Être Erasmus, c'est...

06.03.2012
Trois de nos étudiants ont décrit leur expérience Erasmus pour le quotidien 'Nord Eclair'. Pleins de fraîcheur, déjà teintés de nostalgie, leurs papiers sont une invitation au voyage et à la découvert

Roumanie, la crise d'adolescence ??

'Méconnue et complexe, la Roumanie ne se dévoile pas au premier regard. On débarque dans une ville inconnue la tête remplie d'idées. La Roumanie. Sa fraîche entrée dans l'Union européenne, alors que flottent encore dans l'air des relents de communisme. Une économie chevrotante, le problème des minorités, des défaillances structurelles, une corruption pernicieuse... Mais tant qu'on n'y sera pas resté 2, 3, 4 mois, on ne saura pas vraiment. Le goût de la tuica (alcool de prune, ndlr), les mains glacées qui se chauffent sur un poêle en céramique, la conduite à la roumaine, les jupes bigarrées des Roms, les charrettes et les moutons sur la route... Ça ne s'invente pas à une table de café.

Au début, on a une vision en noir et blanc, très simpliste. Il faut du temps et des discussions pour réussir à « lire » cette réalité. Et réaliser qu'il y a là un pays complexe, en pleine mutation. Un adolescent qui se cherche et avance en tâtonnant. Tandis que notre « vieille » Europe, assoupie, frileuse, se repose de plus en plus sur une prudente gouvernance, la Roumanie se crée, se modèle. Ici, on va de l'avant. Le règne de la débrouille. Et qu'est-ce que c'est beau, cette fougue des débuts.

Anne Chardonnens, à Cluj en Roumanie?

 

Remballe tes frites et ta fierté !

Fière de ma patrie, j'ai quitté « la capitale de l'Europe », bien décidée à prouver à tous combien mon petit pays est intéressant. Non, je ne suis pas Française : as-tu remarqué mon meilleur accent anglais ? Non, je ne suis pas allemande : je connais le goût de la vraie bière. Non, je ne suis pas italienne, je n'ai d'italien que le nom ! Mais les semaines passent et l'évidence est là : promo-girl ce n'est pas ma vocation. Je confonds de loin mon drapeau avec celui de la Roumanie, je suis incapable de cuisiner quoi que ce soit qui ait le goût de la Belgique, je ne connais aucune danse typique. Je revendique moins mon identité nationale... Mais je rentrerai chez moi heureuse et fière d'appartenir à ce grand pays qu'est l'Europe. D'ici l'été, pour combler le manque qui ne tardera pas à se faire sentir, je testerai cette recette de tortilla espagnole tout en écoutant en boucle ma nouvelle playlist « Musique des Balkans ». Par ailleurs, je me sentirai plus concernée par la dette grecque.

Être Erasmus, c'est comme cette invention hongroise, le Rubikub. Nous avons tous une couleur locale, mais une fois mélangés, il est difficile de reprendre sa place sans garder un petit bout de l'autre dans son espace.'

Élise Parentani, à Szeged en Hongrie


Deux cultures pour un pays?

'Valence, ou comment la transposition de nos problèmes communautaires à 1 500 km de nos frontières peut modifier les perceptions de notre chère Belgique. C'est par le plus grand des hasards que dans le fantastique chaos que sont les premières semaines en Erasmus, je me suis retrouvé à partager mon logis avec deux Portugais et un descendant d'une ethnie exotique, un Flamand.

Je me souviens de nos engueulades colossales comme si c'était hier : l'un s'égosillait dans un français terrifiant : « Mais alsjeblieft, tu peux pas regarder toi, que c'est nous qui doivent payer pour vous tout le temps ? », et l'autre de lui rétorquer dans un flamand plutôt inexact. Mais notre quatuor fonctionne pourtant, car mon compatriote et moi nous entendions sur un point : la guindaille.

Le Belge, qu'il soit du sud ou du nord, aime et sait faire la fête. Au point d'en faire l'apologie, et de rallier tous les dialectes de l'Europe autour d'un même élixir. C'est d'ailleurs lors d'une de ces ribotes déraisonnables que Koen Borgijs (ça ne s'invente pas) me chuchota à l'oreille : « Tu sais Vic, c'est pas parce qu'on avoir pas le même cultuur, ou le même langue que on peut pas vivre ensemble. Ici dans l'Erasmus, tous mes amis vient de pays différents ».

Une belle leçon de morale, qui m'amène à penser qu'il aurait peut-être été de bon ton d'offrir une mousse à ces négociateurs acharnés. Santé !'

Victor Wiard, à Valence en Espagne

Lire l'article 'Paroles de Belges en Erasmus' sur le site de Nord Eclair.?