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Habitats part’âgés

Thu, 24/10/2024 - 15:56
Entre le domicile et le home, une autre voie pour les aînés

Les personnes âgées représentaient en 2023 environ 20% de la population belge. Avec les années, cette proportion ne fera qu’augmenter et posera nouveaux défis, par exemple en termes de logement. À mi-chemin entre le domicile et l’institutionnalisation, l’habitat partagé fait son apparition. Quelles sont ses conditions financières ? Quelles différences y a-t-il avec les homes ?

Un gros pull bordeaux sur le dos. Des manches retroussées qui laissent apparaître un chemisier fleuri rose et gris. Jeannine sourit. Une longue piste rouge sépare les deux équipes: les canaris et les zinnekes. « Attends, je vais traverser la mer rouge », dit-elle en allant rejoindre des copines de l’autre côté. Une aînée s’avance lentement, boules de pétanque posées sur le déambulateur. « On n’a qu’une heure », s’empresse de préciser un résident. Des applaudissements pour le gagnant. Une boule dans chaque main, Jeannine lâche : « elle est ma boule, celle-là ».

Partie de pétanque chez les petites soeurs des pauvres dans l’après-midi

Jeannine est arrivée chez les Petites Sœurs des Pauvres il y a un an. Cette communauté des Marolles (Bruxelles) se met, depuis 1854, au service des personnes âgées issues de la pauvreté. Elle y a emménagé de son plein gré. « Tu es libre, mais tu es quand même observé », nuance-t-elle. Ambulances et pompiers sont venus la chercher à son domicile. Elle est restée un mois à l’hôpital suite à une anémie. « Je ne souffrais pas, mais j’étais en danger de mort ». À 85 ans, elle trouve désormais plus sécurisant d’être dans un habitat collectif.  

Selon une étude de l’Observatoire de la Santé et du Social, un Bruxellois de 65 ans et plus sur cinq ne peut pas (ou à peine) compter sur d’autres personnes en cas de problèmes. La majorité des personnes âgées en maison de repos s’y trouvent moins pour des problèmes de santé que pour la peur d’éventuels soucis à venir. Certains résidents ont été victimes de vol ou d’agression dans la rue. D’autres n’ont plus de famille à proximité et n’ont plus personne sur qui compter. La structure de la société a changé, et les personnes sont davantage isolées aujourd’hui qu’hier. Un peu plus d’un tiers des Bruxellois âgés de 65-79 ans (et presque la moitié des Bruxellois âgés de 80 ans et plus) vivent seuls. Entre des familles scindées et des enfants qui partent vivre à l’étranger, les personnes âgées se sentent délaissées.  

Portrait de Jeannine dans sa chambre

La participation comme moteur

Giuseppe, lui, s’est installé il y cinq mois dans un immeuble à Etterbeek. Divorcé, il cherchait un projet dans lequel se lancer, mais qui lui garantissait des moments d’intimité. « Ici il y a une partie privée qui nous permet de mener des activités extérieures », explique cet homme vêtu d’un petit chemisier à carreaux, pull en V et lunettes sur le nez. Son habitat, autogéré par des seniors, est né en 2004 à l’initiative d’Abbeyfield, une ASBL qui propose des habitats groupés participatifs et locatifs. Aujourd’hui, elle compte 12 maisons en Belgique, dont 3, à Bruxelles. Au sein de cette maison gérée par la commune, huit appartements ont été aménagés. Guiseppe dispose d’un living avec cuisine équipée, une chambre à coucher, d’une salle de douche et d’une cave. Une chambre d’ami est aussi de mise. À 71 ans, il a trouvé un compromis entre le domicile et la maison de repos. Abbeyfield n’est pas une « institutionnalisation », comme on dit pour désigner le placement dans un home. En mettant ses résidents au centre de l’organisation, le projet leur donne le pouvoir de décision. Pour postuler, il faut envoyer une lettre de motivation, qui est suivie d’une consultation chez le médecin et d’une période d’essai de 15 jours. Une validation doit être donnée par les habitants et le conseil d’administration.

Salon de Giuseppe

Un comité participatif est aussi organisé trois fois par an chez Jeannine. Composé de sept résidents volontaires, il aborde un tas de sujets. – mais anonymement. Un résident italien désirait avoir de la sauce italienne sur ses pâtes et quelques jours plus tard, il en avait. Différents services sont aussi demandés aux résidents, comme la préparation de tartines distribuées aux pauvres à midi, l’organisation de la messe ou la gestion de la bibliothèque.  Jeannine arrose les plantes du couloir qui mène au réfectoire. La sœur qui s’en chargeait a des douleurs au dos. « Je vais le faire pour toi, mais quand tu reviens, c’est fini », dit-elle d’un ton décidé. Elle se sent utile en aidant les autres résidents. « Moi je fais du bénévolat sans le savoir, mais je ne dépends de personne », dit-elle.

Dans l’habitat de Giuseppe, des repas communautaires sont organisés le lundi et le vendredi soir. Chaque résident cuisine à tour de rôle. Lui qui est originaire d’Italie a préparé des boulettes siciliennes. Œuf, formage, persil. Réunis autour d’une table recouverte d’une nappe jaune canari, ses colocataires étaient ravis. Une fois par mois, un comité discute du futur de la communauté. Cette semaine, la liste des tâches a tourné. Giuseppe s’occupe de contacter des ouvriers en cas de difficulté. Il est expérimenté. Peindre des appartements et des maisons, c’était sa profession. Une responsabilité est attribuée à chaque résident en fonction de ses capacités, qu’il s’agisse de l’entretien du jardin, coordination, trésorerie. On change de coordinateur tous les trois mois pour éviter tout jeu de pouvoir.

Portrait de Giuseppe dans sa chambre

Accessibilité financière 

Dans les habitations Abbeyfield, une participation aux frais est demandée. À Bruxelles, le montant tourne autour de 860 euros. Les frais varient d’une maison à l’autre. Le loyer, les repas en communauté ainsi que les choses à réparer peuvent faire monter la facture. D’après l’Observatoire de la Santé et du Social en région bruxelloise, le prix mensuel à charge d’un résident de maison de repos en 2014 s’élevait en moyenne à 1.356 euros. En 2020, les prix de 40% des structures à Bruxelles excèdent les 2.000 euros par mois, des prix qui ont fortement augmenté ces dernières années.

Pour ses dépenses, Jeannine s’en est remise à sa nièce. Elle lui fait confiance. Chez les petites sœurs des pauvres, une messe est célébrée chaque jour à 11h, au premier étage. Les résidents sont libres d’y participer, et elle aime se rendre dans la grande chapelle composée d’un autel et de quatre rangées de bancs en bois. Au pied d’une grande croix, trois prêtres se tiennent debout devant l’assemblée. Des sœurs se sont installées sur la rangée de gauche. Enjouée, une sœur chante dans un micro et une autre joue du piano. Élisabeth, une résidente que Jeannine a décidé de prendre sous son aile, vient s’asseoir à côté d’elle. Avec son tempérament, Élisabeth a du mal avec les autres résidentes, mais avec Jeannine, cela se passe bien pour le moment. « Jésus est le chemin qui va nous donner le sens de la vie », assure le prêtre. Dans la salle résonnent les petits ronflements d’Élisabeth, qui s’est assoupie.

Messe de 11h chez les petites sœurs des pauvres

Vivre en relation avec les autres

Dans la matinée, Giuseppe a pris un cliché d’un parc qu’il repeint à présent dans son atelier. Sur la toile, une brume s’échappe de la pelouse éclairée par le soleil. Maintenant qu’il a du temps, il s’est découvert un talent. Il signe, dans le coin inférieur droit, des peintures très réalistes à l’acrylique et à l’huile. Sa dernière création est un petit oiseau, qui attend encore sa signature et une couche de vernis. Avec l’autorisation des résidents, Giuseppe a accroché des peintures dans le salon, le hall d’entrée et la chambre d’ami. « Une fois, j’ai tout descendu en bas et j’ai dit choisissez ceux que vous préférez sauf celui-là, car je l’ai promis à mon fils ». Cette peinture, adossée contre une armoire à terre, attend son nouveau propriétaire depuis deux mois. « Ça, quand les enfants deviennent grands, il y a toujours l’excuse du travail », soupire-t-il. En octobre, il participera au parcours des artistes de sa commune et exposera ses peintures pendant deux jours dans son salon. Une façon pour lui de participer à la vie sociale de son quartier.

Peintures réalisés par Giuseppe

À midi, un repas est servi dans le grand réfectoire au premier étage. Tous les résidents ne sont pas de la partie. Ceux avec moins d’autonomie mangent à leurs étages respectifs. Jeannine mange à la table numéro 4 avec trois amies qu’elle n’a pas choisies. Une sœur dans le coin du réfectoire agite une cloche et entame une prière dans un micro. « Au nom du père, du fils… ». Des bénévoles  passent entre les tables pour prendre les commandes. Le menu est le même pour tous les résidents, mais les aliments peuvent être sélectionnés séparément. Sur un petit papier, les encadrants recueillent les demandes à l’aide de croix. Une croix (un peu), deux croix (normal), trois croix (beaucoup). Le vendredi c’est du poisson. Une annonce marque la fin du repas. Un tournoi de pétanque sur inscription est organisé avec les résidents de la maison Sainte-Monique jeudi prochain. Après le déjeuner, il leur arrive de rester parler jusqu’à 14h30 autour d’un café.

Perte d’autonomie 

Le service, composé de bénévoles, de sœurs et d’aides-soignants, n’accueille pas les personnes atteintes de démence. Jeannine précise : « Si une personne développe cette condition ici, elle reste et reçoit des soins palliatifs. » Pour évaluer le niveau de dépendance des résidents, le service utilise l’échelle de Katz. Ne pourrait-on pas y voir un biais, puisqu’elle mesure la dépendance plutôt que l’autonomie du patient ? Selon l’Observatoire de la santé et du social, la Région de Bruxelles-Capitale compte une proportion plus importante de personnes âgées en maison de repos avec des niveaux de dépendance légère (profils O et A sur l’échelle de Katz) comparée aux autres régions. De plus, cette échelle influence le financement des maisons de repos : plus une personne est dépendante, plus l’établissement reçoit de fonds. Au sein de l’habitat partagé de Giuseppe, ce sont les résidents qui décident quand l’un d’eux devient trop dépendant. Une solidarité s’est instaurée entre eux. Contrairement aux maisons de repos, ils ne bénéficient pas d’une assistance médicale continue. Ainsi, chaque résident désigne un référent à son arrivée, qui prendra les décisions nécessaires en cas de besoin.

 La présence de la famille 

Giuseppe a des semaines bien chargées. Avec les transports à proximité, il a donné sa camionnette à son fils. Bénévole chez un collectionneur de vases depuis 3 ans, Giuseppe s’occupe aussi de l’informatique dans cette fondation au centre-ville. Un cours de peinture prévu tous les mercredis à Ixelles. Il assiste en outre à plusieurs événements culturels chaque semaine. Sur sa table, une dizaine de flyers témoigne de son goût pour la culture: La Monnaie, Flagey, le musée des instruments… Il se rend souvent aussi au consulat italien pour voir des pièces de théâtre ou prendre des livres à la bibliothèque. Da chambre, des livres d’arts (Turner, Van Gogh, Monet, etc.) sont soigneusement alignés sur une étagère blanche. Cette armoire, c’est son fils qui s’en est occupé. À son arrivée, Giuseppe a rafraîchi tous les murs de sa chambre et son fils l’a aidé à installer des meubles Ikea. « Ils sont beaucoup plus pratiques », dit-il. Le cousin de Jeannine aussi est passé chez Ikea. Elle ne savait pas où mettre ses chaussures et il lui a trouvé un meuble adapté. Quand elle était encore dans son lit à l’hôpital, c’est son cousin avec sa femme , sa nièce et son mari qui sont venus l’aider à aménager son nid. Jeannine occupe une petite chambre au quatrième, l’étage qui accueille les résidents les plus autonomes. « Quatrième étage, liberté chérie », dit-elle, ravie.

Dans le long couloir aux murs rose saumon, toutes sortes de cadres sont accrochés. Des photos de tulipes et de la dynastie. Au fond, la télévision trône au milieu d’un grand salon. Dans la salle à côté, une petite cuisine offre la possibilité aux résidents d’inviter et d’aller chercher du café toute la journée. Des chambres sont aussi disponibles pour accueillir les proches. Sa famille est déjà venue lui rendre visite avec des pistolets fourrés : « C’est sympa parce que c’est comme à la maison », trouve Jeannine. À l’entrée du bâtiment sont posés deux documents à compléter. L’un pour les visiteurs, l’autre pour les résidents. Date, prénom, heure sont demandés. « Tu fais ce que tu veux, mais tu dois prévenir que tu pars », dit-elle. Quand sa famille venait, elle prenait le linge sale et elle le ramenait propre. Maintenant elle a des étiquettes sur tous ses vêtements. C’est le personnel qui les lave. Elle continue de les repasser parce que ça la détend.

Vue de la chambre de Jeannine chez les petites soeurs des pauvres

Dans sa chambre, sur une petite table en bois, un petit frigo lui permet de garder au frais les restes de son petit déjeuner. Des rectangles de beurre, des Kiri et des grèves. Tous les matins à 8h, un chariot avec des thermos chauds passe le long du couloir. Chaque chambre a droit à un plateau. « Le couloir, c’est la rue du marché », dit-elle. Des aînés impatients viennent récupérer leur plateau avant que l’employé n’ait eu le temps de tout déposer. 

Une vue sur le palais de justice depuis sa fenêtre. Un coin prière avec une rose dans une bouteille en verre. Une série d’étagères remplies de mystères. Lit médicalisé obligé. Les fils cachés sous le sommier et le perroquet calé dans un coin de sa chambre. Elle le ressortira quand ce sera le bon moment. Des coquetiers, des bougies d’anniversaire et des petits livres reçus d’êtres chers. Jeannine reste en peignoir jusqu’à 9h, aère son lit et prie un petit quart d’heure. « Ici, j’ai pris l’habitude d’apprécier mon lever ».

A l’heure ou le vieillissement de la population nous pousse à réinventer nos modes de vie, l’habitat partagé apparaît comme une alternative humaine et solidaire. Il permet à des personnes agées comme Jeanine et Giuseppe de maintenir leur autonomie tout en créant des liens. Ils sont le reflet d’une société qui tente de redonner à ses aînés une place active et valorisante. Parce que vieillir ne devrait jamais rimer avec effacement.

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Herstal éventrée, Herstal réconciliée ?

Thu, 24/10/2024 - 15:34
À Herstal, Frédéric Daerden ne ferme pas la porte au MR, malgré l’annulation de l’extension du tram

La ville de Herstal est éventrée par les travaux du tram. Vendredi 18 octobre, elle introduisait un double recours au Conseil d’Etat afin de tenter de relancer le projet. Malgré cela, le PS pourrait former une majorité avec le MR qui à initié son annulation.

Giro a ouvert sa pizzeria il y a 6 mois. Assis à la table de son restaurant fraîchement peint, il attend les clients. Pour rénover son commerce, le restaurateur a dû contracter deux crédits. Un mois après son ouverture, les travaux du tram ont commencé sur le boulevard juste devant la pizzéria. En voyant le boulevard s’ouvrir face aux pelleteuses, Giro se réjouissait du tram qui devait étendre sa clientèle : « Ça changerait le visage de la rue », explique-t-il. Mais l’arrêt des travaux pour une durée incertaine le met dans une situation indélicate : « Je n’ouvre même plus à midi, parce qu’il n’y a personne. Ces travaux rendent l’accès au restaurant plus compliqué, et diminuent les places de parking disponibles », déplore le restaurateur. Plus loin dans la rue, même écho chez un supermarché d’une grande chaîne : « Nos chauffeurs se perdent, et certains clients sont découragés à cause du détour qu’il faut faire pour venir chez nous », confie un responsable. 

Pour rappel, le ministre de la mobilité François Desquesnes (membre du gouvernement MR-cdH) avait annoncé à la fin du mois d’août que le tram liégeois, qui doit entrer en circulation d’ici 2025, ne circulerait finalement pas jusque Herstal et Seraing. Deux lignes de bus prioritaires seront mises en place afin de le remplacer. Selon Frédéric Daerden, le bourgmestre socialiste fraîchement réélu à Herstal, cette décision affiche une vision court-termiste : « Si on réfléchit comme ça, on ne fait jamais rien », s’exclame-t-il. La ville de Herstal a donc décidé d’introduire ce vendredi un recours au conseil d’état afin de revenir sur la décision du gouvernement wallon. « Le tram a un vrai rôle pour favoriser les transports en communs, ce qui permettrait de diminuer la circulation déjà bien engorgée que ce soit en ville ou en périphérie. Je ne pense pas que de nouvelles lignes de bus répondent aux besoins de la population », développe le bourgmestre. 

Vers une majorité PS-MR à Herstal ?

Ce dossier reste donc toujours en suspens, et les travaux toujours à l’arrêt. Il s’inscrit dans un contexte post-électoral compliqué. En effet, Frédéric Daerden est réélu pour la quatrième fois d’affilée avec 47,8% des voix pour 17 sièges, mais c’est la première fois qu’il n’obtient pas la majorité absolue (18 sièges ) à l’issue du scrutin. Il va donc devoir accueillir un partenaire – le MR ( 20,9% ) ou le PTB ( 31,3% ) – afin de former une majorité. Le bourgmestre socialiste s’est dit ouvert aux deux partis, ne fermant donc pas la porte au MR malgré l’annonce du gouvernement wallon MR-Engagés de ne pas prolonger le tram. 

Pour lui, le projet du tram est un thème parmi beaucoup d’autres de gestion d’une ville. Ce point ne sera donc pas déterminant dans la décision de la future coalition. D’ailleurs, leur majorité actuelle inclut également des membres des “engagés” qui ont voté en faveur du recours. Reste à voir si cette future majorité aura le dernier mot dans ce dossier, afin de défendre une vision d’une métropole liégeoise plus durable tout en intégrant sa périphérie. 

La plus-value de ce tram, c’est de faire de Liège une métropole wallonne

La ville d’Herstal n’est pas la seule à contester cette décision. La députée Ecolo au parlement wallon Veronica Cremasco a également déposé une motion à l’encontre du ministre Desquesnes. « Cette motion invite le ministre à venir rencontrer les habitants, les bourgmestres et les élus afin de mesurer les impacts de cette annulation. Elle demande également un dialogue avec les bureaux d’études impliqués depuis 15 ans sur ce dossier, comme les auteurs de projet du PUM ( plan urbain de mobilité de l’agglomération liégeoise )  », explique-t-elle. Pour la députée qui est par ailleurs ingénieure spécialisée en développement durable, il faut penser cette décision dans le cadre d’un projet de métropole liégeoise :  « La plus-value de ce tram, c’est de faire de Liège une métropole wallonne, et cela ne se fera pas si le tram ne circule qu’à Liège même. Il faut nécessairement aller chercher les deux points principaux de l’agglomération, à savoir Herstal et Seraing. D’autant plus que des transports propres et structurants sont la colonne vertébrale d’une métropole ». La députée pointe également le coût environnemental de cette décision, qui serait de 5.000 tonnes de CO2 supplémentaires par an, selon l’ASBL The Shifters. De plus, le tram apporterait une nouvelle dynamique, et permettrait à de nombreux commerces et au marché immobilier de se développer : « On a besoin que les populations herstaliennes puissent se déplacer pour aller voir un spectacle dans la nouvelle salle de concert à Liège, on a besoin que nos étudiant.e.s puissent aller kotter à liège facilement ». 

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Trahisons politiques aux élections communales

Tue, 22/10/2024 - 13:32
Les remous et mécanismes post-électoraux font couler de l’encre en Belgique

Arnaud Jaegers

Au lendemain des élections communales, les premières coalitions voient le jour, au prix de quelques trahisons. De Tournai à Rochefort en passant par Wavre, tous les coups sont permis en Belgique francophone, faute de règles. En Flandre, un nouveau système a été instauré donnant la main au parti arrivé en premier, ce qui limite les trahisons spectaculaires. 

Vous ne sortirez pas de là (l’hôtel de ville) vivants.” Sur la place de la ville à Rochefort, lundi 14 octobre, lendemain d’élections communales, des manifestants font entendre leur mécontentement. La cause de leur colère ? La liste citoyenne @venir citoyen, menée par l’ancienne bourgmestre Corine Mullens (MR), arrivée en première position, s’est vu reléguée dans l’opposition par les listes arrivant deuxième et troisième, respectivement MR-IC et Pour. Julien Defaux (MR-IC), bourgmestre sortant explique son choix : “On avait une volonté de ne pas travailler avec Mme Mullens car on savait que ça ne se passerait pas bien. On avait une envie de retrouver un collège serein et cohérent, où tout le monde se dit bonjour et où il n’y a pas de mépris.”

Démocratie proportionnelle

N’est-ce pas anti-démocratique de ne pas laisser la main au parti ayant obtenu le plus de votes ?. “En Belgique, avec la démocratie proportionnelle, la question n’est pas d’avoir le plus de voix mais plutôt d’avoir une majorité qui représente une majorité de la population”, explique Thomas Legein, chercheur postdoctoral au sein du groupe de recherche DFUTUR de la VUB. “En ce sens les alliances après les résultats n’ont rien d’anti-démocratique, ce sont les règles du jeu.” Le bourgmestre de Rochefort ne le contredira pas. “On est sous un mécanisme d’une majorité représentative en Belgique, on représente 56% des votes avec les 2 groupes”, affirme Julien Defaux. “Ce n’est pas un choix facile à porter. Je ne suis pas insensible à l’aspect moral du choix, même si la démocratie et la loi nous l’autorisent”.

Voir le cinéma qui se passe suite aux résultats électoraux, ça n’améliore pas la confiance des citoyens envers les partis politiques et les institutions démocratiques.

Thomas Legein, chercheur spécialisé dans la politique belge.

Autre exemple marquant, celui de Benoît Thoreau et des Engagés, qui, à Wavre, ont gagné leur pari. Dans le chef-lieu des libéraux et fief de la famille Michel, son parti a formé une coalition avec le PS et Écolo, reléguant dans l’opposition le MR, qui avait pourtant remporté le plus grand nombre de voix. Pour M. Thoreau, les citoyens ont exprimé leur envie de changement. “La pression populaire était énorme. Si on s’était remis avec le MR, on n’aurait pas pu exprimer le changement souhaité par les citoyens.” Benoît Thoreau, pourtant 3e sur la liste des Engagés, est le candidat qui a remporté le plus de voix de préférence de son parti et remporte, donc, le titre de bourgmestre. 

Droit d’initiative

De son côté, la Région flamande a décidé de modifier son système en instaurant un droit d’initiative, sur une durée de deux semaines, pour la liste ayant reçu le plus de voix. Le système est donc plus encadré qu’en Wallonie et à Bruxelles, où toutes les listes sont libres de négocier avec qui elles le souhaitent. Ce sont précisément ces mécanismes qui causent les remous de ces derniers jours suivant les résultats des élections communales ce 13 octobre.  “Il y a moins d’histoires de trahisons en Flandre. L’idéal démocratique est respecté car la liste avec le plus de voix à l’initiative pour former sa majorité, ce qui empêche d’autres listes de faire des alliances dans son dos”, analyse Thomas Legein.

Direction le Hainaut et la ville de Tournai où, là aussi, les élections ont provoqué la stupeur: Paul-Olivier Delannois (PS), l’ancien bourgmestre arrivé en tête, a été évincé. “La nature humaine m’apprend tous les jours. Je pensais avoir tout vu, mais certains balaient leurs propres valeurs”, lâche-t-il. Lui et son parti avaient reçu le plus de voix, obtenant 15 sièges sur les 39 possibles. Le MR, Les Engagés et Écolo ont formé une coalition de 22 sièges.

Vers plus d’absentéisme ?

Autre cas de figure: à Ixelles, l’ex-bourgmestre, Christos Doulkeridis (Écolo) a été exclu de la majorité alors que sa liste avait elle aussi remporté le plus grand nombre de voix. Cette fois, le MR, le PS et Les Engagés se sont entendus pour former une coalition. Doulkeridis a, dans la foulée, arrêté sa carrière politique. “Ces petits jeux politiques sont difficilement compréhensibles pour les citoyens.” explique-t-il à l’antenne de la RTBF.

Tous ces remous ne risquent-ils pas d’accentuer encore la désillusion à l’égard du politique ? “Voir le cinéma qui se passe suite aux résultats électoraux, ça ne va pas améliorer la confiance des citoyens envers les partis politiques et les institutions démocratiques”, estime Thomas Legein. Généraliser le régime adopté en Flandre pourrait contribuer à combler ce manque de confiance. “C’est une règle du jeu facile à accepter, de se dire que les gagnants peuvent négocier en premier. Est-ce qu’il faudrait la mettre en place en Wallonie et à Bruxelles ? Ça c’est une question politique”, conclut le chercheur.

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Veillées pour la Palestine (épisode 2)

Thu, 17/10/2024 - 11:08
Récit d’une année de mobilisation quotidienne à Bruxelles 

Photo : Selemette HA

Que faire quand, sur les réseaux sociaux, des images d’enfants calcinés nous parviennent tous les jours de Gaza ? Swiper. Ou crier. À 3000 kms de l’effroi, Dalila et Shaker ont choisi de tordre le cou à l’impuissance en donnant leur voix à la cause palestinienne, tous les jours depuis le 17 octobre 2023, pendant une heure au moins. Mais entre la fatigue, la pression policière et la banalisation dans la société des morts civils au Proche-Orient, la lutte pour le cessez-le-feu se confond bientôt avec celle pour maintenir les veillées quotidiennes, devenues symbole d’espoir. Récit en deux volets d’une année de lutte en forme de montagnes russes émotionnelles. 

Épisode 2 : Préserver le cri, coûte que coûte 

Déjà plus de trois mois, Dali crie tous les jours sans exception pour la Palestine. Ce soir de janvier, lors de la 89ème veillée, la militante hausse le ton : « réveillez-vous, là ! » Ses joues sont rouges, sa tête baissée comme un taureau prêt à charger. Elle fait le tour du drapeau d’un air pressé avant de céder le micro à Shaker. C’est la première fois qu’elle craque. Deux jours auparavant, elle partait aux aurores à la Haye pour soutenir la requête de l’Afrique du Sud auprès de la Cour Internationale de Justice dans le cadre d’éventuelles violations de la Convention sur le génocide d’Israël à Gaza. Sans cesse, on l’interpelle pour des photos, pour les actions à venir, sur les réseaux sociaux comme aux manifestations. Des manifestations, il y en a parfois trois dans la même journée. Elle est débordée. Mais ce n’est jamais assez. Elle parcourt alors la ville pour des actions de collages de stickers ou pour suivre des graffeurs. Jusqu’à 2 ou 3h du matin. Elle dort et s’alimente moins, elle est épuisée, physiquement et moralement. Quelques jours avant, une lettre recommandée lui inflige une amende de 350 euros pour avoir incité à la rébellion contre les forces de l’ordre, lors de l’épisode du Mont des Arts (lien vers l’épisode 1). La goutte d’eau, ses yeux en débordent. Alors ce soir-là, ce sont ses camarades aux slogans trop mous à son goût qui prennent : « dire ‟Palestine vivra, Palestine vaincra” sans la rage, ça sert à rien. J’veux que ça sorte des tripes, jusqu’à s’en rendre malade. Pour dire aux Palestiniens: ‟on est avec vous, on vous soutient et on ne vous lâchera pas” ! » Sinon, « autant faire une minute de silence ! »

« Toujours « Palestine Palestine”, il n’y a que ça dans ta vie »

On l’a pourtant prévenu : « Dalila t’as l’air à bout, prends toi une pause, reviens nous en force ». Mais la jeune militante qui n’a jamais raté plus de deux veillées de suite en est incapable. Ses proches lui disent qu’elle en fait trop, « toujours ‟Palestine Palestine”, il n’y a que ça dans ta vie ». Des personnes qui suivaient ses réseaux sociaux se sont retirées, elle perd aussi une amie proche. Elle a bien essayé de déconnecter, une fois. Mais elle ne savait pas quoi faire. « Si je chante, je vais me sentir coupable, pourquoi je me suis amusée ? » Elle est prise en étau entre deux injustices, le « risque de nettoyage ethnique » à Gaza et le fait qu’à Bruxelles, on le banalise. La manifestation nationale du 21 janvier attire 20.000 personnes selon les organisateurs, moitié moins que celles organisées fin 2023. « C’est de pire en pire et on est moins nombreux, ça devrait être l’inverse, ça me frustre ». Les journalistes ne viennent plus à Gare Centrale, lassés du même spectacle quotidien. Souvent, elle se remémore les premières veillées d’octobre, la chaude ambiance de la Bourse noire de monde. « On pourrait ramener le cadavre d’un bébé palestinien… » Le policier avait raison et ça la tue (voir l’épisode 1). Elle regarde les passants s’émerveiller du Bright Festival qui illumine les rues de la Capitale. « J’ai envie de les secouer, Gaza c’est pas un film ! »

Dalila lance un slogan (mars 2023). Photo : David Mcn

Ils nous ont déclaré la guerre

(Réveillez-vous) peuple du monde et enfant de la Terre

(Réveillez-vous) avant le point de non-retour

On aura b’soin d’tout l’monde, tout l’monde, tout l’monde, tout l’monde

Ce refrain de la rappeuse Keny Arkana, elle y pense souvent. Dali ne partage plus assez de la même réalité que ses semblables pour les comprendre, et inversement. Il y a comme deux mondes. Celui de ses proches interloqués quand elle refuse un Coca car elle voit dans l’entreprise, comme Carrefour ou McDonald’s, un complice des crimes d’Israël. Et celui de Dalila qui, dans le rouge du soda américain, ne voit que du sang, « j’ai des flashs, toujours des flashs ». « On me dit que je suis extrême mais pour moi être extrême c’est tuer des gens ». Alors crier quotidiennement pour la Palestine pendant une heure est un minimum : « Dès fois je me reconnais plus, je me balade à Grand Place avec mon amie et d’un coup je sors mon drapeau et je commence à crier “free Palestine !” » « Tu donnes tout, ça peut rendre dingue » reconnait-elle. Mais moins que de ne rien faire : « imagine si tous les soirs je regardais des vidéos et des photos atroces sans pouvoir m’exprimer, sans pouvoir dire ma rage ». Plus facile que de ne rien faire, crier tous les jours reste du temps et de l’énergie. Aux veillées, plus beaucoup n’en ont. Shaker, en inlassable leader vocal, harangue ses troupes : « il n’y a que moi qui crie, criez avec moi ! » Dalila perd sa voix, la récupère deux jours, la reperd. Comme son espoir d’une issue favorable à Gaza. Sa voix a complètement changé, elle ne sera plus jamais comme avant.

« On est des menteurs »

Gaza est devenu « un lieu de mort et de désespoir » selon Martin Griffith, secrétaire général adjoint de l’ONU. Après Gaza-ville et Khan Younès, Benyamin Netanyahou promet d’envahir Rafah. Le 29 février 2024, le cap des 30.000 morts palestiniens est dépassé. Des enfants meurent de faim. Difficile de garder espoir pour les militants de la paix. L’impuissance est généralisée et forme un régime écrasant. Aux États-Unis, un soldat s’immole devant l’ambassade d’Israël pour protester contre le « génocide » en Palestine. Aux veillées, les tensions s’accumulent, avec les policiers ou entre Palestiniens. Ces derniers, à bout, n’en peuvent plus. Ils ne s’expriment plus que par la colère, plus personne ne les comprend. Dali exprime régulièrement sa rage en story Instagram « vous n’êtes pas humains, vous êtes tous complices ». Elle n’ose plus finir ses phrases : « Dès fois t’as juste envie… J’ai des pulsions, des réflexions, je me dis… On a presque tout fait. Jusqu’où on va aller pour que ça s’arrête ? » Beaucoup de militants ont lâché. Pour certains, crier tous les jours ne fait plus sens.

Shaker lors d’une Marche pour la Palestine (Ixelles, avril 2024). Photo : Anja Snd

On se questionne sur la poursuite des veillées. La réponse de Shaker fuse : « non, on sera là tous les jours ». Dali approuve. La mobilisation quotidienne continue autour d’un groupe d’historiques. La fatigue ou la colère, aucun sentiment ne semble avoir d’emprise sur Shaker. « Dans la rue on peut sourire aux gens mais chez nous… On est des menteurs ! », rigole son ami Osama, dont la famille a réussi à fuir en Égypte. À la maison c’est différent. Shaker s’informe en temps réel de la situation à Gaza dans la crainte permanente pour sa famille. Le plus difficile c’est quand Internet a été coupé là-bas, le laissant sans nouvelle. Derrière ses yeux toujours pétillants, il reconnait qu’aller bien est impossible. Mais de tout ça, il ne parle finalement que très peu aux veillées, préférant largement mettre en avant le bon cœur de ses amis palestiniens et bruxellois, qu’il aime voir danser ensemble la dabkeh (danse traditionnelle palestinienne). Il se sent mieux ici qu’à Vienne. Dalila aussi s’est faite des amis. Le jour de son anniversaire, ils lui offrent un drapeau palestinien signé. Parmi les autographes, celle d’Émilie qui lors d’une veillée d’hiver, distribuait des stickers, et dont Dalila est tombée amoureuse. « La Palestine n’a pas que du mauvais » sourit-elle.

« On aimerait être plus » 

En attendant, les médias reparlent un peu de Gaza, notamment autour du « massacre de la farine », cette distribution alimentaire pendant laquelle les forces israéliennes ont ouvert le feu, tuant 118 civils palestiniens et en blessant plus de 700. Devant la gare pour autant, ils ne sont toujours que quelques dizaines à continuer de se rassembler tous les jours, désignées sobrement dans le milieu comme « le groupe de Gare Centrale ». Il est encore question d’arrêter, au moment du ramadan – l’horaire n’arrangent pas les musulmans, qui à cette heure, préparent les repas du soir. La détermination de Shaker et Dalila n’est plus à démontrer : les veillées continueront, mais de 16 à 17h. Pendant un mois, les slogans trouveront encore moins d’écho au carrefour de l’Europe. 

Sous le long drapeau palestinien (Gare Centrale, mai 2024). Photo : Selemette HA

Ça n’empêche pas cette jeune militante de croire encore à l’amplification du mouvement. Elle se saisit du mégaphone, alors que le vent souffle sous le long drapeau palestinien : « Tsahal a tué sept humanitaires de l’ONG World Central Kitchen. Cette armée qui vient de détruire l’hôpital Al-Shifa pendant une opération de 14 jours. Malgré le contexte, on est bien peu aujourd’hui. On aimerait être plus ». Plus de cinq mois qu’ils se réunissent ici tous les jours et l’espoir d’éveiller les passants de Gare Centrale sur le drame humanitaire à Gaza semble être intact. Le rassemblement va toucher à sa fin. Deux jeunes femmes passent à côté, s’égosillent ironiquement : « manifestation, manifestation ! » Shaker se ressaisit du micro. Comme un chanteur en concert, il termine par son tube, le « Yoya ». 17h04, deux policiers viennent au drapeau, « c’est l’heure ». Le jeune gazaoui s’éponge le front et la nuque, allume une cigarette. Dalila semble plus sereine que jamais, Émilie lui a offert une bague de promesse, il y a quelques jours. On plie le drapeau. « À demain ».

Un peu plus d’un mois plus tard, le contexte des élections européennes et la vague d’occupation des universités par les étudiants américains et français pour protester contre le massacre à Gaza remet le sujet à la Une. À Bruxelles, le ramadan terminé, les veillées ont repris leur horaire habituel, sans que leur fréquentation dépasse la trentaine de militants. Mais ce mardi 7 mai, c’est différent. Au Proche-Orient, les négociations pour le cessez-le-feu patinent. Surtout, Netanyahou met sa menace d’opération terrestre à exécution concernant Rafah où sont réfugiés plus d’un million de civils palestiniens. Le slogan « All Eyes on Rafah » fleurit sur les réseaux sociaux des associations pro-palestiniennes. C’est au même moment que des étudiants décident d’occuper le bâtiment B du campus Solbosch de l’ULB. L’offensive à Rafah permet au mouvement bruxellois de largement remobiliser. Ainsi, et alors que ça fait longtemps que les veillées ne bénéficiaient plus de « publicité », un visuel est partagé sur Instagram, invitant à venir manifester lors de la veillée du soir, à 18h, à Gare Centrale. C’est la 204ème d’affilée. 

C’est devant un carrefour de l’Europe débordant d’âmes que depuis les épaules d’Osama, Shaker lance les slogans ce soir-là, la tête enveloppée dans un keffieh rouge, celui des grands jours. La mobilisation est telle que la police la laisse exceptionnellement durer jusqu’à 20h. Inespéré, on avait plus vu une veillée comme ça depuis novembre. Dalila, elle, serre les dents. C’est sur son smartphone qu’elle découvre l’ampleur de la mobilisation, depuis la maison de repos où elle travaille désormais. Elle qui n’en a quasi pas raté une. Elle se remémore les fois où c’est sous la neige qu’ils criaient, à dix, les slogans. « Vous étiez où pendant 7 mois ? » se répète-t-elle amèrement.

« C’est comme si on n’avait rien fait » 

« Incitation à la discrimination, à la haine, à la violence ou à la ségrégation à l’égard d’une personne ou d’un groupe ». Ce fait concernant une infraction punissable d’une peine privative de liberté, Dalila découvre qu’il lui est reproché par un courrier de la police daté du 29 août. Ils seraient plus de 90 personnes à avoir reçu une telle convocation pour audition, dans le cadre de ce qui ressemble à une enquête pénale de grande ampleur sur les militants pour la Palestine. Certains, mais pas tous, avaient participé à l’occupation du bâtiment B de l’ULB (renommé « Bâtiment Walid Daqqa ») pour réclamer la fin des partenariats entre l’université et l’État israélien, occupation finalement expulsée par la police le 25 juin. Si le fond du dossier n’est pas encore connu, Amnesty International Belgique et d’autres ONG s’inquiètent des mesures répressives visant le mouvement pro-palestinien belge eu égard au droit de protester en Belgique, rappelant notamment que le port de signes de soutien à la Palestine (drapeau, keffieh, etc.) est couvert par la liberté d’expression alors même que nombre de militants se sont vu devoir les retirer à la fin des manifestations, sous couvert d’une « neutralité de l’espace public ». « On a l’impression qu’on a un fusil ou un couteau. C’est juste un drapeau les gars », résume Dalila qui vient de se tatouer sur le bras sa phrase fétiche : « l’injustice de la justice ». 

Votre rêve n’était-il pas de devenir policière ? 

Un policier à Dalila Gare Centrale, 19h, la police s’assure que la veillée se termine (octobre 2024). Photo : @espacevocation

Canon à eau, arrestations violentes, gaz lacrymogène, matraques. Tout l’été, la page Instagram « Dali Citoyenne Reporter » se colore de bleu, celui de l’uniforme policier. Ce jour-là, Dalila et d’autres militants souhaitent manifester à Bourse, comme tous les vendredis, cette fois en l’absence d’autorisation, « Plaisirs d’Été » oblige. La police procède à une dizaine d’arrestations avant même le début du rassemblement. « Votre rêve n’était-il pas de devenir policière ? » Intimidée, Dali découvre que le policier qui lui parle sait beaucoup de choses sur elle. Le jour même, elle reconnait un « RG » (Renseignement Généraux) dans les vues de sa story Instagram. Dali voit dans cette pression une manière de briser le mouvement, « de nous faire peur ». Et d’une certaine façon, ça marche. En parallèle de la manifestation avortée à Bourse, le groupe habituel des veillées se rassemble Place de l’Albertine, lieu que la police avait autorisé. Entre ceux qui respectent les ordres et les autres, une opposition se forme. Alors qu’il ne devrait former qu’yad wahida (une seule main, en arabe), le mouvement pro-palestinien se fragmente, parfois pour des querelles d’égo. 

Rassemblement « One year of genocide. Veillée pour la Palestine et le Liban » (Bourse, 7 octobre 2024). Photo : David Mcn

Il en faudra, malgré tout, davantage pour faire taire ce cri. Les mobilisations se poursuivent. Si vous passez aujourd’hui à Gare Centrale, à 18h, vous pourrez toujours voir « papy » et sa pancarte sur laquelle « Assange » est maintenant barré, derrière le « Free ». Vous pourrez encore entendre la voix perçante de Shaker. Mais plus celle de Dali. En un an, plus de 42.000 palestiniens ont été tués à Gaza, plus d’enfants et de femmes que lors de n’importe quelle autre guerre de ces 20 dernières années, selon Oxfam. La revue scientifique The Lancet estime que le bilan des morts en Palestine est plus proche de 186 000, chiffre jugé cohérent par le président de Médecins du monde – nombres froids pour des corps humains encore chauds. « Tout ce qu’on a donné, c’est comme si on n’avait rien fait ». Dalila n’a plus envie de voir ses amis, l’impression qu’elle est devenue une sans-cœur. Elle poursuit son engagement pour la Palestine dès qu’elle le peut, mais son ultime souhait, « c’est que tout ça s’arrête »

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Veillées pour la Palestine (épisode 1)

Thu, 17/10/2024 - 10:38
Récit d’une année de mobilisation quotidienne à Bruxelles 

Photo : Maryan SAID

Que faire quand sur les réseaux sociaux, des images d’enfants calcinés parviennent tous les jours de Gaza ? Swiper. Ou crier. À 3000 kilomètres de l’effroi, Dalila et Shaker ont choisi de tordre le cou à l’impuissance en donnant leur voix à la cause palestinienne, tous les jours depuis le 17 octobre 2023, pendant une heure au moins. Mais entre la fatigue, la pression policière et la banalisation dans la société des morts civils au Proche-Orient, la lutte pour le cessez-le-feu se confond bientôt avec celle pour maintenir les veillées quotidiennes, devenues symbole d’espoir. Récit en deux volets d’une année de lutte en forme de montagnes russes émotionnelles. 

Épisode 1 : contre l’impuissance, les veillées quotidiennes 

« Israël assassine les enfants de Palestine ! » Devant la Gare Centrale de Bruxelles, aujourd’hui, ils ne sont qu’une dizaine de militants à répéter le slogan lancé par Dalila, tous rassemblés autour d’un long drapeau palestinien qui prend le vent comme une voile de bateau. Il y a les habitués, dont Thierry, dit « papy », « Free Julien Assange » sur le sac à dos, un drapeau sud-africain dans la main. Sur le côté, un livreur Deliveroo observe en attendant sa prochaine commande. L’effet Larsen fait sourire la mère de cette fillette qui se bouche les oreilles. Nous sommes le 2 avril. Près de 14 000 enfants ont été tués à Gaza sous les bombes israéliennes. Dalila crie toujours – son poing libre s’agite dans tous les sens. Les slogans s’enchainent sans pause, l’énergie du petit groupe ne doit pas retomber. Autour de l’attroupement, on se presse de rejoindre son transport, il est 16h, le carrefour de l’Europe fourmille. Et sursaute soudainement quand Shaker se saisit du micro : « de Bruxelles à Gaza ? » « Résistance, résistance », lui répond la petite assemblée. Le jeune homme se déplace frénétiquement autour du drapeau pour aller chercher le plus d’écho à ses slogans. « De Bruxelles à Gaza ? », répète-t-il sans micro. « Résistance, résistance ! », lui répond-on plus franchement. Ce carrefour semble être sa scène. C’est le 169ème jour d’affilée qu’il s’y produit.

Face à l’horreur : crier tous les jours

Six mois avant, Dali ne se doutait pas qu’elle allait former, avec Shaker, un duo vocal infatigable. Le 17 octobre 2023 se produit une explosion dans la cour de l’hôpital Al-Ahli Arabi, au centre de la ville de Gaza. Des dizaines de palestiniens y périssent. Shaker, originaire de Rafah, dans le sud de la bande, est arrivé à Bruxelles il y a un an, après cinq ans passés à Vienne. Le trentenaire ressent le besoin de faire quelque chose. Il passe un coup de fil à des amis rencontrés il y a quelques mois au 91 rue de la Loi, bâtiment qu’il occupait avec d’autres demandeurs d’asile. Avec eux et d’autres comme Tahsin Zaki, militant depuis vingt ans à la Communauté Palestinienne en Belgique et au Luxembourg et Riet Dhont, ancienne conseillère communale à la ville de Bruxelles (PTB), Shaker initie les premières veillées. À Bruxelles circule l’invitation à venir pleurer les victimes de l’hôpital, « chaque soir d’aujourd’hui à dimanche, à 19h, place de la Bourse. Apportez des bougies. » C’est trois jours après le premier rassemblement que Dalila s’y greffe. Ça fait déjà un moment qu’elle suit le mouvement pro-palestinien bruxellois. À 24 ans, la belge d’origine marocaine se définit comme citoyenne reporter. Gilets jaunes, luttes des sans-papiers ou pour le droit des femmes et des LGBT+, c’est le combat contre l’injustice qu’elle a à cœur et qu’elle documente sur sa page Facebook. Mais quand elle se rend à la veillée pour la première fois, Dali a du mal à rester spectatrice. Ça tombe bien. « Tiens, tiens », fait Ibrahim en lui tendant le micro : « vas-y, fais des slogans en français ! » Elle s’en saisit, et ne le lâchera plus. 

Dès que tu ouvres ton Insta tu vois des images qui t’arrachent le cœur.

Dalila Dalila sur les épaules de Shaker (Bourse, novembre 2023).

Elle se lie d’amitié avec Dounia et Mohamed. Avec Shaker aussi, qui la remercie pour son engagement. Les Instagram s’échangent, dessus les photos et vidéos des veillées. Dali ne reconnait pas sa rage, ce poing qui s’agite quand elle crie les slogans. Depuis l’attaque du Hamas ayant tué 1.170 personnes dans le sud d’Israël, majoritairement des civils, les « animaux humains » que combattent en riposte l’État hébreu et son ministre de la Défense Yoav Gallant prennent aussi des visages d’enfants. Ces visages, les réseaux sociaux de Dalila en sont remplis : « dès que tu ouvres ton Insta tu vois des images qui t’arrachent le cœur. » Corps d’une petite fille coupé en deux, ses organes apparents. Sacs de morceaux de chairs humaines. Visages au voile poussiéreux troué par le sang, partout du sang, des sacs mortuaires blancs, des larmes de mamans. Dali ouvre frénétiquement les stories de Motaz Azaiza, Bisan Owda ou de Wael Al Dahdouh, des journalistes et habitants de Gaza. Elle en cauchemarde : « t’as pas l’impression que ton cerveau se met une fois en pause. » Parfois on se prévient entre militants, « trigger warning il y a une vidéo très violente dans cette story ». Jamais les réseaux sociaux n’ont paru si peu virtuels, montrant une réalité déshumanisée, innommable, tétanisante. Les uns swipent, Dali s’y confronte. C’est là qu’elle puise la force qu’elle met le soir derrière le micro : « je ressens tout à 100%, j’ai envie de faire ressentir ça au gens. »

Les premières semaines, l’émotion collective est à son paroxysme à Bruxelles. Les veillées pour la Palestine s’installent quotidiennement avec la promesse de poursuivre jusqu’au cessez-le-feu. Chaque soir pendant une heure, la Bourse est noire de monde. Certains crient, d’autres pleurent, souvent on fait les deux. Kofia, Julia Boutros ou Mohammed Assaf, on y joue de la musique arabe. À la fin de chaque rassemblement, une bande son fait entendre des cris déchirants, ceux d’enfants gazaouis, avant de se taire pour une minute de silence. De la tristesse à la colère, le son du baffle devient le moyen de ne pas refouler ses émotions. Entre espace de recueillement pour les victimes et de visibilité pour la cause palestinienne, le lieu agrège les fonctions pour n’en garder qu’une : face à l’horreur, crier, tous les jours. Pendant un mois du moins. Les « Plaisirs d’Hiver » prennent leur quartier à Bourse, les veillées sont priées de s’éloigner de la vue des touristes.

Des bougies sont allumées en hommage aux victimes palestiniennes (Gare Centrale, décembre 2023). Photo : Maryan SAID

« Je sais que si je lâche, c’est foutu. »

Hors de question d’arrêter les veillées pour autant, la paix n’est pas à l’ordre du jour à Gaza. Pire, après deux mois de guerre, l’ONU parle de point de rupture concernant le système humanitaire local. L’Union européenne reste divisée et impuissante alors qu’Antonio Guterres, secrétaire général de l’ONU dénonce la « punition collective » infligée aux palestiniens. 18.000 sont tués. Parmi eux, la sœur de Shaker. Il culpabilise. D’être, lui, vivant. De ne pas pouvoir aider financièrement sa famille à Gaza. C’est maintenant à 18h et devant la Gare Centrale (le vendredi à Bourse) qu’il crie quotidiennement avec ses amis et une ardeur décuplée. Conscientiser sur le sort des gazaouis est devenu son obsession, sa voix la seule manière d’aider les siens. Il a étudié l’informatique à Gaza mais son anglais est encore trop approximatif pour trouver un travail en Belgique. Sans papier depuis un an, c’est encore plus compliqué. Chaque manifestation est risquée, la police l’a à l’œil. Mais pour lui et d’autres réfugiés palestiniens, les veillées sont devenues essentielles car arrachées à des quotidiens stressants et souvent ennuyeux au sein des centres d’accueil. Certains font l’aller-retour tous les jours depuis Liège. On se douche, on se prépare, on va quelque part – on a un rendez-vous. Shaker rayonne chaque soir, conscient que de son énergie peut dépendre celle des autres Palestiniens. Dalila se souvient de la force qu’il dégage quand il entonne pour la première fois, solo, le « Yoya ». C’est maintenant tout un chœur qui répond à la voix perçante de Shaker. L’une de ces phrases résume à elle seule le chant devenu le préféré des veillées : « ils ont tué nos enfants, pourquoi on devrait se taire ? »

Vous n’avez qu’à me mettre en cellule !

Dalila Shaker à Gare Centrale (novembre 2013). Photo : Maryan SAID

Tandis que l’hiver s’installe, un noyau dur se forme aux veillées autour duquel la foule est de moins en moins compacte, préférant se déplacer aux grandes manifestations nationales. Même la police en a assez d’être là tous les jours. Dalila redouble de détermination : « moi j’ai pas envie de lâcher, j’ai envie d’être là tous les jours, de continuer, que ça ne s’arrête pas ! » Que l’émotion collective autour de Gaza retombe, Dali ne peut l’entendre, elle qui embrasse tellement la cause qu’elle ne se voit pas travailler à côté de son engagement, malgré le besoin d’argent. Boulot, métro, dodo, c’est pas son truc. Elle a besoin d’un sens et actuellement, elle ne le trouve nulle part ailleurs qu’à Gare Centrale, fière de porter en cape le drapeau de ce peuple qui résiste : « je sais que si je lâche, c’est foutu. » Dalila est du genre butée : « depuis toute petite, ma couleur préférée c’est le rouge, j’ai jamais changé d’avis. Mes animaux préférés sont le lion et le dauphin, j’ai jamais changé. » Elle a pourtant transigé une fois, sur son rêve de gosse, celui de devenir policière. Défendre l’étranger, la veuve et l’orphelin ? Si seulement, « c’est juste une illusion », « l’injustice de la justice » comme elle dit tout le temps. Et la pression policière qui se fait plus forte sur le mouvement depuis son déménagement à Gare Centrale ne risque pas de refermer sa blessure originelle. À 19h pile, tout doit être rangé, l’attroupement dispersé, les drapeaux palestiniens effacés. Dalila pense aux drapeaux ukrainiens déployés sur les édifices publics après l’invasion russe : « on m’a demandé d’enlever ma casquette avec écrit « Palestine », c’est deux poids deux mesures ». Elle passe même quelques heures entre les murs du commissariat de la rue Royale lorsque ce soir-là, les Palestiniens décident de poursuivre la veillée au Mont des Arts, passé 19h. Pour que ça ne dégénère pas, Dali réussit à négocier avec eux leur retour à Gare Centrale où les policiers les encerclent finalement. La jeune militante se sent trahie et coupable : « vous n’avez qu’à me mettre en cellule ! » crie-t-elle avant de ressentir la pression d’un bouclier policier. Son engagement pour la Palestine devient presque sacrificiel. À Bruxelles, la lutte des militants pour visibiliser le sort des Gazaouis se confond avec l’effort de continuer à faire vivre les veillées quotidiennes, malgré l’inexorable chute de leur fréquentation.

Dalila à Gare Centrale (janvier 2024). « Mais pourquoi vous faites ça ? »

« C’est pas en chantant que vous allez arriver à quelque chose » pestent certains. Ne faudrait-il pas davantage s’adresser aux politiques ? Certaines associations pro-palestiniennes bruxelloises, démultipliées depuis le 7 octobre, ont une approche moins « apolitique ». Mais aux veillées, peu de chance de voir des drapeaux partisans. Refusant qu’on lui dise ce qu’il doit faire, Shaker résume : « Je suis Shaker, je ne soutiens pas Samidoun (réseau international de solidarité avec les prisonniers palestiniens dont le porte-parole est fiché comme « prédicateur de haine » par les renseignements belges), je ne soutiens pas le PTB, je soutiens la Palestine, juste la Palestine ». Dans un débat public inflammable sur le sujet où se côtoient vrais racismes et accusations discréditantes d’antisémitisme ou de terrorisme, l’indépendance de Shaker est aussi comprise comme une stratégie au service d’une chose : qu’on parle du drame en Palestine, et rien d’autre. « J’ai besoin que tout le monde sache ce qu’il se passe à Gaza, qu’ils comprennent ce territoire autrement que comme un bastion terroriste mais comme hébergeant un peuple qui a des besoins », poursuit le palestinien. Si les slogans se tournent surtout vers les citoyens, c’est parce qu’il est lucide sur la capacité de la Belgique à agir au Proche-Orient. Comment pourrait-elle agir là-bas alors qu’elle laisse les réfugiés gazaouis dormir dans ses rues ? Ami de Shaker, Osama, compare son cas de sans-papier avec ceux des Ukrainiens mieux lotis, « pas de papiers, pas de passeport, pas de carte d’identité, pas de travail, pas d’argent, je n’ai rien. Le gouvernement est raciste. » Dalila est consciente qu’essayer d’ouvrir les yeux des passants de Gare Centrale prend du temps. En attendant, elle vise leurs oreilles : « les gens entendent nos slogans, peut-être qu’ils vont se renseigner après, on sait pas… » Et « même si c’est une personne sur cent, on a déjà gagné au moins un petit truc. » 

Bâtiment Berlaymont (Commission Européenne) tagué (février 2024). Photo : Dalila

En février, plus de 26.000 palestiniens, civils en grande majorité, ont été tués par Tsahal. Les policiers rigolent, l’un fait : « mais pourquoi vous faites ça ? » Crier ne suffit plus. Dalila frotte à l’eau froide le mur du Berlaymont, encore haletante de la course poursuite. Cette question tourne en boucle dans sa tête alors que s’efface difficilement le graffiti fraichement dessiné sur le siège de la Commission européenne : « FREE PALESTINE, EU SHAME ON YOU ». Le lendemain, un Conseil européen extraordinaire se réunit ici. C’est pour dénoncer l’inaction de l’Union européenne à Gaza qu’elle a suivi cette nuit-là un activiste grapheur, tous deux dénoncés à la police par un restaurateur voisin. Les photos qu’elle a prises des tags apparaitront sur sa page Facebook Dali Live. Les conclusions du Conseil évoquent le cadre financier pluriannuel et le soutien sans faille à l’Ukraine. Une déclaration réaffirme sa condamnation de l’attaque terroriste du Hamas tout en insistant fermement sur le droit d’Israël de se défendre, dans le respect du droit international et humanitaire. « On a beau crier de toutes nos forces, vous ne nous entendez pas » répond-elle finalement au policier qui, en retour, assène : « mais vous pourriez ramenez le cadavre d’un bébé palestinien devant la Commission qu’elle ne ferait rien de plus. »

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Communales: tous gagnants ?

Mon, 14/10/2024 - 09:19
Mammouth a couvert la soirée des élections communales à Bruxelles

Tous les partis se déclaraient gagnants à l’issue du scrutin communal dimanche 13 octobre. Au micro des médias, Georges-Louis Bouchez, qui n’a pourtant pas réussi son pari à Mons, mettait en avant sa progression. Même Écolo, en déroute partout, voulait voir de l’espoir dans certains les bastions où il résistait, comme à Ixelles. Mammouth Media a tendu le micro à quelques-uns des vainqueurs à Bruxelles et posé des questions sur les majorités futures.

À Bruxelles-Ville, le PS/Vooruit de Philippe Close est arrivé en tête avec 28,1 % des voix, devant le MR, qui progresse de 7,3 points à 21,2 %. Le bourgmestre socialiste sortant réalise un meilleur score qu’en 2018, avec 9.042 voix de préférence. Il devance son concurrent David Weytsman (MR +), qui a convaincu 6.108 électeurs. Ces deux-là formeront-ils une majorité ? Nous leur avons posé la question.

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À Molenbeek, le résultat est très serré : le PS-Vooruit de la bourgmestre sortante Catherine Moureaux arrive en tête avec 23,1% des voix, suivi de près par le PTB à 22,2%. Le MR a obtenu 17,1% des voix, et la Team Fouad Ahidar recueille quant à elle 14,6% des suffrages. Appelant à former une « majorité de progrès », Catherine Moureaux a annoncé vouloir former une coalition avec le PTB. Celle-ci accueillera probablement un autre partenaire, afin de sécuriser une majorité que tiendrait autrement qu’à un siège.

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La Team Fouad Ahidar a quant à elle confirmé sa percée, obtenant une près d’une trentaine de sièges dans les différentes communes de Bruxelles. Le nouveau parti s’installera-t-il durablement dans le paysage politique belge ? Nous nous sommes rendus à son siège à Zellik pour en savoir plus.

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Nuits pas safe à Louvain

Sat, 12/10/2024 - 14:39
A Louvain-La-Neuve, rallumera-t-on l’éclairage public la nuit ?

A Louvain-La-Neuve comme dans d’autres communes de Wallonie, l’éclairage public est coupé, hors du centre, entre minuit et 5 heures. De quoi alimenter un sentiment d’insécurité très prégnant chez les étudiants. Un enjeu pour la campagne communale qui s’achève.

 “Toutes les rues ne sont pas éclairées. Dès que l’obscurité s’installe, j’ai peur de me faire accoster”. Ce témoignage d’une étudiante fait écho à beaucoup d’autres, qu’on peut lire notamment sur Facebook. Le groupes “Louvain-la-Meuf” ou “Louvain-la Safe” sont remplis de débats sur l’insécurité, voire de témoignages glaçants. “Bonjour à toutes, il y a quelques années j’ai été victime de viol par un mec d’un cercle de Louvain-la-Neuve ayant déjà une sale réputation à l’époque”, témoignait récemment une étudiante de l’université louvaniste.

Le sentiment d’insécurité est-il corroboré par les chiffres ? Le plan zonal de la commune d’Ottignies-Louvain-la-Neuve rapporte une augmentation des violences sexuelles dans l’espace public. Six viols ont été recensés à Louvain-la-Neuve en 2023.

Pourtant, pour la bourgmestre Ecolo, Julie Chantry, le sentiment d’insécurité n’est pas vraiment objectivité par des faits. Selon elle, la tendance est à la baisse sur des chiffres déjà peu élevés. De quoi faire réagir l’opposition. “A partir du moment où il n’y aurait qu’un viol par an, ça mérite une réponse adéquate de l’autorité communale”, s’exclame le chef de file de la liste “Impulsion C”, Nicolas van der Maren.  Majorité ou opposition, tout le monde s’accorde sur l’existence d’un “chiffre noir” comprenant toutes les agressions pour lesquelles personne n’a déposé plainte. Il existe donc toute une criminalité invisible, car déposer plainte n’est pas évident, notamment parce que la prise en charge au commissariat n’est pas toujours adéquate. A ce sujet, Julie Chantry garantit qu’une partie du corps policier est désormais formée pour recevoir ce genre de plaintes. Son conseil ? Téléphoner au préalable pour demander à être reçu par une personne formée.   

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Plus d’éclairage, une solution ?

À Louvain-la-Neuve, l’éclairage public est éteint entre minuit et 5 heures du matin, excepté sur la dalle piétonne de la ville qui reste, lui, éclairée toute la nuit. Avec la hausse des prix de l’énergie consécutive à la guerre en Ukraine, le gestionnaire du réseau électrique de Wallonie (ORES), avait en effet proposé aux communes qui le souhaitaient de couper l’éclairage  la nuit. Cette décision, à l’époque soutenue unanimement par le conseil communal de Louvain-La-Neuve, est aujourd’hui remise en question . “Ça a un coût énorme, mais je pense que c’est indispensable”, affirme Nicolas van der Maren. A ses yeux, les prix sont redevenus acceptables, et l’autorité communale devrait rendre ce service à la population. 

Julie Chantry explique s’être  entretenue avec ORES pour trouver des pistes de solutions, mais l’entreprise l’a informée qu’il n’était pas possible d’envisager des demi-mesures. Soit on allume un quartier entier soit on l’éteint, mais il n’est pas possible de ne sélectionner qu’une seule rue parmi un quartier. 

La bourgmestre envisage de réaliser une large consultation de la population dès la prochaine législature. Toutefois, une telle consultation exclurait les personnes non domiciliées, donc les étudiants et étudiantes. Au sujet de ces derniers, la bourgmestre souligne qu’ils ne participent en rien aux frais d’éclairage public. “Il faut que ce soit une décision éclairée”, conclut-elle. En attendant de prendre une décision à ce sujet, elle recommande de ne pas rentrer seul et de s’équiper d’une lampe de poche et d’un gilet fluorescent.   

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Plan Oxygène: les grandes villes wallonnes asphyxiées?

Sat, 12/10/2024 - 14:18

Editions de L’Avenie

Depuis 2022, seule la banque ING se manifeste dans la mise en œuvre du plan Oxygène, mis en place par la Région wallonne afin de relancer économiquement les communes wallonnes surendettées. Sur les 350 millions d’euros réclamés par les communes en 2024, 82 millions sont proposés par la banque, excluant la totalité des grandes villes wallonnes.

Voilà maintenant 3 ans qu’un plan d’aide global régional intitulé Oxygène, est mis en place afin de soutenir financièrement les communes wallonnes en difficulté. Il consiste à autoriser les communes à contracter annuellement un emprunt afin d’équilibrer leurs budgets, et ne concerne que les dépenses ordinaires à la différence des subsides pour des projets accordés par la Région ou le CRAC (Centre Régional d’Aide aux Communes). La Région wallonne intervient quant à elle à hauteur de 15% afin de rembourser les intérêts du prêt.

« C’était déjà un signal d’alerte »

Or, depuis son lancement en 2022, seule ING répond à l’appel, avec chaque année des conditions de plus en plus restrictives. La première année, la banque a accordé un prêt de 302 millions d’euros aux 34 communes qui en avaient fait la demande, sur un crédit de 30 ans. « C’était déjà un signal d’alerte », explique Katlyn Van Ovemeire, conseillère experte en finances publiques locales à l’Union des Villes et Communes de Wallonie. Mais pour ING, 30 ans, c’était trop long. Le crédit fut alors baissé à 20 ans pour l’année suivante.

En 2023, les prêts ne concernaient déjà plus que 28 communes, pour un total de 277 millions d’euros, excluant Liège et Charleroi, premier signe de méfiance envers la gestion économique de ces deux villes qui représentent à elles seules 60% de la dette communale wallonne.

« On est dans le flou total »

Cette année, les 7 grandes villes wallonnes se sont vu refuser un emprunt, dont Verviers, à sa grande surprise : « Aujourd’hui, on se retrouve dans une situation où on est dans le flou total, notamment sur la capacité de la Région wallonne à financer seule cet emprunt », confie Alexandre Loffet, échevin des finances (PS) de la ville de Verviers.

Selon Sylvain Jonckheere, porte-parole d’ING, la réduction de l’investissement de la banque orange a été réfléchie « en tenant compte des éléments financiers propres à chaque ville et commune mais aussi de notre exposition déjà existante sur celles-ci ».

À l’approche des élections de ce dimanche, l’annonce d’ING est venue jouer les trouble-fêtes dans cette période électorale. Certains, comme le bourgmestre namurois Maxime Prévot imputent Liège et Charleroi, les deux villes wallonnes à l’endettement le plus conséquent. Pour d’autres, comme Pascale Nouls (cheffe de file Liste Athoise), la responsabilité du PS, au pouvoir depuis plusieurs années dans les communes concernées, est également engagée. Mais selon l’Échevin verviétois, la situation économique des communes est causée en partie par des décisions fédérales : « Les villes ont toute une série de problèmes liés à des dépenses qui devraient être payées par d’autres niveaux de pouvoir, essentiellement le fédéral : les pensions, le CPAS, ou encore les zones de secours et de police. Le plan Oxygène crée donc une dette d’assainissement avec des prêts pour équilibrer nos budgets chaque année qu’on va devoir rembourser sur le temps, plutôt que de vraies solutions. Cet endettement est particulièrement marqué dans les grandes villes, puisqu’elles doivent contribuer aux revenus d’intégration du CPAS à hauteur de 30% ».

En plus de cette contribution au CPAS, le jeune échevin dénonce également le fédéral qui ne remplirait pas ses obligations de financement envers les zones de secours, et l’une des mesures phares de la probable coalition fédérale Arizona (Engagés, MR, N-VA, CD&V et Vooruit), la limitation des allocations chômages, qui augmenterait le nombre de bénéficiaires des CPAS.

Interrogé à ce sujet, François Desquesnes, Vice-ministre-président de la Région wallonne et ministre des Pouvoirs Locaux, veille à ce que cette mesure ne plombe pas les budgets communaux : « Nous avons écrit au négociateur à ce sujet, assure-t-il. De crainte que cela fasse augmenter les bénéficiaires du CPAS, et que donc la charge financière revienne aux communes, nous voulons que le coût de cette proposition soit pris en compte par le preneur de décision, donc le fédéral ».

« La Région Wallonne n’est pas un Mister Cash »

Pour le ministre, il est compliqué pour la Région d’intervenir plus que les 15% qu’elle propose afin de rembourser les intérêts du prêt : « La Région wallonne n’est pas un Mister Cash. La situation est difficile pour tout le monde, la Région étant elle-même en déficit. Il ne suffit pas de dire « nous sommes en déficit, aidez-nous », car ce déficit est lié au fonctionnement communal, dont nous ne sommes pas responsables », explique-t-il.

Malgré la baisse significative du montant obtenu ces deux dernières années, François Desquesnes compte poursuivre le plan Oxygène jusqu’à la fin de sa mise en place, en 2026 : « Pour l’exercice 2024, nous allons faire en sorte de trouver les financements nécessaires. Nous comptons également veiller à ce que le plan de gestion (NDLR : l’une des contreparties du plan Oxygène est l’acceptation des communes participantes d’un plan de gestion qui donne les grandes lignes de leur redressement économique) des communes soit respecté. Pour remettre nos communes sur les rails, il faut travailler sur tous les leviers. Je ne parle pas forcément de rajouter des taxes, mais de s’assurer à ce que les communes perçoivent correctement toutes les recettes ». S’il précise que le marché public du plan de 2024 est toujours en cours, rien ne permet d’assurer que les communes concernées recevront bel et bien l’argent réclamé.

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Walibi, attraction des élections

Sat, 12/10/2024 - 14:07
Entre loisirs et nuisances, Walibi anime la campagne électorale

Mathieu Golinvaux

Pour les centaines de riverains habitant à côté de Walibi, ce n’est pas de tout repos. Les nuisances sonores, les convois exceptionnels qui passent dans les rues étroites mais aussi les visiteurs qui se garent dans des propriétés privées font du parc d’attractions un enjeu incontournable pour la commune de Wavre. Le voisinage, Walibi et les politiques essayent de s’entendre à la veille des élections communales.

Benoît Thoreau s’est installé en 78 sur les hauteurs de Limal, un village surplombant Walibi, trois ans après la création du parc. Le parc, dont le nom tient son origine des 3 villages qui l’entourent, Wavre-Limal-Bierges, n’avait pas encore la même ampleur qu’aujourd’hui. « Au début, les attractions consistaient en une grande roue et du ski nautique. » C’est dans les années 80 que les nuisances ont commencé avec l’installation du Sirocco, une attraction sur rails avec un chariot qui fait des loopings. Les habitants ont eu peur pour leur tranquillité, « ce fût la révolution chez les riverains », se souvient Benoît.

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Pour les centaines de riverains habitant à côté de Walibi, ce n’est pas de tout repos. Les nuisances sonores, les convois exceptionnels qui passent dans les rues étroites mais aussi les visiteurs qui se garent dans des propriétés privées font du parc d’attractions un enjeu incontournable pour la commune de Wavre. Le voisinage, Walibi et les politiques essayent de s’entendre à la veille des élections communales. Article à lire sur Mammouth.media

♬ son original mammouth.media Dégâts & vitesse des voies publiques

Une quarantaine d’années et une moyenne de 1 million de visiteurs par an plus tard, les riverains se plaignent toujours, mais plus seulement pour les nuisances sonores. Le parc attire d’autres problèmes, notamment sur les voiries. Des travaux en cours pour installer une nouvelle attraction dans le domaine provoquent des nuisances routières. Des poids-lourds empruntent la ruelle Al Buse puis la rue Joseph Dechamps qui borde le parc pour accéder au chantier. Cette dernière n’est pas prévue pour accueillir des véhicules lourds, provoquant des dégâts et des situations dangereuses. « Les gros camions qui passent dans la rue fort abîmée, déformée, creusée à certains endroits, ça fait vibrer les maisons. Il y a des fissures à l’intérieur des maisons qui apparaissent », partage Julie, habitante de la rue Joseph Dechamps.

Au carrefour entre les deux rues citées ci-dessus, Paul Brasseur (MR), échevin en charge de la mobilité explique la situation, « il y a une obligation (pour les camions) d’arriver dans le parc par des entrées spécialement dédiées et non pas par la rue Joseph Dechamps. Malheureusement cette obligation n’est pas toujours respectée. » D’autres camions, indépendants de Walibi, se retrouvent perdus au carrefour, souvent mal guidés par leur GPS. « On ne peut pas accuser Walibi de tous les maux qui résultent du charroi et du trafic sur les routes », souligne l’échevin.

« Il n’y a pas que les camions, il y a aussi les automobilistes. Ils roulent trop vite en général. Aucun aménagement n’a été réalisé pour contrer cela, on a peur pour nos enfants. La commune nous a dit que c’était hors de question qu’on mette la rue à 30km/h et que pour les réducteurs de vitesse il n’y avait pas de budget, » soulèvent Julie et Pascale. Habitantes de la rue en question, elles ont lancé une pétition pour demander un meilleur aménagement. La ville leur a annoncé avoir entamé une étude pour réhabiliter la route, « pour en faire une route complètement rénovée, et avec la création d’un trottoir qui aujourd’hui est inexistant » déclare Paul Basseur.

Des nuisances sonores pesantes

Pour ce qui concerne les nuisances sonores, la ville de Wavre est sur le coup. « Nous imposons à Walibi de limiter le bruit à 55 décibels maximum. Ce qu’ils peuvent moins gérer c’est les bruits des visiteurs. Pour cela une mesure importante a été imposée au parc; un mur antibruit de 8 M de haut et 190 M de long a été construit. »

Benoît Thoreau, membre de l’opposition avec les Engagés, trouve le soutien de la part des autorités communales insuffisant, « nous demandons en tant qu’opposition, un meilleur contrôle du niveau de nuisances du parc. Au fur et à mesure qu’on ajoute des attractions, le niveau de bruit augmente. Il faut surveiller cela vu qu’on s’approche des limites, on les a même dépassées certains jours lors des dernières mesures de bruit. Nous demandons une instauration de mesures régulières de bruit au moins chaque année. »

L’opposition a mené une enquête publique sur toute la population de Wavre. Elle a révélé des niveaux de bruit parfois insupportables. Essentiellement sur le bruit routier causé par l’autoroute, mais Walibi était également cité dans les producteurs de bruit. « C’est un problème de santé publique », estime Monsieur Thoreau.

Les nocturnes Halloween : le test

Qui dit fin octobre dit Halloween, la période la plus importante de l’année pour le parc qui organise, comme chaque année, 9 nocturnes: des soirées ou l’ouverture du parc est prolongée jusqu’à 22h. Les riverains, comme les touristes, se préparent à ces soirées, mais ne s’inquiètent pas pour les mêmes raisons.

Paul Brasseur (MR) a conscience de la responsabilité de la commune à organiser au mieux ces soirées, mais admet que celle-ci se retrouve parfois impuissante: « Dès qu’il fait beau, les touristes viennent en masse, cela rend la situation extrêmement difficile à gérer pour Walibi, mais aussi pour la ville de Wavre, puisque nos forces de l’ordre sont parfois dépassées par des événements dont on ne mesure pas forcément l’ampleur à l’avance. » Face à cet afflux de touristes, les conséquences sur les riverains sont directes: « Il y a 2 ans, c’était le bordel, quand il y a une grosse journée d’affluence, les parkings sont saturés et les gens se garent n’importe où, par exemple dans les propriétés privées » racontent Julie et Pascale. Elles se rappellent également du vacarme causé par les nocturnes.

Le scénario de Halloween 2022 ne semble pas risquer de se reproduire cette année. La majorité affirme avoir pris la situation en main : « Avec Walibi, nous discutons pour mettre en place des mesures comme par exemple des trains spéciaux, insister sur le covoiturage avec une aire de dépose-minute ou encore des parkings de délestage qu’on peut réserver temporairement. »

La gestion du problème de Walibi va-t-elle changer après les élections ? Le parc d’attractions, qui est la principale activité touristique de Wavre, en fait la commune avec le plus de visites par an en Wallonie soit 1.3 millions de visiteurs (Walstat). Gérer un exploitant si populaire peut être délicat. L’opposition table sur une approche plus stricte, « le pouvoir communal est actuellement trop laxiste vis-à-vis de Walibi, nous souhaitons que des règles plus strictes soient appliquées pour le bien-être des riverains. » La majorité, elle, se veut conciliante, « notre objectif n’est pas de prendre parti pour l’un ou pour l’autre, mais c’est de rester neutre et de garder l’Église au milieu du village. »

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A Comblain, ce n’est pas scouts toujours

Fri, 11/10/2024 - 15:06

En mai 2023, 15 000 scouts cherchaient toujours des endroits de camp pour l’été qui arrivait. Trouver un site n’est pas toujours facile… surtout quand certaines communes veulent instaurer des règlements pour limiter les camps sur leur territoire. C’est le cas de Comblain-au-Pont. Approuvé à l’unanimité pour limiter les camps, ce règlement semble aujourd’hui être remis en cause par les différents partis.

À Comblain-au-Pont, les scouts sont régulièrement de passage. Cette région verte et vallonnée de la province de Liège, est propice à l’organisation de camps, que ce soit en prairies, sous tente, ou dans des bâtiments loués aux mouvements de jeunesse. Néanmoins, ces camps ne sont pas au goût de tous.

Au printemps 2024, le conseil communal a décidé de limiter ces organisations aux trois dernières semaines de juillet, et ce à partir de l’été 2024. Une mesure que la Fédération des Scouts trouve difficilement compréhensible. « À Comblain, il n’y a peut-être que 18 camps sur un été. Ils parlent de nuisances, mais sans être revenus vers la moindre fédération », explique Gilles Beckers, responsable des relations publiques chez Les Scouts. Selon lui, la régulation des camps scouts est bien en place. La Fédération a coécrit un modèle de règlement en 2021 pour l’accueil des camps avec le Ministre des pouvoirs locaux, et d’autres instances, tel que les services de police, de secours et le Département de la Nature et des Forêts. Ce texte sert de base pour les règlements communaux, qui peuvent l’adapter en fonction de leurs besoins. Mais « parfois, il y a des règles qui sortent du chapeau et qui n’ont pas de sens », poursuit Gilles Beckers. Quand un règlement pose question, les Scouts se rendent sur place pour en discuter directement avec la commune concernée.

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Un règlement « complètement ridicule »

Ce règlement, approuvé à l’unanimité par le conseil communal, a été initié suite à de nombreux appels et plaintes de riverains. « Nous ne sommes pas anti-scouts », explique le bourgmestre Jean-Christophe Henon (Groupe IC), « mais peut-être contre une certaine forme de scoutisme ». Le maïeur dénonce surtout les nuisances sonores excessives, qui impactent les riverains, de la part de certaines unités qui utilisent des sonos ou encore se raccordent à l’eau sans demander d’autorisation à la commune.

« C’est complètement ridicule », s’exclame Henri Defgnée, l’administrateur de l’ASBL ‘Montoise’, qui organise chaque année des camps scouts dans ses gîtes. Ceci est une grosse source de revenus pour lui, et surtout pour entretenir ses infrastructures. Mais pour lui, ce sont avant tout les mouvements de jeunesse qui sont pénalisés.

Afin que le camp se déroule dans les meilleures conditions, Henri Defgnée a instauré son propre règlement, qui prévoit certaines interdictions, le tri de poubelles, ainsi qu’un rappel lié aux nuisances sonores. Il doit impérativement être signé par un responsable qui sera présent pendant toute la durée du camp. « Je le fais pour m’éviter les éventuels problèmes futurs », assure-t-il.

Face au nouveau règlement communal qu’il trouve dérisoire et injuste, Henri Defgnée a introduit un recours au Conseil d’Etat. Son argument ? Il ne fallait pas généraliser la limitation de camps scouts à tous les endroits de camps de Comblain-au-Pont, mais plutôt trouver des solutions pour les endroits qui posent plus problème. Henri Defgnée prédit que la décision du Conseil d’État lui sera favorable, mais il ne devrait pas avoir de réponse dans l’immédiat.

Frédéric Flagothier (Comblain Demain, opposition) comprend la démarche. Même si son parti a approuvé le règlement communal, il nuance aujourd’hui en soulignant que le dossier est arrivé très vite sur la table, avec peu de temps pour le prendre en considération. Pourtant, le règlement « méritait beaucoup d’attention, parce que ça concerne les enfants », explique-t-il. Comblain Demain estime qu’il faudra retravailler le dossier et plutôt essayer de trouver une solution à l’amiable, au cas par cas, selon l’emplacement du camp. En effet, un camp qui a lieu dans des champs reculés ou un camp en plein centre du village n’aura pas le même impact sur les riverains.

Et en 2025 ?

L’été 2024 a été plus serein, avec moins de plaintes de nuisances sonores. Selon le bourgmestre, c’est la « pression » du règlement qui a mené à plus de discipline. C’est pourquoi Jean-Christophe Henon explique que la mesure peut encore évoluer, tant qu’elle préserve le confort des riverains. Frédéric Flagothier exprime que « tout conseil communal, comme tout homme politique peut revoir sa position ». Il mentionne que la priorité de son parti sera d’assurer la sécurité des camps et non de les restreindre.

La commune attend la décision du Conseil d’Etat et agira en fonction. De son côté, la Fédération scoute poursuit sa collaboration avec les communes pour veiller au bon déroulement des camps. Le scoutisme est une solution pour beaucoup de familles l’été, qui préfèrent voir leurs enfants jouer dehors. Revoir ce dossier qui touche les jeunes en premier lieu sera un point d’attention de la prochaine législature.

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Campagne brutale

Fri, 11/10/2024 - 14:55
A peine entrés en politique, les jeunes doivent s’habituer à la violence

À quelques jours des élections communales, le porte-à-porte des candidats s’intensifie, et la violence aussi. Les politiciens locaux y sont régulièrement confrontés, certains pour la toute première fois. Nous sommes allés à la rencontre de Delphine, Joey, Larbi et Julien, des jeunes politiques âgés de 21 à 27 ans.

« Je fais quotidiennement face à de la violence, surtout sur les réseaux : ça va de islamogauchiste à nazi en passant par la critique de mon orientation sexuelle. » Joey Kumps, 6e sur la liste PS à Wavre a l’habitude de la violence politique. À 23 ans, il est descendu dans l’arène l’année passée: « Je me suis déjà habitué à cette violence, même si je suis conscient que ce n’est pas normal. On est obligé de se former une carapace. »

Il n’est pas seul: selon une enquête menée par Anne van Bavel (VUB), un élu sur cinq subit des violences psychologiques et/ou sexuelles au moins une fois par mois. Principalement des intimidations et/ou des menaces, le plus souvent via les réseaux sociaux.

Une enquête de l’Union des Villes et des Communes de Wallonie, publiée en septembre 2023 montre que 67 % des élus locaux ont déjà été victimes d’insultes, 23 % des élus ont subi du cyberharcèlement, et 18 % ont été victimes d’actes de violence. La violence est souvent plus fréquente chez les jeunes, les femmes, les personnes issues de l’immigration ainsi que les personnes faisant partie de la communauté LGTBQ+ selon cette même étude.

Racisme banalisé

Larbi Kasmi, 27 ans, qui se présente sur la liste des Engagés à Mons, a été victime de racisme: « Des violences racistes, j’en ai vécu toute ma vie, qu’elles soient directes ou indirectes. »

Il savait qu’en s’engageant en politique, il y a 4 ans, il allait faire face à ces injustices: « Le délit de faciès est monnaie courante. » Mais c’est pour combattre certaines injustices et faire évoluer les mentalités qu’il a choisi de se lancer.

Il y a du travail. Face à certaines injures, il a dû se résoudre à déposer plainte.

Joey Kumps est lui aussi confronté à des centaines de messages d’insultes. À côté des commentaires désobligeants liés à son engagement politique, il reçoit énormément de haine liée à son orientation sexuelle: « C’est compliqué. D’une part, ça m’atteint fort et d’une autre, je vois qu’il y a encore plein de combats à mener. »

Joey dénonce l’attitude de certains politiques qui tiennent des discours discriminatoires sur les réseaux sociaux et qui ont, d’après lui, un effet direct sur le public. Cette violence a des conséquences directes sur sa vie: « Quand je me balade seul ou quand je vais en auditoire, je ne suis pas hyper à l’aise, par peur qu’on me reconnaisse. »

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A peine entrés en politique, les jeunes doivent s'habituer à la violence. Regardez les témoignages de Delphine, Joey, Larbi et Julien. Article complet sur Mammouth.media.

♬ son original – mammouth.media  « Quand t’es jeune, t’es une proie facile »

La violence ambiante, jusque dans l’intimité des candidats, freine les jeunes qui veulent se lancer, estime Joey: « Dommage que les jeunes aient à subir ça. Ce sont des freins pour se lancer. J’ai quelques connaissances qui s’impliquaient aux jeunes socialistes et ils arrêtent parce que c’est trop violent. La politique est un milieu violent de par sa nature. Mais en plus de ça, quand t’es jeune et que tu veux te lancer, que t’as plein de bonnes ambitions, tu es vite cassé, t’es une proie facile. »

Delphine Blouard, 9e sur la liste du MR à Namur, fait campagne pour la première fois. À seulement 21 ans, les formes de violence qu’elle rencontre sont directes, en rue par exemple, ou indirectes, notamment avec du vandalisme sur ses panneaux: « Quand on va au marché, on est amené à faire face à des gens qui se lâchent, qui ont besoin de se libérer et de dire ce qu’ils pensent du MR ou des candidats. Il y en a qui sont plus crus en attaquant directement une personne.J’ai vraiment peur de retrouver ma vitre cassée quand j’arrive devant ma voiture. »

Bienveillance au sein du parti

Pour soutenir leurs candidats, des partis ont mis en place une personne de référence ou misent sur la solidarité interne.

« Il n’y a pas de psychologue dans le parti à proprement dit, mais si je n’avais pas le soutien des personnes de la liste ou de mes parents, ça serait peut-être différent », précise Delphine Blouard.

« Ce sont des personnes du parti qui sont venues tout naturellement. La cheffe du PS à Wavre m’a pris sous son aile, elle essaie de m’aider, de m’aiguiller et de me protéger au mieux. Je me suis senti soutenu par le parti », poursuit Joey.

Julien Lemoine, 9e sur la liste des Engagés à Namur, a été positivement surpris d’avoir un référent au sein du parti auquel il pouvait se confier: « Une personne qui est réellement dédiée à ça… Je trouve ça très sain. »

La haine, un coup de boost

« Toute cette haine, même si quelque part, ça aurait tendance à me freiner, ça me booste. J’ai envie de continuer, j’ai envie d’y aller et puis, je ne me laisse pas faire. C’est une critique qu’on me fait beaucoup parce qu’en général quand on reçoit des critiques, on nous dit de pas parler, mais moi je réponds avec beaucoup de sarcasme en général », explique le sixième sur la liste à Wavre.

Quand Larbi a été sujet à des commentaires haineux, il a d’abord été dans un état de choc et a ensuite réussi à relativiser et à transformer la haine en force.

« Je suis encore très innocente, je ne me rends peut-être pas compte de ce que les attaques représentent, on verra à l’usure. Peut-être que dans 15 ans, j’en aurai ras le bol, mais pour l’instant avec mon innocence et mon humour, ça me fait rire. Les gens haineux, je me dis même pas que ça existe parce qu’on fournit tellement de bon travail, et c’est ça qui prend le dessus », nous déclare Delphine.

Le Wavrien se veut fédérateur : « J’en parle avec d’autres jeunes d’Ecolo, du MR, des Engagés. Je pense qu’ on a tout intérêt à se soutenir là-dedans. Même si on n’est pas d’accord sur les idées et que parfois la discussion est difficile, quand il s’agit de violence, elle n’est jamais justifiée. »

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Bruxelles : quand la mobilité bouge

Tue, 08/10/2024 - 22:10
Bruxelles figure dans le top 10 des villes les plus embouteillées dans le monde, et pourtant plus de la moitié des Bruxellois n’ont pas de voiture. Mais comment font-ils pour se déplacer dans la capitale ?

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A Namur, nager c’est compliqué

Tue, 08/10/2024 - 14:19
À Namur, une seule piscine pour 115 000 habitants, « c’est l’enfer ! »

Photo : Brieuc Deboeck et Marine Loute

La piscine de Saint-Servais est la seule ouverte dans le Namurois, créant un problème pour les habitants. Dans une ville de la taille de Namur, l’accès à la natation devrait pourtant être une évidence. Ce manque d’infrastructure pourrait-il peser dans la balance à la veille des élections communales ? Comment en est-on arrivé là et quelles sont les conséquences pour les nageurs, les clubs et l’apprentissage des enfants ? Une solution à l’horizon ?

La piscine Louis Namèche, située dans le Nord-Ouest de Namur dans le quartier de Saint-Servais, est ouverte pour le grand public 7 jours sur 7 pour tenter de satisfaire le plus de monde possible en créant un maximum de créneaux. Le bâtiment, construit dans les années 70 puis rénové en 2017, abrite un bassin de 25 m x 15 m composé de 6 couloirs. Ce mercredi après-midi, enfants, adultes et clubs de natation s’y partagent la piscine. Quatre maîtres nageurs observent attentivement les nageurs, qui sont de plus en plus nombreux au fil des heures. Les couloirs se remplissent. Des groupes de jeunes arrivent, Amandine et Lily aussi.

Amandine, 34 ans, une habituée de la piscine, nous partage avec entrain son sentiment : « C’est l’enfer ! Quand il y a les enfants, les nageurs, les clubs plus la partie jeux, parfois on est 15 dans un couloir. J’y vais pour me relaxer et au bout d’un moment, je suis agacée. »

Étudiante en première année à l’Henallux, Lily est également une fidèle et doit adapter son horaire afin de trouver des créneaux plus calmes. « On m’a déjà remballée plusieurs fois parce qu’il n’y avait plus de couloirs de disponibles. Il faut vraiment trouver les bons créneaux. »

« On ne pratique plus la natation, on pratique en réalité les arts martiaux. Pour pouvoir nager c’est plus que pénible, c’est presque devenu mission impossible. » témoigne Emmanuel Depret, fervent militant pour une plus grande offre de piscines à Namur. Il a récolté 1.177 signatures pour une pétition demandant la réouverture de la piscine de Salzinnes. Il continue, « la priorité de la majorité en place n’est clairement pas le social ni l’enseignement aquatique. Le conseil communal s’est assis sur l’avis de 1.117 citoyens. »

La piscine Louis Nameche située à St-Servais est la seule encore en fonction dans la capitale de la Wallonie. @Brieuc Deboeck

Quid des autres piscines de Namur ?

La piscine de Jambes est en rénovation depuis plus d’un an et rouvrira ses portes dans le courant de l’année 2025. Le chantier de remise aux normes de la piscine prend plus de temps que prévu. Aucune mention de date précise n’a été communiquée. « Soyez patients ! » C’est le message de Charlotte Bazelaire (Les Engagés), échevine des Sports.

Concernant la piscine de Salzinnes, l’échevine est pleinement consciente du mécontentement qu’a provoqué sa fermeture définitive. Néanmoins, elle insiste sur la nécessité de la condamner pour des raisons financières. « Il fallait mettre énormément d’argent, ce que la ville n’avait pas. C’est une décision qui a été prise par la majorité et on l’assume mais l’optique était dès le départ une fermeture pour une réouverture. » Une décision critiquée par Marine Chenoy (PS), « C’est un choix politique. On aurait très bien pu débloquer les fonds à partir du moment où on fait des téléphériques, on achète des statues qui valent des milliers d’euros. »

Enfin, pour répondre à une demande toujours plus forte des citoyens d’avoir un bassin en plus dans le namurois, et parce que deux piscines ne suffisent pas, un nouveau projet est sur la table. Il a été annoncé par les Engagés : une nouvelle piscine sur le P + R à Bouge. La ville de Namur n’aurait pas les fonds pour mettre cette nouvelle infrastructure sur pied, et la majorité en place est à la recherche d’un partenaire privé, prêt à investir dans le projet. Mais ce dernier doit d’abord être validé et n’a pas encore de permis d’urbanisme. Quoi qu’il en soit, la piscine de Bouge ne verra pas le jour avant 2030, un timing jugé douteux par l’opposition. « L’annonce du projet à Bouge, arrive à un moment assez spécial puisque c’est juste avant la campagne communale », témoigne Marine Chenoy.

L’opposition espère qu’une attention sera portée à l’accessibilité pour les écoles : « il faut que les écoles puissent avoir un accès prioritaire pour l’apprentissage de la nage ».

En récapitulant, un chantier qui peine à se terminer à Jambes, une fermeture définitive du côté de Salzinnes, et un projet de piscine d’ici minimum 4 ans à Bouge.

La piscine de Saint-Servais est surchargée. @Brieuc Deboeck

Et en attendant la nouvelle piscine de Bouge ?

Afin de garantir des accès tout-public à la piscine, il est conseillé de venir le matin avant les écoles, le midi et sur la courte période après les écoles mais avant les clubs… des créneaux courts et souvent complets.

Pour les écoles et clubs de natation, Charlotte Bazelaire reconnaît que la réduction des heures de piscine a été compliquée. « On a dû mettre des priorités, des accès limités aux écoles avec certaines années et pas d’autres, les écoles devaient sélectionner des années pour venir alors que normalement c’est beaucoup plus ouvert. Pour les clubs, on a réduit leurs horaires de manière assez drastique pour certains. »

D’autres en viennent même à se déplacer en dehors de leur commune, comme Amandine : « je préfère faire les trajets de 30 minutes jusqu’à Andenne parce que c’est plus cool, plus calme, et plus propre. »

Il y a trop de demandes par rapport à l’offre, la densité sur une seule piscine est énorme, parfois on doit se partager un couloir à 22.

Jérémy, éducateur physique à l’école Saint-Ursule

Un niveau de natation inquiétant

Quelles sont les conséquences de n’avoir qu’une seule piscine pour la capitale de la Wallonie ? Jérémy, éducateur physique à l’école Saint-Ursule dans le centre de Namur, est moniteur de natation depuis 15 ans. La solution pour lui: une piscine olympique de 32 couloirs. « Avec 3 piscines, c’était déjà compliqué. La situation s’aggrave aujourd’hui. Le niveau de natation se dégrade, je dois adapter mes cours en conséquence et la quantité de travail s’amoindrit. » Il poursuit : « Il y a trop de demandes par rapport à l’offre, la densité sur une seule piscine est énorme, parfois on doit se partager un couloir à 22.« 

Emmanuel Depret estime que les enfants ont trois ans de retard sur l’apprentissage de la natation. En tant que moniteur, il est proche de la réalité et voit le problème que cela pose. « J’ai dû m’occuper d’un enfant de 10 ans et le mettre en pataugeoire avec des enfants de 7 ans. » Pour lui, la situation est loin de s’améliorer, « lors du prochain mandat, il n’y aura aucune évolution (si la même majorité reste en place), il ne faut pas se leurrer. On va retrouver majoritairement, les Libéraux, les Engagés. La politique ne changera pas.« 

« Un problème de gestion »

Passer de trois à une piscine en si peu de temps, sans avoir de plan B, témoigne-t-il d’un défaut de prévision ? « Je pense qu’on aurait pu éviter de se retrouver dans une telle situation, c’est un problème de gestion », estime Marine Chenoy (PS). Du côté des Engagés, Charlotte Bazelaire, étant arrivée échevine à mi-mandat, était absente lors des premiers débats sur la gestion des piscines mais défend son prédécesseur et ne sait pas s’ils auraient pu mieux anticiper.

Cette désorganisation a mené, donc, à divers problèmes, visibles jusque dans les classes scolaires. Pour les écoles c’est devenu un enfer selon Jérémy. Il faut trouver des créneaux horaires à l’arrache et certaines options sont même privilégiées, certains élèves n’ont donc pas droit à des cours de natation. « Il y a de la discrimination » constate l’éducateur sportif.

Autant du côté des politiques que des citoyens, un constat s’impose : la situation actuelle n’est pas tenable à long terme. La pression sur les Engagés concernant la réouverture de Jambes pèse et le projet de Bouge reste incertain. « Bouge… » lance Jérémy avec un sourire, « mais quand ? »

Cet article a été co-publié avec L’Avenir.

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A l’ombre de Pairi Daiza

Tue, 08/10/2024 - 10:17
Entre rugissements et concertation, Pairi Daiza anime la campagne électorale à Brugelette

Qu’il s’agisse du projet de la nouvelle route, de l’arrivée de nouvelles serres ou encore du nombre croissant de visiteurs, Pairi Daiza ne cesse de faire parler de lui, dans un contexte électoral déjà animé. La commune de Brugelette est-elle en phase de rupture avec le parc animalier ?

Pandas prêtés par la Chine ou lionnes rescapées accueillies en provenance d’Ukraine, la vie des animaux de Pairi Daiza défraie régulièrement la chronique, pour le plus grand plaisir de ses 2 300 000 visiteurs annuels. Mais dans le voisinage immédiat, les riverains ont des préoccupations moins exotiques. Entre les nuisances et les enjeux de mobilité, la présence d’un parc aussi vaste pèse sur le fonctionnement de la petite commune de Brugelette. A l’approche des élections communales, certains candidats voudraient redéfinir les relations avec Pairi Daiza, et l’un d’entre eux plaide carrément pour le démantèlement : “Je ne vois aucun élément positif à garder ce parc à Brugelette”, affirme Lionel Stiers, tête d’une nouvelle liste, “Chacun sa vérité”, très hostile à Pairi Daiza. Lionel Stiers, c’est l’opposant le plus farouche de Pairi Daiza. Antispéciste, voire écologiste extrémiste pour certains, l’homme de 62 ans est pour un départ sans condition de son voisin de plus de 30 ans, un départ qu’il va porter haut et fort lors des élections.

Vigilante Florian

Un développement territorial en question

Les autres listes qui se présentent le 13 octobre aux électeurs brugelettois ne tiennent pas de discours aussi radicaux, mais toutes posent la question des relations entre la commune et son imposant voisin. “Pairi Daiza doit arrêter d’acquérir des terrains, qui plus est des terrains verts, pour garder des îlots de verdure”, affirme Kévin Thys, actuel conseiller communal autrefois pour Ecolo, aujourd’hui candidat en tête d’une nouvelle liste, Renouveau Citoyen. Cette liste a pourtant conservé quelques nuances de vert avec des projets priorisant le développement durable, quitte à s’opposer à la croissance du parc animalier.

Après s’être élargi sur 25 hectares au cours des 30 dernières années, celui-ci fait actuellement état de neuf mondes répartis sur septante-cinq hectares, incluant 800 espèces différentes pour plus de 7500 animaux. Le dernier projet en date ? Le Sanctuary, une serre de 40 000 mètres carrés implantée à deux pas du parc communal de Brugelette, qui devrait ouvrir ses portes d’ici 2025.

Vigilante Florian

La route de la discorde

Qui dit extensions dit nouveaux accès. Le parc animalier n’a rien laissé de côté. En vue de faciliter l’accès au site, une nouvelle route est en développement depuis 2014 par le Service public de Wallonie (SPW). Cette nouvelle voirie traverserait Silly et Ath, pour enfin arriver à l’accès Nord de Pairi Daiza. Au-delà de l’accès au parc, la route améliorera-t-elle la mobilité dans la commune de Brugelette ? Le parc animalier en est convaincu, à condition que cette initiative soit complétée par d’autres politiques de mobilité pour lesquelles il milite également.

Selon Claire Gilissen, porte-parole de Pairi Daiza, 1.800 personnes ont, en 2018, signé une pétition favorable à la nouvelle route : “Cette route a été envisagée dans un objectif d’intérêt général”, affirme-t-elle. 

Le bourgmestre de Brugelette, André Desmarlières, du PS+,  y croit également dur comme fer. “Quand vous allez quelque part, qu’est ce que vous cherchez ? La rapidité et la facilité. Il faut quand même avouer que la facilité c’est la voiture”, dit-il.  Plus de 90% des personnes se rendant en villégiatures, dans des parcs de loisirs, le font en voiture, précise Mme Gilissen.

Mais pour le collectif de riverains  “Non aux routes Pairi Daiza”, c’est de la poudre aux yeux. Ce projet de route ne serait qu’une solution temporaire à un problème structurel. “Si on ne voit pas les choses d’une manière globale, la route supplémentaire, dans 10 ans, elle ne suffira plus”. Il faudrait plutôt revoir à la baisse les ambitions d’extension du parc animalier pour garantir l’efficacité de ce nouvel accès.

Vigilante Florian

Une convention à revoir ?

Tous les habitants et habitantes de Brugelette bénéficient d’un accès gratuit à Pairi Daiza. Pour eux, il s’agit là sans doute de l’un des aspects les plus évidents de la convention qui lie le parc à la commune. Mais ce document n’en est pas moins sujet à des controverses. Au centre des discussions, le montant versé annuellement par Pairi Daiza. 

Pairi Daiza verse actuellement 485.000 euros chaque année à la commune, selon des chiffres communiqués par le bourgmestre. Pour André Desmarlières, cet apport est indispensable au bon fonctionnement de la commune. Sans lui, Brugelette peinerait à boucler son budget. Le parc estime même que la somme est sous-évaluée: elle ne représente en effet que la taxe sur le nombre de visiteurs, alors que d’autres contributions devraient être comptabilisées, comme les taxes de séjour, le précompte immobilier et les abonnements gratuits. Au total, l’apport à la commune s’élèverait à plus de 800.000 euros. En outre, “il faut estimer l’impact économique du Parc dans sa globalité :  des fournisseurs locaux et la création d’activités économiques rendues possibles grâce à la notoriété du Parc”, affirme Claire Gilissen

Kevin Thys n’en estime pas moins que l’apport du parc ne couvre pas toutes les charges engendrées par sa présence sur le territoire de la commune. Il cite notamment l’entretien des routes, le travail administratif supplémentaire de la commune lors de chaque nouvelle demande de permis de travail…

La tête de liste “Renouveau citoyen” juge par ailleurs que la convention est trop verrouillée. Une clause du texte précise que toute modification doit être signalée 6 mois avant son échéance. Sans ce renom, le document est automatiquement renouvelé pour 6 ans. Et comme la majorité actuelle n’a pas demandé de révision, le texte est désormais valable jusque décembre 2029, ce qui est inacceptable selon lui.

Avec d’autres, comme la candidate MR Laura Donfut, il pointe encore le manque de concertation entre la commune et le parc. Trop peu de réunions seraient organisées entre les autorités communales et le parc, un jugement que celui-ci conteste. Le patron de Pairi Daiza, Eric Domb, rencontre régulièrement la commune, affirme Claire Gilissen. 

Quoi qu’en pensent les uns et les autres, les relations entre le parc et la commune continueront de nécessiter beaucoup de discussions. Reste à savoir si les résultats électoraux permettront de rétablir l’entente dans le voisinage. 

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Trooz à la recherche de ses habitants perdus

Fri, 04/10/2024 - 11:21
Dans la vallée de la Vesdre, une commune veut se repeupler

Crédit photos: Océane Vermeiren et Louise de Vuyst

Suite aux inondations de 2021, un peu moins de 500 habitants sur les 8.300 que comptait Trooz ont dû quitter la commune et ne sont pas revenus. Le départ de ses riverains fait, aujourd’hui, partie des enjeux des élections communales qui se dérouleront le 13 octobre prochain.

Un tronc d’arbre au milieu d’une salle à manger, une maison peinte de boue et des vitres cassées. C’est devant ce tableau que la commune de Trooz se réveille chaque matin. Une commune qui peine à retrouver son charme et qui vit avec un creux laissé par le départ d’une partie de la population après les inondations de juillet 2021.

Une maison de Trooz abandonnée, détruite par les inondations de juillet 2021 et qui présente toujours ce visage 3 ans après les événements

« Moi, c’est la maison qui m’a jeté dehors »

Quand Cécile retourne sur place, ce sont les bruits assourdissants des alarmes et les odeurs nauséabondes qui la replongent dans la soirée de ce mercredi d’été 2021. « C’était la guerre« , nous confie-t-elle. Plongées dans le noir, Cécile et sa famille observent les briques des maisons d’en face. Une manière de mesurer le niveau de l’eau ainsi qu’une occupation pendant de longues heures d’attente, piégés dans leur maison.

Des voitures sur les toits et des militaires qui s’activent. Ces scènes qui semblent sorties d’un film de guerre, Cécile a décidé de s’en défaire. Pour elle, le traumatisme des inondations est encore trop présent. « Avant, quand je rentrais dans ma maison, c’était mon cocon, je me sentais en sécurité« , nous raconte-t-elle. Aujourd’hui, c’est une tout autre réalité, qui l’a poussée à déménager.

Cécile Dumont, sinistrée pendant les inondations de 2021, a quitté Trooz

Cécile n’est pas la seule à avoir dû quitter la commune, et à ne plus vouloir revenir. La commune a fait face à de nombreux départs d’habitants. La vallée entière sous les eaux, beaucoup de maisons n’étaient plus habitables. À Trooz, pas moins de 2.000 maisons sur les 4.000 de l’entité ont été touchées. « Personne n’aurait su gérer une telle crise, que voulez-vous faire dans une telle situation« , nous explique Cécile. Pourtant, aujourd’hui, l’impact des inondations est un véritable enjeu dans la campagne des élections communales.

Comment repeupler Trooz ?

Entre 2021 et 2022, la commune a perdu plus de 500 habitants, mais su la population a légèrement remonté en 2024, repassant la barre des 8000 personnes. Il faut retourner à 2011 pour avoir de tels chiffres de la population à Trooz.

Le bourgmestre de Trooz, Fabien Beltran (PS), présente de nombreux projets sur sa table. Nouveau stade de foot, pôles touristiques ou encore rénovations d’écoles, les ambitions sont grandes. Des subsides sont indispensables et le bourgmestre en est conscient.

Le bourgmestre de Trooz, Fabien Beltran (PS), a de nombreux projets pour attirer de nouveaux habitants.

C’est au travers d’appels à projet qu’il espère mettre en œuvre tous les plans de reconstruction. Selon lui, la faible dette de la commune peut également permettre de plus larges investissements. Le bourgmestre nous livre les grosses dépenses déjà faites. « Une année normale, on dépense 1 million d’euros. Ici, en trois ans, on en a dépensé 15 millions« , nous explique Fabien Beltran, « on a déjà fait plein de choses, mais ça prend du temps« .

Une gestion de crise d’ampleur, qu’Olivier Debor (MR) n’hésite pas à remettre en cause. « Ils sont partis dans un trip un peu mégalomane avec des projets pharaoniques« , nous explique le candidat de l’opposition, « avec tous ces nouveaux bâtiments, on pourra bientôt faire les JO« . Le parti espère surfer sur la vague bleue de juin 2024 pour atteindre ses objectifs : mettre ces grands projets à l’arrêt et reprendre la gestion à zéro. Il souhaite redéfinir les priorités de construction.

De nombreux quartiers nécessitent encore des travaux, comme le quartier de la Brouck, un quartier ouvrier qui a été fortement impacté et abandonné. Plus loin dans la vallée, un lotissement de logements sociaux se prépare à être remplacé par des zones non-habitables, dites zones tampons. Une autre mesure de prévention est celle des bassins d’orage. Olivier Debor (MR) encourage l’investissement dans ce projet, mais ce dernier laisse le bourgmestre un peu plus sceptique. Ces bassins pourraient en effet réceptionner des plus petites quantités d’eau, mais n’auraient pas supporté l’ampleur des inondations connues en 2021.

Sur les hauteurs, le nombre d’habitants continue d’augmenter, mais la vallée peine à se remplir. Pour le bourgmestre, Trooz est une ville vivante pour toutes les générations. Il met en avant de nombreux clubs de sports, des plaines de jeux dans chaque quartier et des activités pour les personnes âgées. De quoi s’y retrouver pour toute la communauté.

Néanmoins, Olivier Debor soulève qu’il faut rendre le centre plus sexy. Il pointe les nombreux commerces abandonnés, sur le bord des routes, un night shop délabré et quatre maisons de suite inhabitées. Selon lui, faciliter les permis d’urbanisme pour le changement d’affectation des bâtiments mixtes est une nécessité.

Venir habiter à Trooz a un coût, car à présent, tous les bâtiments doivent être hydrauliquement neutre, ce qui fait augmenter les prix dans le domaine de la construction. Les partis politiques de la ville veulent inciter les riverains à s’occuper de leurs habitations endommagées, car cela permettrait d’attirer de nouveaux habitants. Même si les tentatives de rendre la commune attrayante sont présentes, au vu des recherches scientifiques, Trooz ne restera pas à l’abri de nouvelles inondations. La revitalisation de cette commune sinistrée formera un enjeu de taille pour la prochaine législature, au-delà du résultat électoral.

Cet article a été co-publié avec le journal L’Avenir

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Faux taxi, vraies victimes

Mon, 09/09/2024 - 20:43
Quels parcours judiciaires pour les victimes de violences sexuelles ?

Justice à Guichet Fermé (CC BY ND)

TW : agression sexuelle

Avec documentaire « Faux taxi, vraies victimes » (mémoire médiatique 2023), le public est mis face à ce que peuvent vivre les victimes de violences sexuelles qui décide de se tourner vers le monde judiciaire pour tenter d’obtenir justice.

Durant une vingtaine de minutes, ce sont des interventions de professionnel·les mais surtout les témoignages d’Alice et Marine, toutes deux violées par le même homme, qui portent cette réalité à l’écran. Leur violeur commun a également agressé d’autres femmes entre 2016 et 2019. Il avait pris l’habitude de se faire passer pour un chauffeur de Taxi/Collecto. En 2019, au moment où un message publié sur ULB Confessions fait le tour des réseaux sociaux, l’affaire devient finalement connue du grand public et le dossier s’accélère.

S’il y a autant de parcours judiciaires qu’il y a de victimes, la mise en lumière des vécus d’Alice et Marine permet de mettre le doigts sur certaines failles qui persistent en Belgique concernant la prise en charge et les gestions des cas de violences sexuelles.

« Faux taxi, vraies victimes » a été diffusé le 24 octobre 2023 sur TIPIK ainsi que sur BX1 le 29 juin 2024. Il a remporté le prix Belfius de la presse 2023 dans la catégorie Jeunes talents.

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Squat : de la nécessité financière au choix de vie

Fri, 06/09/2024 - 13:34
A Bruxelles, squat n’est pas forcément synonyme d’insalubrité

Crédit photo: Elise De Koninck

Dans l’imaginaire collectif, la pratique du squat reste encore souvent associée à la délinquance et l’insalubrité. Pourtant, certains squatteurs le sont par choix et non par nécessité.

Pourquoi renoncer au confort matériel et psychologique, d’un logement normal quand on peut se le payer ? Ce podcast réalisé au coeur de Bruxelles t’emmène dans l’univers de Rockin’ Squat à la rencontre de Vijaya et Nael pour tenter de répondre à cette question. 

Un podcast réalisé par Elise De Koninck, étudiante en master complémentaire Presse & Information

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Guides du bobard

Mon, 02/09/2024 - 15:29
Quand les guides touristiques racontent n’importe quoi

Crédit photo: Cécile Delacroix

Des millions de touristes s’aventurent chaque année à travers les rues de Bruxelles. Pour celles et ceux qui font appel à des guides touristiques, il y a un risque : se faire raconter n’importe quoi. Guides touristiques traditionnels ou guides de Free Tour, la formation n’est pas protégée en Belgique, laissant l’opportunité à chacune et chacun de raconter l’Histoire comme bon lui semble.

Grand place
Les pavés de Bruxelles sont un peu sa scène à lui. Les touristes deviennent spectateurs, eBrian lève le rideau. Il n’a pas besoin de micro, il a entrainé sa voix pour qu’elle porte. Parapluie jaune à la main, il est prêt à commencer son tour. Mais tout d’abord, il rappele ce que sont les Free Walking Tours. Parce que des roublards qui essaient de l’arnaquer, il en a eu.
« Nous les guides, vivons de vos pourboires. À la fin du tour, si vous avez eu une bonne expérience, vous pouvez donner un tip au guide » Clin d’œil. « Je suis le guide ! » s’exclame Brian, boute-en- train. « Mais pas de soucis, je vais d’abord vous prouver ma valeur. Vous pourrez décider de ce que vous me donnez ensuite ». Pour les guides touristiques, c’est ainsi que ça fonctionne : plus le tour est apprécié, plus le pourboire sera élevé et les commentaires positifs. Et plus il a de bons commentaires, plus il aura de clients et aura un meilleur classement sur le site de l’agence de booking.
On distingue deux types de guides. Ceux qu’Akif appelle les « anciens », les guides traditionnels, qui proposent des prix fixes par groupe. Puis il y a les guides de « Free Tour », reconnaissables grâce à leurs parapluies, comme Brian, qui misent tout sur leurs performances.

Hôtel de ville
Après une courte introduction sur la ville de Bruxelles, fondée au 8e siècle à Saint-Géry, Brian désigne de la pointe de son parapluie l’hôtel de ville derrière lui. « Vous ne remarquez pas un truc bizarre ? » Les touristes haussent les épaules. « Qu’est-ce qu’il y a, vous avez trop consommé de bières belges hier soir ? » Alors, toujours rien ? Le bâtiment est asymétrique : son côté gauche est largement plus petit que son voisin. « Revenons-en 1402. À cette époque, Jean Van Ruysbroeck était l’un des plus grands architectes de son époque. Il dessine les plans, réalise tous les calculs et donne son travail aux ouvriers. Puis il s’en va. Et il ne reviendra que pour l’inauguration ! Et lorsqu’il arrive devant l’hôtel de ville… ». Brian écarquille les yeux, porte les mains à sa tête et fait mine de se plier en deux en signe de désespoir.
« Le pauvre, il a presque fait un arrêt cardiaque ! » s’écrie-t-il. « Pour un architecte gothique, la symétrie est la clé ! » En bon orateur, Brian laisse une pause théâtrale. « Il ne lui restait plus qu’une chose à faire : boire », conclut-il. C’est un moment important de sa narration, alors le guide regarde intensément son public et bombe le torse pour parler bien fort. « He got wasted, shitfaced, drunk as fuck and everything! Et c’est là qu’il a décidé de monter sur les toits, en équilibre sur la rigole que vous voyez là-haut, et -Ploutsch ! – il est tombé ! Une grosse soupe à la tomate, juste ici, sur la Grand-Place ! » La plupart des touristes rigolent, certains se contentent d’un sourire. « Mais nooooon ! En réalité, c’est une légende, les gars ! #Fake News ! » s’écrie-t-il, sans toutefois raconter la vérité historique du bâtiment. Pas le temps. Après tout, 2h30 de tour, ça passe à toute vitesse.
« En réalité, Jean Van Ruysbroeck a eu une mort paisible, » se désole Lies. « Des petits jeunes qui racontent des bobards, il y en a plein ». Et encore, tous ne précisent pas que c’est une légende. À 68 ans, Lies est guide depuis 7 ans. Comme la pension de retraite ne permettait pas de subvenir à ses besoins, elle a décidé de suivre une formation de 3 ans au CERIA. Sur la Grand-Place, elle est l’une des seules à avoir une formation de tourisme en poche. En effet, comme le statut de guide n’est pas protégé, n’importe qui peut prendre un parapluie et créer son itinéraire.

Statue d’Everard t’Serclaes
Voisine directe de la Grand-Place, la statue d’Everard t’Serclaes, dont le laiton était auparavant d’un gris anthracite, est devenu doré à force d’être touché par les passants. La légende, selon Brian, est différente pour les femmes et les hommes.
« Les filles, si vous touchez la statue, vous atteindrez la beauté éternelle. Les produits de L’Oréal Paris, c’est fini ! » s’exclame-t-il. « Du calme, du calme, retenez-vous encore un peu ! » Même si, à priori, aucune dame n’a fait mine de se précipiter sur la statue. « Pour vous, les filles, l’opportunité est double : vous aurez également plus de chances de trouver l’amour ! » Il a bon dos, le t’Serclaes. « Vous, les gars si vous touchez la statue, vous aurez juste de la chance ». Brian raconte qu’un jour, une touriste s’était scandalisée : « Quoi, ils ont droit à toute la chance du monde et nous, on se retrouve avec des hommes minables ? » Libre à chacun de se faire une idée sur la question. Surtout parce que, s’il est répandu que la statue porte chance, on ne retrouve aucune mention de beauté éternelle et d’amour dans les bouquins. Ou même sur Internet, mais vous pouvez chercher. Ah et en plus, la statue est une copie. La vraie, elle est au musée depuis 2011. Pas de chance.
« On choisit tous comment on raconte l’Histoire », confie Akif, qui a étudié l’économie à la VUB. Après avoir été cadre dans le commercial, il s’est rendu compte qu’il avait besoin de changement. « Les qualités que l’on recherche dans le secteur du commerce, ce sont un peu les mêmes que celles que l’on cherche chez un guide. Il faut être social, inspirer la confiance, être empathique, ne pas être gêné… Et, dans le fond, c’est ce qui me plaisait ». Inspiré par le concept des free tours, il décide alors de lancer son propre modèle, une sorte d’hybride entre le free tour et les tours traditionnels. C’est-à- dire qu’avec Akif, on paie à l’avance, contrairement au Free Tour, mais le prix est par client, et non par groupe. « Comme j’ai de bons commentaires sur les sites de booking , les gens paient ». Et au plus un guide a des étoiles, au plus il peut se permettre d’augmenter le prix.

Hôtel Amigo
Ah, l’hôtel Amigo. En plein centre, il en a vu passer, cet hôtel. Entre Angela Merkel, Emmanuel Macron ou encore Beyoncé ou Jay-Z, peu importe ce qu’on en pense, ça en jette.
L’hôtel Amigo était une prison. Construite en 1522 par les Espagnols, on l’appelait alors le ‘vrunt’. « Vous savez d’où vient le nom ? » questionne Brian. « C’est interactif, le tour, les gars ! Bon, je vous l’dis, alors. Les prisonniers avaient pour coutume d’appeler les gardes espagnols ‘amigo, amigo !’ Depuis les fenêtres. Et quand les bougres arrivaient en bas, ils se faisaient cracher dessus ! ».
« C’est faux, bien évidemment ». Akif, qui s’est penché sur l’histoire de l’hôtel, n’a pas exactement la même théorie. Selon lui, le mot ‘vrunt’ viendrait de ‘vant erren’, ce qui signifie ‘les seigneurs’ en vieux néerlandais, un terme que la plupart des Flamands ne connaissent plus aujourd’hui. « Et comme ‘vrunt’ est très proche du mot ‘vriend’, qui veut dire ‘ami’, les Espagnols l’ont appelé ‘amigo’. C’est sans doute un malentendu de traduction ».
D’après Akif, le truc, avec les touristes, c’est de bien les cerner. Puis en fonction de qui on a en face de nous, on adapte ce qu’on raconte. « À Bruxelles, il y a trois types de touristes. Les boutiques, les Ryanair et les Chinois. » C’est simple. Les boutiques, souvent des Étasuniens, sont ceux qui ont beaucoup d’argent à dépenser. Ce sont ceux-là, les plus intéressants pour un guide touristique. Les Ryanair eux, sont souvent des Espagnols qui voyagent low-cost et ne restent à Bruxelles que quelques jours. Et quand tu as 150 euros en poche pour tout le week-end, tu te tournes plutôt vers les Free Tour, qui certes n’ont rien de gratuit, mais te permettent de choisir le prix. Trois touristes sur 4 à la grand-place seraient des Ryanair. C’est ce qu’estime Akif. Le troisième groupe est le moins intéressant, pour le tourisme local : ce sont le plus souvent des touristes asiatiques, qui voyagent avec leurs propres guides ou accompagnateurs. Ils se prennent en photo et vont manger dans leurs propres restaurants avant d’acheter leurs des souvenirs « made in China ».

Manneken-Pis
L’essentiel, quand on est devant le Manneken-Pis, c’est de jouer des coudes pour se faire une place. D’ailleurs, Brian doit s’assurer au moins dix fois qu’il n’a perdu personne. Concernant le petit homme qui pisse, il existe autant de légendes que de guides, raconte Akif. Pour sa part, il préfère s’en tenir aux faits historiques, sinon, il s’éparpille trop. En plus, il n’y a pas grand-chose à dire, parce que personne ne connaît l’histoire exacte du manneke. Raconter des légendes ne peut être que plus tentant. Pas pour Akif. «Je ne vais jamais inventer un truc ». C’est également la position de Lies, qui estime qu’il est « normal de ne pas tout savoir ». Elle n’hésite pas à faire ses visites avec une farde d’informations sous le bras, pour parer les questions inattendues. Lies a d’ailleurs un ami, guide lui aussi, qu’elle aime parfois écouter. « Quand je lui dis qu’il ne faut pas raconter de bêtises, il me dit : ‘Oui, mais ça les amuse’ ». Son constat est simple : parmi les gens du Free Tour, les guides racontent n’importe quoi. Et puis surtout, c’est n’importe qui. Les guides viennent de partout, de tous les milieux. Il y a des quarantenaires, comme Akif, qui entendent se faire une place dans le milieu. Puis il y a des retraités, comme Lies, qui propose des prix fixes pour des tours plus traditionnels. Enfin, il y a des étudiants ou des personnes plus précaires, nombreux parmi les agences de Free Tour, qui espèrent ne rester dans le business que temporairement.
C’est le cas d’Arthur, 27 ans, qui est arrivé tout droit d’Amérique latine en janvier 2023, avec pour seul bagage un bachelier artistique. Il n’avait jamais imaginé devenir guide touristique avant qu’une amie ne lui propose. Et comme il avait besoin d’argent, il a accepté. « On m’a donné un numéro. J’ai appelé. J’ai eu le job tout de suite ». Quelques jours plus tard, il commençait son premier tour. C’était en mai de la même année. Les qualités que l’on recherche surtout chez un guide, c’est la maîtrise des langues et le contact humain. « En tant qu’artiste, je raconte aussi des histoires. Peut-être pas avec des mots, comme dans les tours, mais avec mon corps ». Pour lui, qui parle espagnol et anglais, ce qui compte, c’est le storytelling. « J’adore parler à des amis. Du coup, je fais la même chose. Je ne veux pas dire que la partie historique d’un tour est ennuyante, ce n’est pas ça. Mais rendre la visite vivante, c’est important, sinon personne n’écoute. Évidemment, je donne des dates et des infos comme ça hein, mais j’essaie de rendre le tout plus léger ». Pour lui, ces différents aspects du métier sont indissociables. « Les gens qui arrivent pour faire des Free Tour, ils viennent pour s’amuser, pas pour faire un master en histoire ».

Palais royal
Après presque deux heures de visite sous la pluie, les touristes sont contents de s’asseoir sur les marches du palais royal. « Dernier stop », prévient Brian. « Avant de se quitter, est-je peux prendre une photo du groupe ? Si quelqu’un ne veut pas être sur la photo, pas de problème ». D’ailleurs, si quelqu’un ne veut pas être sur la photo, c’est tout bénef. Parce que cette photo, elle sera envoyée à l’agence qui se charge de recruter les touristes, qui prend une commission par client. En moyenne, la commission varie entre 2,5 et 4 euros par touriste. Les agences les plus vicieuses, elles, laissent les guides choisir le montant eux-mêmes, en échange d’une plus grande visibilité.
« Nous voici devant le palais royal. Et oui, la Belgique a toujours un roi. Et même une reine, bientôt. Élisabeth. Elle est toujours célibataire, les gars ». Puis, soudain, Brian en a fini avec les blagues. Son ton est devenu sérieux. Changement de sujet.
Le moment est venu de parler du Butcher King, le « roi boucher ». Oui, c’est bien Léopold II. Brian parle de la colonisation du Congo par la Belgique sans détour. Plus que ça, même. Il parle de massacres, de barbarie, de génocide. Léopold II, c’est un boucher, un fou furieux. Fucking bastard revient quelques fois. D’après lui, la Belgique, « c’est aussi ça ».
« Ce n’est pas une critique, en fait. C’est une réflexion », estime Arthur, qui parle également du passé colonial belge lors de son tour. « Par exemple, moi, je parle aussi des zoos humains. Avec empathie, bien sûr. Et je fais toujours une minute de silence. C’est aussi ça, être guide : raconter l’Histoire ». Lies, elle, s’abstient. « Si vous voulez entendre parler du passé colonial de la Belgique, vous n’avez qu’à faire un tour là-dessus ». Ce qu’elle dénonce surtout, c’est que ça n’a rien à voir avec le tourisme. « Dans la charte du guide, on ne donne pas son opinion, on raconte des faits. Parfois, à la cathédrale Sainte-Gudule, moi, je le dis : je ne fais pas de la religion. Je fais de l’Histoire ».
C’est également ce que pense Akif, même si, lui, a une vision plus commerciale du secteur. C’est avant tout une histoire d’image. Mais si tous les guides interrogés pour cet article s’accordent à dire que les autres font mal et qu’il y a un problème, alors, comment raconter l’Histoire ? « Devoir faire une formation pour être guide, ça ne me plairait pas, » songe Akif, qui se considère d’ailleurs un peu comme un historien. « Je n’ai rien à prouver. Par contre, passer un examen pour avoir un diplôme qui protège notre formation, ça, je ne serais pas contre ». Il y a quand même un truc qui le chiffonne : les anciens ont la critique facile. « Être guide, ce n’est pas qu’une narration de l’histoire, c’est aussi un contact humain. C’est un peu comme si les anciens avaient oublié d’évoluer avec le monde. Notre rôle, c’est de vulgariser ». Et parfois, de simplifier un peu l’histoire. « Ce n’est pas toujours 100 % exact, c’est sûr, mais c’est pour garder l’intérêt du public ».

*tous les prénoms de ce récit ont été modifiés

Réaction: La Ville de Bruxelles insiste sur l’offre fiable et déjà existante

Delphine Houba, Échevine de la Culture et du Tourisme de Bruxelles, a réagi à notre article. « S’il est important d’encourager une pluralité et une diversité de regards sur l’histoire de Bruxelles, en tant qu’Echevine de la Culture et du Tourisme, ma principale préoccupation est que les touristes puissent disposer d’informations qualitatives et documentées sur le plan scientifique. C’est le cas dans toutes nos institutions comme nos musées et centres d’art, à l’Hôtel de Ville, etc. C’est pourquoi, à notre échelle, nous soutenons des organismes tels qu’Arcadia, qui organise des visites guidées reconnues par le secteur. Nous coordonnons également des balades de groupe pour découvrir le « Parcours Street Art » et ses œuvres avec les guides confirmé.es de Brukselbinnenstebuiten et dès septembre avec Kimia Studio. De manière générale, nous incitons les touristes à se renseigner auprès de nos instituons culturelles telles que la Maison du Roi, où guides, historien.nes de l’art et urbanistes donnent également des informations de qualité et vérifiées sur le passé de notre Ville. »

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Profs, au coeur du quartier

Wed, 28/08/2024 - 14:23
À Bruxelles, deux tiers des écoles sont catégorisées comme école à indice socio-économique faible. Les élèves qui les fréquentent viennent de quartiers précaires, avec un haut taux de chômage et un faible niveau d’enseignement.

Image par Indus International School Bangalore de Pixabay

Dans ces écoles, les professeurs sont mis à rude épreuve. Ils essayent de donner une chance à tout le monde, mais la tâche ne leur est pas rendue facile. Durant plusieurs mois, nous avons suivi Safia, Melissa et Céline, trois professeures de l’école Saint-Roch.

Un documentaire réalisé par Jamila Saïdi M’rabet, Alexia Diels, Charline Gillis et Leo Wagemans.

À visionner sur YouTube : https://www.youtube.com/watch?v=B8F6_c_WCJw

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Daniel Bernard, des tonnes de sciure

Tue, 23/07/2024 - 14:08

Photo : Fibowa (CC BY ND)

Daniel a planté une forêt il y a 35 ans. Trois hectares d’épicéas, qu’il entretient minutieusement sur une ancienne prairie pentue de Haute Ardenne. Du haut de ses 87 ans, il s’y emploie par passion, avec la volonté de produire du bois et de transmettre le fruit de son travail à sa descendance. Ce quotidien de propriétaire forestier ne constitue qu’une fibre de plus à sa longue vie dans le bois. L’ancien scieur fait le compte : oui, il pense bien avoir exercé « tous les métiers du bois ». Daniel alterne aujourd’hui entre des journées d’artisanat dans son atelier et des rondes de gestion sur sa parcelle. Infatigable.

Fibowa est un site web de reportages, de portraits, de vulgarisation et d’enquête sur l’avenir des forêts et de la filière bois en Wallonie.

Cette vidéo n’est que l’arbre qui cache la forêt. Pour en découvrir chaque sentier, perdez-vous sur fibowa.be.

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