Ils viennent souvent lui demander des conseils. » Élodie, elle, se contente de transmettre. « J’ai grandi ici, je suis contente que le club évolue autant« , dit-elle simplement en esquissant un sourire.

Quand la séance touche à sa fin, les enfants traînent encore un peu autour des terrains, profitant des derniers rayons de soleil. Certains jouent à s’affronter en petits duels improvisés, d’autres en profitent pour faire la papote. Dans l’air flotte un enthousiasme presque contagieux, celui d’un sport en pleine ascension.

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Protégé : Maroc-Belgique: aller-retour entre écoles de journalisme

Mammouth - dim, 20/04/2025 - 23:40

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« S’il vous plaît, sauvez ma maman » : dans la peau d’un opérateur 112

Mammouth - mer, 16/04/2025 - 12:24
Quand le téléphone devient un fil entre la vie et la mort

Canva

Premier maillon de la chaîne des secours, première voix entendue pour les personnes en détresse. À la centrale 112 de Mons, ce sont des centaines d’appels qui retentissent jour et nuit. Entre routine et urgence vitale, ils sont le premier soutien quand le monde s’effondre pour certains. Ici, chaque sonnerie peut devenir un appel au secours.

« 112, ambulance et pompier, bonjour », voix posée, presque mécanique. Mickaël, comme tous ses autres collègues, répète cette phrase à longueur de journée. Pourtant, chaque appel est une histoire différente, chaque coup de fil peut tout faire basculer.

Il est à peine 07h45 à Mons quand la garde commence dans la plus grande centrale 112 de la région wallonne. C’est l’équipe 4 qui est au poste pour les 12 prochaines heures. Ici, quelques fenêtres donnant vu sur le parking, éclairent la salle. La lumière artificielle des ordinateurs, luise sur les visages. Plusieurs bureaux, formant un ‘U’, s’imposent au centre de la salle. Sept bureaux sur neuf sont occupés par les préposés 112, deux manquent à l’appel. « On est souvent en sous-effectif, moins 2 à 3 personnes par garde… Le nombre d’opérateurs change en fonction de la garde, si c’est de nuit ou de jour, ou encore en fonction du jour » explique Sabrina, cheffe d’équipe. « Souvent, cela est dû à des maladies. Mais au 112, on ne sait pas remplacer…, nous avons une formation particulière. D’ailleurs, quand une personne est formée, il lui faut presqu’un an pour rejoindre nos équipes. » ajoute-t-elle.

Dans un petit coin de la salle, deux personnes s’occupent de la radio, l’une pour la province du Hainaut, l’autre pour la province du Brabant Wallon. « Nous sommes la plus grande centrale 112 de Wallonie. Nous nous occupons de deux provinces, soit l’équivalent de 1,5 million d’habitants. Cela représente plus de 48 % des appels reçus en Wallonie en 2024 [ce chiffre s’explique aussi par le fait que la centrale de Mons prend le relais lorsque d’autres provinces sont surchargées, en plus de gérer le Hainaut et le Brabant wallon] », indique la cheffe d’équipe, laissant échapper un bâillement matinal.

Chaque appel, une histoire différente

Ici, les opérateurs ne savent jamais ce qui les attend quand ils décrochent. Une chute banale. Une voiture en flammes. Un enfant qui s’étouffe. Une personne âgée qui tombe chez elle. « On passe d’un appel de quelqu’un qui a mal au ventre à une tentative de suicide, sans transition », explique Mickaël, casque encore sur les oreilles.

Mickaël n’a pas le temps de boire une gorgée d’eau, qu’un nouvel appel vient l’interrompre « Bonjour, c’est la maison de repos ****, je vous téléphone parce qu’un de nos résidents à son cœur qui s’emballe, on aurait besoin d’une ambulance… ». La première chose que Mickaël cherche à savoir, c’est l’adresse. Car sans celle-ci, il ne peut pas envoyer les ambulances : « parfois quand certains établissements sont encodés dans notre logiciel, comme les écoles, certaines maisons de repos ou encore les entreprises SEVESO (ndlr : sites industriels à risque soumis à des règles de sécurité), il est plus facile de trouver la localisation, dans d’autres cas, nous devons chercher soit via notre carte, via internet… et parfois on perd un temps dingue. »

Quelques instants après, un tout autre appel survient « Monsieur ?! …. Quelqu’un va se suicider… enfin … je crois… il était fort proche du bord du pont… », à l’autre bout de la salle, Hervé reçoit un appel, presque le même discours. Ni une ni deux, les deux collègues s’accordent pour ne pas envoyer deux fois, une ambulance et la police sur place. « On doit rester attentifs à ce que notre interlocuteur nous dit et ce qui se passe dans la salle. Dans certaines situations, on reçoit plusieurs appels pour le même incident, il faut donc qu’on se coordonne et qu’on reste attentifs à nos collègues » ajoute Mickaël avant d’appeler la police pour les mettre au courant de la situation. « Pour la région Hainaut-Centre, nous n’appelons jamais les ambulances, elles reçoivent tout via leur GPS. Pour les autres zones, on passe par nos collègues qui sont à la radio ».

Dans le stress, il faut savoir garder son calme

Après une heure de pause, Mickaël revient plutôt détendu « Je prends une pause quand j’ai l’occasion d’en prendre, car ça dépend du nombre d’appels ». Mais ce moment plus calme ne durera que quelques instants.

Un appel surgit. Il décroche, de l’autre côté du téléphone, la voix d’une femme éclate, déformée par les sanglots « S’il vous plait, sauvez ma maman ! ». L’opérateur comprend très vite ce qu’il se passe à l’autre bout du fil. Il garde son calme, se concentre et donne les instructions. « Vérifiez si sa cage thoracique se soulève, si ce n’est pas le cas, il faut commencer la réanimation cardiaque ! ». En parallèle, ses doigts pianotent sur le clavier pour venir en aide à cette dame d’une septantaine d’années en détresse cardiaque : ambulance, SMUR, envoi immédiat. Mais au bout du fil, la respiration de la fille se fait irrégulière, sa voix tremble, étranglée par la peur. Sa respiration se bloque même par moment. Soudain un nouveau cri : « Sauvez ma mère… je vous en supplie… ».

« Est-ce qu’une personne peut commencer le massage cardiaque ? » répète-t-il afin qu’une personne vienne en aide à cette mère de famille, sans savoir qu’un voisin s’y était mis. « J’en peux plus, monsieur, je fais ça depuis un certain temps… », surgit au loin, une voix masculine, essoufflée. « Ne cessez pas vos efforts, et attendez que les secours prennent le relais, il est important de continuer ! » ordonne l’opérateur.  « Vous voulez que je vous accompagne ? ». Le silence s’installe une seconde. Dans cet espace suspendu, Mickaël inspire profondément. La réanimation peut commencer … « Et un, et deux, et trois, et quatre, et cinq, … Et un, et deux, et trois, et quatre, et cinq, … » indique Mickaël à ce voisin-sauveur.

Au bout de quelques répétitions, Mickaël demande de vérifier si la dame respire. Ce n’est pas le cas, la réanimation continue. Les secours arrivent rapidement. L’opérateur raccroche.  L’appel n’a duré que trois minutes. Trois minutes où la vie d’une femme s’est peut-être jouée. Cette proximité troublante avec la mort, les préposés 112 la vivent tous les jours.

Il a à peine le temps de reprendre ses esprits, qu’il répond à un autre appel et se replonge dans l’écran. Les doigts sur le clavier, il frappe des commandes qui défilent à une vitesse folle. Il n’a pas le temps de s’arrêter, de réfléchir. Tout va si vite ici, chaque sonnerie peut être une urgence vitale « On fait de notre mieux pour aider les appelants. Et donc, on n’a pas trop le temps de penser à nous, qu’on passe déjà à l’appel suivant ».

Le rire, une échappatoire face à l’urgence

« On s’entend très bien avec les collègues, on se taquine beaucoup, peu importe l’équipe, ça nous permet de tenir le cap » sourit Katty. Au milieu des sonneries stridentes et des voix tremblantes à l’autre bout du fil, dans la salle, par moment des éclats de rire fusent. Dans cet univers où l’urgence est reine, l’humour permet de décompresser. « Si on ne riait pas un peu entre nous, on deviendrait fous ». La taquinerie est omniprésente, légère et vitale pour un métier hors-norme. Parce qu’ici, plus qu’ailleurs, ils savent qu’un fou rire partagé vaut parfois toutes les thérapies du monde.

« Aujourd’hui, on est dans une équipe de vieux opérateurs … Hein Katty ! » lance Mickaël. Un E-Call [un système d’appel d’urgence automatique installé dans une voiture] vient interrompre cette gentille moquerie. L’appel n’émet aucun son. Le préposé 112 envoie une ambulance en repérage pour s’assurer que personne n’est en danger.  « On reçoit beaucoup d’appels de ce type, souvent se sont des personnes qui appuient sur ce bouton car elles ne savent pas à quoi il sert. Ce sont très rarement des accidents ».

Il est 18 heures, l’heure d’enclencher le 1733, pour la médecine de garde. Depuis sa mise en application en 2014, les appels d’urgence doivent également trier les appels de garde médicale ainsi que les appels d’interventions non urgentes, le 1722 (quand celui est activé par le centre de crise belge). « L’assignation de ces deux numéros non-urgents est d’une part très intéressante pour les appelants, mais l’est beaucoup moins pour nous les opérateurs. Ils ont été créés pour nous faciliter le tri des appels mais c’est quand même nous qui y répondons… » explique Sabrina.  Le 1733 fuse, dès l’ouverture de cette ligne téléphonique, les appels se comptent en vingtaine par heure. Entre deux appels non-urgents, des appels 112 sont reçus. Feu d’habitation. Accidents de la route. Pied cassé. Chaque appel arrive avec son lot de suspens.

19 heures 45, la relève arrive. Mickaël raccroche son dernier appel, enlève son casque, heureux d’être venu travaillé. La journée est finie. Le rendez-vous de la prochaine garde est donné, 19 heures 45, le lendemain pour la nuit. En dehors de la salle, la vie continue. Dedans, des voix continuent de sauver des vies, dans l’ombre, sans visage, sans merci. Juste des voix. Des voix qui sauvent.

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Sous le parasol d’Atoll

Mammouth - mer, 16/04/2025 - 11:38
Le centre de jour Atoll, archipel de solidarité pour les personnes âgées

Photos: Elise Houben

À Etterbeek, Woluwe et Forest, les centres de jour Atoll accueillent des seniors autonomes souhaitant briser la solitude et partager des moments de convivialité.
Contrairement aux maisons de repos, ce lieu s’adresse à des personnes âgées qui vivent encore chez elles mais qui cherchent un espace pour créer du lien et rythmer leurs journées autrement. Le nom Atoll, inspiré des groupements d’îles, reflète cet esprit de solidarité : chaque senior conserve son indépendance, tout en s’intégrant à un ensemble.
Au centre de jour d’Etterbeek, une quinzaine de participants, âgés de plus de 60 ans, viennent participer à des activités variées, matin et après-midi. Une totale liberté leur est accordée quant à leur heure d’arrivée et de départ.
Ce projet photographique a pour but de montrer les liens de solidarité et les moments du quotidien qui se créent au sein du centre.  

Plusieurs fois par semaine Fredo se rend à Atoll : un centre de jour pour personnes de plus de 60 ans. Les participants sont libre d’arriver à l’heure qu’ils souhaitent entre 9h et 10h30. Chaque matin, chaque participant du centre de jour est accueilli avec un café ou un thé fraîchement préparé. Le menu du jour est également annoncé. Chacun occupe son temps différemment avant le début des activités. Fredo utilise l’ordinateur et la tablette du centre pour se connecter à Instagram et échanger avec des personnes de son entourage qui lui sont chères pendant que d’autres lisent le journal. L’objectif des activités prévues par le centre, au-delà du divertissement, est de stimuler la mémoire et de maintenir l’esprit actif. Chaque semaine, des enfants rendent visite au centre de jour. Ce mélange intergénérationnel offre aux seniors l’occasion d’échanger avec les accompagnateurs et de partager des moments de jeu avec les enfants. L’ambiance est chaleureuse durant les activités, et les blagues fusent au sein du groupe. Nicolas travaille à Atoll depuis plusieurs années déjà. Il s’occupe principalement de la préparation des repas et de l’organisation des activités. Dès que l’heure de la fin du repas approche, Edith accourt à la cuisine pour faire la vaisselle. Elle raconte qu’on a voulu installer un lave-vaisselle chez elle, mais qu’elle a catégoriquement refusé. Faire la vaisselle est un vrai passe-temps, un moment important pour elle. Emmanuel est arrivé en Belgique en 1974. Sa vie a été marquée par le travail et, aujourd’hui, il profite enfin de son repos. Il vient à Atoll deux fois par semaine, chante en italien, danse et respire la joie de vivre. Sur cette photo, on le voit désigner une image de lui à 20 ans. Suzanne est la doyenne d’Atoll. Elle y est depuis sa création en 2012. Elle est arrivée en même temps que Misty, le chat qui occupe les lieux depuis le premier jour. Souvent, les animateurs ou les participants se réfèrent à elle lorsqu’ils se remémorent un moment passé au centre. La présence des stagiaires apporte toujours de la bonne humeur au sein d’Atoll. Les participants les sollicitent souvent pour jouer à toutes sortes de jeux de société. Ici, Laura et Clara ont passé trois jours dans le cadre de leur stage de rhéto. Chacune des personnes âgées s’adapte différemment au centre de jour. Françoise ne parle pas beaucoup avec les autres et reste souvent dans son coin, mais elle participe activement à chaque activité. Ce jour-là elle était fixée sur ses feuilles d’anglais. Le thème du cours était « crime ». Au fil du temps passé à Atoll, des liens se créent. C’est le cas pour Jean-Louis et Suzanne, inséparables sur le canapé, toujours assis côte à côte. Atoll est devenu une part essentielle de leur quotidien, un lieu où ils ont fait des rencontres précieuses.

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